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22/03/2019 | FRANCE | N°18NT03063

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 22 mars 2019, 18NT03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 19 septembre 2017 par laquelle le préfet du Loiret a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n° 1800738 du 5 juillet 2018 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2018 et un mémoire du 27 février 2019, lequel n'a pas été communiqué, MmeD..., épouseB..., représentée par MeF..., demande à la

cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 19 septembre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 19 septembre 2017 par laquelle le préfet du Loiret a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n° 1800738 du 5 juillet 2018 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2018 et un mémoire du 27 février 2019, lequel n'a pas été communiqué, MmeD..., épouseB..., représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 19 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, sur le fondement de l'article L 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

4°) subsidiairement d'enjoindre au préfet du Loiret, sur le fondement de l'article L 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- les articles L 313-12 et L 214-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnus en raison des violences conjugales qu'elle a subies ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

- l'illégalité du refus de titre vicie cette décision ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 octobre 2018 le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Brisson,

Considérant ce qui suit :

1. Mme E...D..., ressortissante ivoirienne, née le 3 février 1978, est entrée sur le territoire national le 20 mai 2014 consécutivement à son mariage, le 6 février 2014, avec M. C...B..., ressortissant français, en étant munie d'un visa de long séjour valant titre de séjour valable jusqu'au 15 mai 2015. Ce titre a été renouvelé jusqu'au 15 mai 2017. Aux termes de l'arrêté en litige du 19 septembre 2017, le préfet du Loiret a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination. Mme D...relève appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article L 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale. (...)".

3. Ces dispositions ont entendu créer un droit particulier au séjour au profit des personnes victimes de violences conjugales ayant conduit à la rupture de la vie commune avec leur conjoint de nationalité française.

4. Mme D...a, le 29 juillet 2016, déposé plainte auprès des services de police à raison des coups de poing qui lui ont été portés au dos et à la poitrine, le même jour, par son époux. Le certificat médial établi, le lendemain, par un praticien du centre hospitalier d'Orléans fait état d'une sensibilité dorsale et de douleurs diffuses liées à une contusion superficielle du torse bien que les lésions ne soient pas visibles à l'oeil nu. L'intéressée a, par une main-courante du 19 septembre 2016, signalé à la police avoir quitté le domicile conjugal du fait des violences conjugales de son époux et a bénéficié d'un accompagnement social en faveur des femmes victimes de violences à raison de 3 séances entre septembre 2016 et janvier 2017. Par ailleurs, M. B...s'est engagé par écrit, notamment, à ne plus porter la main sur la personne de son épouse et des attestations de tiers, y compris de la belle-fille de ce dernier, font état des violences verbales et psychologiques et des mauvais traitements infligés par celui-ci à l'égard de son épouse. L'ordonnance de non-conciliation prise le 20 octobre 2017 par le juge aux affaires familiales près le tribunal de grande instance d'Orléans, bien que postérieure à la décision attaquée, mentionne que le couple réside séparément depuis septembre 2016.

5. Dans ces conditions, les violences conjugales dont Mme D...se dit victime doivent être regardées comme établies et à l'origine de la rupture de la vie conjugale. Il s'ensuit qu'en refusant d'accorder à l'intéressée le bénéfice des dispositions de l'article L 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Loiret a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de munir Mme D...d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros qui sera versée à Mme D...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Loiret du 19 septembre 2017 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Loiret de munir Mme D...d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'Etat versera à Mme D...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D...épouse B...et au ministre de l'intérieur

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2019 où siégeaient :

- M Perez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- MA...'hirondel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 mars 2019.

Le rapporteur,

C. BRISSONLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 18NT03063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03063
Date de la décision : 22/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : TOLOUDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-03-22;18nt03063 ?
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