Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...E...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 20 novembre 2017 par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre d'identité républicain ou un document de circulation pour étranger mineur en faveur de l'enfant Shana Marie-Consuella Loïs Hannamel Koffi, née le 1er juin 2010 à Clichy.
Par un jugement n° 1800255 du 5 juin 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 juillet 2018, M. B...E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 juin 2018 ;
2°) d'annuler la décision du préfet du Loiret du 20 novembre 2017 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Loiret de délivrer, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, le document de circulation sollicité ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
la décision contestée est insuffisamment motivée ;
le préfet n'a pas procédé à une étude approfondie de la situation de l'enfant ;
la décision contestée méconnaît les dispositions des articles L. 321-4 et D. 321-16 à D. 321-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la demande qu'il a présentée remplit les conditions requises par ces textes, en particulier celles concernant le cas de délégation de l'autorité parentale ;
le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant en ne prenant pas en compte l'intérêt supérieur de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2018, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. E...n'est fondé et s'en remet, pour le surplus, à ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
le code des relations entre le public et l'administration ;
le code de justice administrative
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...E...a sollicité du préfet du Loiret un document de circulation pour étranger mineur en faveur de la jeuneF..., née le 1er juin 2010 à Clichy sur laquelle il exerce l'autorité parentale. Par une décision du 20 novembre 2017, le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer ce document. M. E...relève appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 juin 2018 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. "
3. Pour justifier son refus de délivrance d'un document de circulation opposé à M. E..., le préfet du Loiret, après avoir cité les textes pertinents dont il a fait application, fait état d'éléments de faits relatifs à la situation particulière de la jeune F...vis à vis de ses parents et du requérant. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet aurait insuffisamment motivé sa décision et n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de l'enfant doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des conventions internationales, les étrangers mineurs de dix-huit ans dont au moins l'un des parents appartient aux catégories mentionnées à l'article L. 313-11, au 1° de l'article L. 314-9, aux 8° et 9° de l'article L. 314-11, à l'article L. 313-20 ou qui relèvent, en dehors de la condition de majorité, des prévisions des 2° et 2° bis de l'article L. 313-11, ainsi que les mineurs entrés en France pour y suivre des études sous couvert d'un visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois reçoivent, sur leur demande, un document de circulation qui est délivré dans des conditions fixées par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article D. 321-16 du même code : " Le document de circulation est délivré de plein droit à l'étranger mineur résidant en France, non titulaire d'un titre de séjour et ne remplissant pas les conditions pour obtenir la délivrance du titre d'identité républicain institué par l'article L. 321-3, s'il satisfait aux conditions posées par l'article L. 321-4. / Le document de circulation peut également être délivré à l'étranger mineur résidant en France, non titulaire d'un titre de séjour et ne remplissant pas les conditions pour obtenir la délivrance du titre d'identité républicain, s'il se trouve dans l'une des situations suivantes : / 1° Le mineur est entré en France sous couvert d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ; / 2° Le mineur est ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou de l'un des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen et l'un de ses parents au moins est établi en France pour une durée supérieure à trois mois ; / 3° L'un au moins de ses parents a obtenu soit, en application du livre VII du présent code, le statut de réfugié, le statut d'apatride ou la protection subsidiaire, soit, en application de l'article 13 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, l'asile territorial, et justifie à ce titre d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident ; / 4° L'un au moins de ses parents a acquis la nationalité française ou celle d'un Etat membre de la Communauté européenne ou de l'un des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen. ". Selon l'article D. 321-17 de ce code : " Le document de circulation pour étranger mineur est délivré par le préfet du département où réside habituellement le mineur et, lorsque ce dernier réside à Paris, par le préfet de police, sur demande de la personne exerçant l'autorité parentale ou de son mandataire. / La demande est déposée à la préfecture ou à la sous-préfecture ". L'article D. 321-8 de ce code prévoit que : " Le demandeur présente : / 1° Un document établissant son identité et sa nationalité et un document justifiant de la régularité de son séjour ; / 2° Les documents attestant qu'il exerce l'autorité parentale sur le mineur pour lequel la demande est souscrite ou qu'il détient un mandat de la personne titulaire de cette autorité ; / 3° Les documents relatifs à l'identité, la nationalité et la filiation du mineur et justifiant que ce dernier appartient à l'une des catégories mentionnées à l'article D. 321-16 ".
5. Si, selon un jugement du 19 mai 2017 du tribunal de première instance d'Abidjan, les droits de la puissance paternelle concernant la jeune F...sont exercés par M. B... E..., ce jugement n'a pas pour objet de modifier le lien de filiation qui unit l'enfant à ses parents légitimes ou naturels. Dans ces conditions, la situation de l'enfant n'entrant dans aucune des catégories mentionnées à l'article D. 321-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le requérant n'ayant, par suite, pas pu présenter les justificatifs requis comme l'exigent les dispositions de l'article D. 321-18 du même code, M. E...n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a été prise en méconnaissance de ces articles. En outre, il ne peut utilement soutenir que les dispositions de l'article D. 321-17 de ce code ont été méconnues en faisant valoir qu'il exerce l'autorité parentale sur l'enfant dès lors que cette circonstance relève, en application de cet article, de la recevabilité de sa demande laquelle n'a pas été remise en cause par l'autorité administrative.
6. En troisième lieu, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de délivrance d'un document de circulation au bénéfice d'un étranger mineur qui n'entre pas dans l'une des catégories mentionnées par l'article D. 321-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'un refus de délivrance d'un tel document ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 selon lesquelles " dans toutes les décisions qui concernent les enfants... l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. L'intérêt supérieur d'un étranger mineur qui ne remplit pas les conditions pour bénéficier du document de circulation, lequel ne constitue pas un titre de séjour mais est destiné à faciliter le retour sur le territoire national, après un déplacement hors de France, des mineurs étrangers y résidant, s'apprécie au regard de son intérêt à se rendre hors de France et à pouvoir y revenir sans être soumis à l'obligation de présenter un visa.
8. M. E...fait valoir que l'intérêt supérieur de la jeune F...est de pouvoir rendre visite à ses parents, en particulier à sa mère restée en Côte d'Ivoire sans la restreindre dans sa liberté d'aller et venir. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les parents de cet enfant se trouveraient dans l'impossibilité d'entreprendre eux-mêmes un déplacement en France pour la rencontrer alors que M. E...ne justifie d'aucune autre circonstance particulière qui rendrait nécessaires des voyages réguliers de l'enfant entre la France et son pays d'origine. L'absence de délivrance d'un document de circulation ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse effectuer des voyages en sollicitant la délivrance de visas. Dans ces conditions, et alors que le requérant n'établit pas, ni même n'allègue avoir effectué une demande en ce sens qui lui aurait été refusée, M. E...n'apporte au soutien des ses allégations aucun élément permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé, ni, en tout état de cause, que la soumission aux procédures normales d'obtention d'un visa présenterait pour l'enfant des inconvénients excessifs.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées M. E... ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B...E...et au ministre de l'intérieur
Copie en sera adressée pour son information au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 5 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M.A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2019.
Le rapporteur,
M. C...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02627