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04/06/2019 | FRANCE | N°18NT00213

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 04 juin 2019, 18NT00213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J...K..., Mme M...K...et M. C...K...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2014 par lequel le maire de Lorient a délivré à Mme H...un permis de construire deux bâtiments séparés par une cour intérieure sur un terrain situé 49 rue de Merville, cadastré section DE n° 243, ainsi que le rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n°s 1501518 et 1502242 du 17 novembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Proc

édure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2018 et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J...K..., Mme M...K...et M. C...K...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2014 par lequel le maire de Lorient a délivré à Mme H...un permis de construire deux bâtiments séparés par une cour intérieure sur un terrain situé 49 rue de Merville, cadastré section DE n° 243, ainsi que le rejet de leurs recours gracieux.

Par un jugement n°s 1501518 et 1502242 du 17 novembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2018 et 5 novembre 2018, Mme J...K..., Mme M...K...et M. C...K..., représentés par MeG..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 novembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2014 ainsi que les décisions de rejet de leurs recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lorient une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal n'a pas répondu à la 2nde branche du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), relative à l'intégration du bâtiment situé en coeur d'îlot du fait de son implantation au sein d'un espace naturel non bâti ;

- les dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- les dispositions de l'article UA 8 du règlement du PLU ont été méconnues ;

- les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et de l'article UA 11 du règlement du PLU ont été méconnues ;

- les règles relatives au stationnement ont été méconnues.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 mai 2018 et 20 novembre 2018, la commune de Lorient, représentée par MeD..., demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant les consortsK..., et de Me I...représentant la commune de Lorient.

Considérant ce qui suit :

1. Le 15 octobre 2014, Mme H...a déposé à la mairie de Lorient une demande de permis de construire deux bâtiments séparés par une cour intérieure, sur un terrain situé 49 rue de Merville cadastré section DE n° 243. Par un arrêté du 1er décembre 2014, le maire de Lorient a délivré le permis sollicité. Les consortsK..., qui sont des voisins immédiats du projet, ont demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de cet arrêté ainsi que des rejets de leurs recours gracieux. Par un jugement du 17 novembre 2017, le tribunal a rejeté leurs demandes. Ils font appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Si les requérants soutiennent que le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal n'a pas répondu à la seconde branche du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), relative à l'intégration du bâtiment situé en coeur d'îlot du fait de son implantation au sein d'un espace naturel non bâti, il ressort des écritures de première instance qu'il ne s'agissait que d'un argument au soutien de leur moyen. Dès lors que les premiers juges, qui ont suffisamment motivé leur jugement s'agissant de la réponse à ce moyen, n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments développés par les intéressés, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé B...demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code, la demande de permis de construire comporte l'attestation du demandeur qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent B...la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer, au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Enfin, si postérieurement à la délivrance du permis de construire, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai. La fraude est caractérisée lorsqu'il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a eu l'intention de tromper l'administration sur sa qualité pour présenter la demande d'autorisation d'urbanisme.

4. Il est constant que le formulaire Cerfa du dossier de demande de permis de construire comporte, à sa rubrique n° 7, l'attestation de Mme H...selon laquelle elle remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. D'une part, dans ces conditions, la circonstance que l'autorisation donnée à Mme H...pour déposer la demande de permis de construire n'émanait pas de la gérante de la SCI propriétaire du terrain, MmeL..., mais de M.L..., ne suffit pas à établir l'existence d'une fraude. D'autre part, si les requérants soutiennent que les murs sur lesquels viendra s'accoler la construction litigieuse n'étaient pas mitoyens mais privatifs, la commune, à la date des décisions en cause, au vu de la présomption de mitoyenneté mentionnée à l'article 653 du code civil, d'une lettre de 2014 émanant de M. et Mme K...dans laquelle ils reconnaissaient une mitoyenneté et de l'extrait du cadastre, n'avait pas d'informations faisant état d'une contestation sérieuse de la mitoyenneté, alors même que les requérants avaient indiqué à la commune dans un recours du 18 mars 2013 que leurs voisins n'avaient pas acheté la mitoyenneté. Si le cadastre a été modifié pour faire disparaître ce caractère mitoyen, cette circonstance est postérieure aux décisions en litige et n'est pas davantage de nature à révéler une fraude.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Il est constant que le projet comporte un bâtiment sur rue et un second bâtiment à l'arrière. Si le bâtiment sur rue comporte un portail de garage, au demeurant permettant un accès de 4 mètres de large, il ressort des pièces du dossier que ce garage n'est pas fermé du côté donnant sur la cour et sur le bâtiment à l'arrière, ce qui pourra permettre, notamment, le passage de personnes pour donner les premiers soins ou de tuyaux pour éteindre un incendie. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article Ua 8 du règlement du plan local d'urbanisme : " En aucun cas la distance ne peut être inférieure à 4 mètres. L'implantation devra favoriser l'ensoleillement et l'éclairage naturel des bâtiments d'une part et d'autre part prendre en compte le principe de réduction des dépenses énergétiques ". Il ressort des pièces du dossier qu'est prévu un espace d'une largeur de 4,83 mètres entre le bâtiment principal et l'atelier loft situé à l'arrière, B...une façade sud de cet atelier largement vitrée et ce loft comportant de nombreuses fenêtres de toit. Quant au bâtiment principal, il comportera de multiples ouvertures aussi bien sur la façade qui donne sur la rue de Merville que sur sa façade arrière. Ainsi, alors même que la différence de hauteur entre les bâtiments est importante et que le bâtiment principal se situe au sud du loft, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article Ua 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions doivent être intégrées à leur environnement (...) En particulier, les constructions doivent s'harmoniser B...les dimensions et les colorations des bâtiments avoisinants et s'adapter à la configuration et à la topographie des terrains (...). Les combles et toitures doivent présenter une simplicité de volume et une unité de conception. Les toitures doivent assurer le bon couronnement de la construction et être en harmonie B...celles des bâtiments voisins (...) ". Ces dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme alors applicables et recodifiées à l'article R. 111-27 et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision attaquée. La construction voisine a certes été qualifiée de bâtiment intéressant par le PLU, mais l'architecture des constructions environnantes est globalement variée et composée à la fois de maisons de ville édifiées au début du siècle dernier et d'immeubles collectifs de 4 à 5 niveaux datant de la deuxième partie du 20ème siècle. En outre, le projet a pour effet de combler une " dent creuse ". Si le projet litigieux prévoit la construction d'un bâtiment en bardage zinc, ce qui n'est pas le cas des autres bâtiments de la rue de Merville, la couleur grise du zinc peut lui permettre de s'intégrer B...les bâtiments voisins. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort par ailleurs des photos produites en première instance que certains bâtiments, situés à proximité immédiate, sont également de couleur claire B...un soubassement gris. Si les requérants soutiennent que les toitures prévues comportent une pente inférieure à 45°, il ressort également des pièces du dossier que plusieurs bâtiments dans la rue ont une toiture terrasse ou monopente. Enfin, il ressort des pièces du dossier que plusieurs parcelles de l'ilot n'ont pas de jardin et sont densément construites. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.

8. En cinquième et dernier lieu, l'article Ua 12 : Stationnement du règlement du Plan Local d'Urbanisme dispose : " Se reporter à l'article 18 du titre I - Dispositions Générales ". Cet article 18 des dispositions générales dispose : " Véhicules automobiles La place de stationnement est comptée pour 25 m². Les calculs sont arrondis à l'unité inférieure. Les aires de stationnement doivent être plantées et répondre aux caractéristiques suivantes : longueur 5 m, largeur 2.50 m. A...marge de recul devra garantir la bonne utilisation de la place de stationnement. Par ailleurs, les largeurs des emplacements voitures limités par une ou deux parois verticales sont les suivantes : - Sans parois verticales : 2.50 m - B...une paroi verticale : 2.60 m intérieur- B...deux parois verticales : 2.70 m intérieur ". Il ressort du plan de masse que la largeur totale des deux emplacements de stationnement au sein du garage est de 6, 46 mètres. Ainsi, et alors même que l'accès des voitures au garage n'est que de 4 mètres et dès lors qu'il n'est pas établi que le stationnement des véhicules ne serait pas possible, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts K...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés au litige :

10. La commune de Lorient n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à sa charge le versement de la somme demandée par les consorts K...à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers la somme demandée par la commune à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts K...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Lorient au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme J...K..., à M. C...K..., à Mme M...K..., à la commune de Lorient et à Mme F...H....

Délibéré après l'audience du 17 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juin 2019.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N°18NT00213


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00213
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : CABINET AetE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-04;18nt00213 ?
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