Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Bourges a demandé au tribunal administratif d'Orléans, en premier lieu, de condamner solidairement les sociétés CILC, Apave Parisienne, Agaura, Abac Ingénierie et M. I...L...à lui verser la somme de 250 083,61 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et capitalisation de ces intérêts, au titre du surcoût des travaux de construction du gymnase municipal des Merlattes du fait de la déformation de certains arbalétriers, en deuxième lieu, de condamner solidairement les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingénierie à lui verser la somme de 12 276,11 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et capitalisation de ces intérêts, au titre du surcoût des travaux du fait des fissures sur les flasques des arbalétriers, en troisième lieu, de condamner la société CILC à lui verser la somme de 29 945,85 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et capitalisation de ces intérêts, au titre des pénalités de retard, en quatrième lieu, de condamner solidairement les sociétés CILC, Apave Parisienne, Agaura et Abac Ingénierie à lui verser la somme de 19 711,44 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et capitalisation de ces intérêts, au titre des pénalités de retard, en cinquième lieu, de condamner solidairement les sociétés CILC, Apave Parisienne, Agaura, Abac Ingénierie et M. L...à lui verser la somme de 14 598,52 euros aux titres des frais et honoraires d'expertise, en sixième lieu, de condamner solidairement les sociétés CILC, Apave Parisienne, Agaura et Abac Ingénierie à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'assistance aux opérations d'expertise.
Par un jugement n°1503080 du 24 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a, par un article 1er, condamné la société CILC à verser à la commune de Bourges la somme de 2 336,50 euros TTC en réparation des préjudices consécutifs aux fissures affectant les flasques des arbalétriers du gymnase des Merlattes et la somme de 33 818,76 euros TTC en réparation des préjudices consécutifs à la déformation des arbalétriers, assorties des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2015 et de la capitalisation annuelle de ces intérêts, par un article 2, condamné solidairement les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingénierie à verser à la commune de Bourges la somme de 110 119,86 euros TTC en réparation des préjudices consécutifs à la déformation des arbalétriers, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2015 et de la capitalisation annuelle de ces intérêts, par un article 3, condamné la société CILC à verser à la commune de Bourges la somme de 49 657,29 euros au titre des pénalités de retard, par un article 4, mis à la charge définitive et solidaire de l'entreprise CILC et des sociétés Agaura et Abac Ingénierie les dépens pour un montant de 29 686,45 euros TTC et à la charge de l'entreprise CILC la charge définitive pour un montant de 10 849,31 euros TTC, par un article 5, mis à la charge solidaire des sociétés CILC, Agaura et Abac Ingénierie une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par un article 6, mis à la charge de la commune de Bourges le versement d'une somme de 1 000 euros à la société Apave Parisienne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par un article 7, condamné M. L... à garantir les sociétés Agaura et Abac Ingénierie à hauteur de 70 % des condamnations prononcées à leur encontre aux articles 2, 4 et 5 et par un article 8, rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2017, la commune de Bourges, représentée par MeG..., demande à la cour :
1°) de réformer l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mai 2017 ;
2°) de condamner les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie à lui payer, au titre de la déformation des arbalétriers, la somme de 166 326,17 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande et capitalisation de ces intérêts.
3°) de mettre à la charge des sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les désordres affectant les arbalétriers, pour lesquelles le tribunal administratif d'Orléans a condamné solidairement les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingénierie à réparer les conséquences dommageables, ont engendré des coûts supplémentaires liés à la reprise des travaux, à l'augmentation des honoraires dus à la maîtrise d'oeuvre, à la signature d'un avenant au marché de maîtrise d'oeuvre, à l'attribution d'une mission spécifique de maîtrise d'oeuvre, aux travaux de reprise consécutifs aux dégradations causées au gymnase pendant la période d'arrêt du chantier, aux travaux et prestations hors marchés initiaux réalisés à la suite du sinistre, au suivi de l'évolution de la charpente par un géomètre, au suivi du sinistre par les services techniques de la commune, à l'analyse des relevés de flèches du géomètre sur deux années et aux dépenses supplémentaires imputées au compte prorata ;
- le tribunal n'a pas procédé à la réparation de l'entier préjudice qu'elle a subi ; elle est en droit de réclamer une somme supplémentaire de 56 206,31 euros ; en ce qui concerne les travaux de reprise consécutifs aux dégradations causées au gymnase pendant la période d'arrêt du chantier, l'allongement anormal de l'immobilisation du chantier dans un quartier sensible du fait des désordres affectant l'ouvrage et empêchant son occupation normale par le personnel municipal et les usagers est la cause exclusive des actes de vandalisme qui ont entrainé des dégradations chiffrées par l'expert à la somme de 10 439,59 euros ; il convient d'y ajouter la somme de 15 725,80 euros TTC, correspondant aux frais de constat, de chauffage, d'électricité et de nettoyage engagés à la suite du sinistre selon le chiffrage retenu par l'expert ; s'agissant des prestations liées à l'évolution de la charpente par un géomètre et de l'analyse des relevés de flèches du géomètre sur deux années évaluées à la somme de 20 160 euros, elles ont été exigées par l'expert judiciaire pour assurer une reprise pérenne de l'ouvrage et sa stabilité, notamment dans l'intérêt de la sécurité des personnels et des usagers ; enfin, les dépenses portées au compte prorata géré par la société GBC pour 9 880,92 euros ont été acquittées et sont liées à l'ajournement des travaux consécutifs aux travaux d'expertise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2018, la société CILC Charpente industrielle Lamelle couverture et MeJ..., administrateur judiciaire de la société, représentés par MeK..., concluent au rejet de la requête et demandent en outre qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Bourges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par la commune de Bourges ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2018, la société Agaura et la société Abac Ingenierie, représentées par MeE..., concluent au rejet de la requête et demandent en outre qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bourges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que les moyens soulevés par la commune de Bourges ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., représentant la société CILC, celles de MeH..., représentant la commune de Bourges, celles de MeA..., représentant la société Agaura et la société Abac Ingénierie et celles de MeB..., représentant la société Apave Parisienne.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Bourges a décidé en 2008 la construction du gymnase municipal des Merlattes. Par un acte d'engagement signé le 14 janvier 2008, elle a confié la maîtrise d'oeuvre à un groupement solidaire constitué de la SCP d'architecture Gauchery-Radigue aux droits et obligations de laquelle vient la société Agaura, mandataire du groupement, du bureau d'études techniques Abac Ingénierie et de la Sarl Orfea. Le même jour, elle a confié à la société Apave Parisienne une mission de contrôle technique. Le lot n° 2 "Charpente" a été confié à la société CILC par acte d'engagement signé le 23 juin 2009 pour un montant de 269 745,22 euros TTC. En mai 2010, des fissures sur les flasques des arbalétriers posés par la société CILC ont été relevées par l'équipe de maîtrise d'oeuvre. Les flasques fissurées ont été remplacées, à ses frais, par la société CILC. Cette dernière a alors saisi le juge des référés près le tribunal administratif d'Orléans aux fins de désignation d'un expert judiciaire ayant pour mission de donner son avis sur les causes et les conséquences de l'apparition des fissures, sur la computation des pénalités de retard et l'imputation des retards. Au cours des opérations d'expertise judiciaire, la déformation de certains arbalétriers a été constatée. L'expertise a alors été étendue aux déformations des arbalétriers. Les travaux nécessaires ont été effectués aux frais de la commune de Bourges au cours des opérations d'expertise. La réception sans réserve du lot n°2 est intervenue en décembre 2013. L'expert a remis son rapport le 18 juillet 2014. Les marchés de maîtrise d'oeuvre, de la société CILC et de la société Apave Parisienne n'ayant pas été soldés, la commune de Bourges a demandé au tribunal administratif d'Orléans, sur le terrain de la responsabilité contractuelle, la condamnation des constructeurs en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des fissures des flasques et de la déformation des arbalétriers. La commune de Bourges relève appel de l'article 2 du jugement du 24 mai 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a limité la condamnation solidaire de la société CILC, des sociétés Agaura et Abac Ingénierie à lui verser la somme de 110 119,86 euros TTC en réparation des préjudices consécutifs à la déformation des arbalétriers et demande que cette somme soit portée à 166 326,17 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2015 et de la capitalisation annuelle de ces intérêts.
Sur le montant de l'indemnisation des préjudices consécutifs à la déformation des arbalétriers :
2. Si la réception des travaux interdit au maître d'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à 1' ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure. Ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers·nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif. Seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard.
3. Il résulte de l'instruction que les dommages consistant en la déformation des arbalétriers du gymnase des Merlattes dont la commune de Bourges demande réparation, sur un terrain contractuel, aux sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie pour un montant total de 166 326,17 euros, ne sont pas relatifs à l'état de l'ouvrage achevé mais à divers préjudices financiers subis par elle à l'occasion des travaux de construction du gymnase. Ainsi, la réception de l'ouvrage n'a pas, en ce qui concerne ces préjudices, mis fin aux obligations des constructeurs envers la commune de Bourges.
4. Il est constant que la déformation des arbalétriers est due au mode d'assemblage des flasques, lesquelles étaient vissées et non collées, ne permettant pas aux poutres de reprendre les efforts liés au déversement. Ce désordre est imputable à M.L..., ingénieur conseil en charpente et sous traitant de l'entreprise CILC pour les études de structure, dont les documents d'exécution ne présentent pas explicitement la prise en compte du déversement et indiquent que le collage était non structurel alors que seul un collage structurel permettait de supporter les efforts liés de cisaillement. Toutefois, la société CILC, entrepreneur principal, est responsable vis-à-vis du maitre d'ouvrage des fautes commises par son sous-traitant dans l'exécution des prestations qui lui ont été confiées. Le désordre est également imputable à la société Abac Ingenierie, chargée des études techniques, qui n'a pas émis de réserve ou demandé de note de calculs relatifs à la prise en compte du déversement et à la société Agaura, chargée de la maitrise d'oeuvre. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, il y a lieu de condamner solidairement la société CILC, la société Agaura et la société Abac Ingenierie à réparer les conséquences dommageables de ce désordre. La commune de Bourges, qui a déjà obtenu une indemnisation de 110 119,86 euros TTC au titre des travaux de reprise nécessaires, fait valoir qu'elle est en droit d'obtenir une indemnisation supplémentaire à hauteur de 56 206,31 euros.
5. En premier lieu, la commune de Bourges demande le remboursement du surcoût lié aux actes de vandalisme ayant dégradé le gymnase pendant 1'arrêt du chantier, constatés par huissier le 21 février 2013, pour un montant de 10 439,59 euros TTC ainsi que celui des frais de constat d'huissier, de chauffage du gymnase avant réception, d'électricité et de nettoyage engagés à la suite du sinistre pour un montant de 15 725,80 euros TTC. Toutefois, la commune de Bourges n'établit pas que l'allongement de la durée du chantier du fait des désordres affectant l'ouvrage, qui a empêché une occupation normale par les usagers et le personnel municipal, serait la cause directe et certaine des actes de vandalisme à l'origine de ces dégradations commises dans un quartier sensible. Dans ces conditions, la demande de la commune tendant à être indemnisée de ce chef de préjudice doit être écartée.
6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction qu'un suivi particulier des déformations des arbalétriers, distinct de celui organisé dans le cadre du suivi normal de l'état de la charpente, a été rendu nécessaire du fait de la réalisation des travaux de reprise. Dans ces conditions, la commune de Bourges est fondée à demander à être indemnisée des frais liés à la visite d'un géomètre quatre fois par an, évalués à la somme de 14 400 euros TTC et de ceux liés à l'analyse des relevés de flèches du géomètre sur deux années évalués à la somme de 5 760 euros TTC.
7. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que, par ordre de service du 26 juillet 2011, la commune de Bourges a décidé de suspendre le chantier jusqu'à ce que l'expert rende ses conclusions sur la charpente du gymnase des Merlattes. La société GBC, titulaire du lot n°1 " gros oeuvre ", a alors engagé des frais de gardiennage du chantier durant la période de suspension des travaux, jusqu'à leur reprise, le 4 mars 2013, décidée par ordre de service du 28 février 2013. Elle a par conséquent réclamé à la commune de Bourges le paiement des frais de gardiennage engagés en application de l'article 48, paragraphe 1 du cahier des clauses administratives générales, applicable au marché conclu entre la commune de Bourges et la société GBC pour un montant de 13 279,85 euros, qu'elle a ensuite accepté de ramener à la somme de 9 880,92 euros. La commune de Bourges justifie en appel qu'elle a ordonné, le 18 novembre 2014, de procéder au paiement de cette somme. Dans ces conditions, la commune de Bourges est fondée à demander le remboursement de l'indemnité versée à la société GBC à hauteur de 9 880,92 euros TTC.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Bourges est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement du 24 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a limité la condamnation des sociétés CILC, Abac Ingenierie et Aubac à la somme de 110 119,86 euros TTC en réparation des préjudices consécutifs à la déformation des arbalétriers. Il y a lieu de réformer cet article et de porter le montant de l'indemnisation à la somme totale de 140 160,78 euros TTC.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bourges, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Bourges présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge des sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie une somme globale de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 110 119,86 euros TTC que les sociétés CILC, Agaura et Abac Ingenierie ont été condamnées à verser à la commune de Bourges par l'article 2 du jugement du 24 mai 2017 du tribunal administratif d'Orléans est portée à la somme de 140 160,78 euros TTC.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mai 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Bourges est rejeté.
Article 4 : La société CILC, la société Agaura et la société Abac verseront à la commune de Bourges une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bourges, à Me D...M...mandataire judiciaire de la société Abac Ingenierie, à la société Agaura, à la société Actis, à la société CILC et à MeJ..., administrateur judiciaire de la société CILC.
Délibéré après l'audience du 26 février 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2019.
Le rapporteur,
M-P. Allio-J...La présidente,
N. Tiger-Winterhalter
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au préfet du Cher en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT02366