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19/03/2019 | FRANCE | N°18NT00048

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 mars 2019, 18NT00048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 25 mars 2016 par laquelle le ministre du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 2015 de la 8ème section d'inspection de l'unité territoriale du Cher de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Centre, a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 31 jui

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 25 mars 2016 par laquelle le ministre du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 2015 de la 8ème section d'inspection de l'unité territoriale du Cher de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Centre, a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 2015 et a accordé à l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond l'autorisation de le licencier.

Par un jugement n° 1601241 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 janvier et le 9 octobre 2018, l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 9 novembre 2017 ;

2°) de mettre à la charge de M. D...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation de la gravité des faits reprochés M.D....

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 août 2018, M.D..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les moyens soulevés par l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond à l'encontre du jugement contesté ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 2 octobre 2018, la ministre du travail conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 9 novembre 2017.

La ministre soutient que les faits reprochés à M. D...constituent une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- les observations de MeE..., représentant M.D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D...est employé en contrat à durée indéterminée par l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond depuis le 19 septembre 1990. Il occupe un poste de moniteur d'atelier polyvalent de 2ème classe depuis le 4 mars 2013 et possède par ailleurs la qualité de membre titulaire du comité d'entreprise et du comité central d'entreprise. A la suite d'un accident du travail subi par un travailleur handicapé de l'équipe de M. D...le 17 juin 2015, l'association a engagé une procédure de licenciement pour faute à l'encontre de ce dernier. Le 1er juillet 2015, l'association a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de procéder au licenciement de l'intéressé. Le 31 juillet 2015, l'inspecteur du travail a refusé de lui accorder cette autorisation. Par une décision du 28 mars 2016, le ministre du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 2015, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a accordé à l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond l'autorisation de licencier M.D.... Par sa présente requête, l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond relève appel du jugement du 9 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du ministre du travail du 25 mars 2016.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Il est reproché à M. D...pour justifier son licenciement d'avoir introduit dans l'établissement une tondeuse manifestement dangereuse, d'avoir sciemment laissé un travailleur handicapé utiliser cette machine sans aucune protection individuelle alors qu'il avait été informé par le mécanicien affecté à la réparation de l'ensemble du matériel utilisé par l'atelier " Espaces verts " que le système de frein de lame de cette tondeuse était défectueux et que l'utilisation de celle-ci était, en l'état, susceptible de faire courir des risques à ses utilisateurs et enfin d'avoir sous-estimé les conséquences de l'accident en signalant ce dernier sur le registre prévu à cet effet sous la mention " d'accident bénin " sans informer sa hiérarchie des circonstances exactes de l'accident.

4. D'une part, la matérialité des faits reprochés à l'intéressé est établie et n'est pas contestée. D'autre part, ces faits présentent un caractère fautif. Toutefois, il est constant que M. D... n'a jamais été sanctionné pour des faits de négligence ou de méconnaissance du règlement et n'a jamais fait l'objet de sanction disciplinaire antérieurement à la décision de licenciement en litige. Il n'est pas contesté que les modalités de signalisation des machines défectueuses étaient déficientes jusqu'à la mise en place, par une note de service du 23 juin 2015, de la recommandation tendant à " l'isolement et l'affichage hors service immédiat pour tout matériel ou véhicule défectueux ". En outre, la consigne de porter les gants a été donnée au travailleur handicapé concerné, même si le respect de cette consigne n'a pas été vérifiée. Dans ces conditions, eu égard aux circonstances de l'accident en cause, appréciées dans leur ensemble, notamment au regard du comportement de M. D... suite à l'accident, ce dernier étant intervenu immédiatement pour prodiguer les premiers soins avant d'inscrire la blessure au doigt causé par la machine au registre des accidents bénins, ce qui s'oppose à toute volonté de dissimulation, le tribunal administratif, en estimant que la faute de M. D...n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, n'a pas commis d'erreur d'appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond et la ministre du travail ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 25 mars 2016 par laquelle le ministre du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé par M. D... contre la décision de l'inspecteur du travail du 31 juillet 2015, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a accordé à l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond l'autorisation de licencier l'intéressé.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond demande au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond la somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond et l'appel incident de la ministre du travail sont rejetés.

Article 2 : L'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond versera à M. D... la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de parents d'enfants inadaptés de Saint-Amand-Montrond, à M. A...D...et à la ministre du travail.

Une copie sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Centre.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars2019.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

2

N° 18NT00048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00048
Date de la décision : 19/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : CABINET FIDAL (BOURGES)

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-03-19;18nt00048 ?
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