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18/02/2019 | FRANCE | N°17NT01964

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 février 2019, 17NT01964


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lutetia 1er a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des amendes qui lui ont été infligées au titre des exerci

ces clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lutetia 1er a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des amendes qui lui ont été infligées au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1405258 du 24 mai 2017, le tribunal administratif de Rennes a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des amendes qui lui ont été infligées au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts (article 1er) et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 29 juin 2017, 21 décembre 2017 et 6 novembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de l'EURL Lutétia 1er les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que les amendes qui lui ont été infligées au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts, à hauteur, respectivement, de 19 231 euros, 33 909 euros et 3 032 euros.

Il soutient que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues dès lors que les informations apportées par le contrat de bail obtenu dans le cadre d'un droit de communication exercé le 3 juillet 2013 auprès de l'association ARASS ont seulement permis de confirmer les rectifications qui étaient déjà envisagées et évaluées avant l'obtention de ce document et que la mention dans la proposition de rectification du 25 juillet 2013 de ce contrat de bail obtenu au-delà du délai de trois mois n'a pas eu pour effet de prolonger la vérification de comptabilité.

Par deux mémoires, enregistrés les 30 août 2017 et 25 octobre 2018, l'EURL Lutétia 1er, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que l'obtention du contrat de bail a été déterminante pour l'établissement des impositions supplémentaires, de sorte que les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ont été méconnues ; que la proposition de rectification confirme que les opérations se sont étendues sur un période de plus de trois mois ; qu'il ne peut être soutenu que la réunion du 17 juillet 2013 ne saurait être rattachée à la vérification de comptabilité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

- les observations de MeB..., représentant l'EURL Lutétia 1er.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Lutétia 1er, qui exerçait une activité intermédiaire auprès d'un groupe immobilier, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2012 et sur la période complémentaire du 1er juillet 2012 au 31 janvier 2013 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 25 juillet 2013, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des amendes au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts lui ont été notifiées. Après procédure contradictoire, ces impositions ont été mises en recouvrement les 16 et 31 janvier 2014. Après le rejet implicite de sa réclamation préalable du 13 février 2014, l'entreprise a sollicité auprès du tribunal administratif de Rennes la décharge de ces impositions. Ce tribunal a fait droit à sa demande, par jugement du 24 mai 2017, au motif que les impositions en litige ont été établies à la suite d'une procédure de contrôle irrégulière dans la mesure où le vérificateur a procédé à un examen critique de la comptabilité plus de trois mois après le début des opérations de vérification de comptabilité en méconnaissance de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel de l'article 1er de ce jugement.

2. Les impositions supplémentaires mises à la charge de l'EURL Lutétia 1er résultent, pour partie, de la remise en cause des déductions de taxe sur la valeur ajoutée et de charges auxquelles l'entreprise a procédé s'agissant de dépenses engagées pour un bien situé 8 rue des Fontaines à Dinan, dont M.A..., gérant de l'EURL Lutétia 1er, a acquis la propriété le 22 juillet 2011. L'administration fiscale a remis en cause ces déductions au motif que les dépenses n'ont pas été engagées pour les besoins de la société mais dans l'intérêt personnel de son gérant.

3. L'article L. 52 du livre des procédures fiscales prévoit que : " I.-Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) ".

4. Il est constant que, s'agissant de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'Eurl Lutétia 1er, le délai de trois mois prévu à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales a débuté le 25 mars 2013, date de la première intervention sur place du vérificateur. En application de cet article, la vérification sur place des livres et documents comptables devait donc s'achever au plus tard le 24 juin 2013.

5. Il résulte de l'instruction que, si la dernière intervention sur place du vérificateur s'est tenue le 12 juin 2013 alors que la réunion de synthèse a été organisée le 17 juillet 2013, le vérificateur a exercé le 3 juillet 2013 un droit de communication auprès de l'association ARASS, locataire du bien situé à Dinan, et a obtenu dans ce cadre une copie du bail de location qui mentionne le 15 février 2012 comme date de début de contrat. Le vérificateur a fait figurer, dans la proposition de rectification du 25 juillet 2013, cet élément au nombre de ceux motivant la remise en cause évoquée au point 2 du présent arrêt. Toutefois il résulte des termes mêmes de cette proposition de rectification qu'alors que M. A...déclarait, lors du contrôle, que les déductions pratiquées étaient fondées, dès lors que l'entreprise avait bénéficié de janvier à décembre 2012 d'une mise à disposition gratuite du bien situé 8 rue des Fontaines à Dinan, le vérificateur avait également relevé qu'aucun contrat de cette mise à disposition n'était présenté, que la déclaration CBD déposée le 12 avril 2013 par M. A...mentionnait un achèvement des travaux en février 2012 et l'association ARASS comme occupant, qu'aucune facture de consommation d'électricité pour cette occupation n'avait été enregistrée comme charge de l'entreprise et, s'agissant de la période se terminant en 2011, que l'entreprise n'occupait pas le bien à la date du 22 juin 2011 mentionnée sur la facture FV2P. Ces éléments étaient à eux-seuls suffisants pour remettre en cause le bien-fondé des déductions pratiquées, de sorte que l'administration fiscale peut se prévaloir de ce que l'exercice du droit de communication le 3 juillet 2013 n'a revêtu qu'un caractère d'investigation purement confirmative de rectifications qui avaient déjà été envisagées et évaluées antérieurement. Il ne résulte, par ailleurs, pas de l'instruction qu'il ait été procédé à un examen des livres et documents comptables ni après l'exercice de ce droit de communication ni lors de la réunion de synthèse du 17 juillet 2013. Par conséquent, dès lors que la vérification sur place des livres et documents comptables s'est achevée le 12 juin 2013, elle n'a pas excédé la durée maximale de trois mois prévue par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales.

6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur la méconnaissance de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales pour prononcer la décharge des impositions litigieuses. Le ministre est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a fait droit, à l'article 1er de son jugement, à la demande de décharge sollicitée par l'EURL Lutétia 1er. Il y a donc lieu d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué et de remettre à la charge de l'entreprise requérante les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des amendes qui lui ont été infligées au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts.

7. L'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'EURL Lutétia 1er au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n°1405258 du 24 mai 2017 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles l'EURL Lutétia 1er a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que les amendes qui lui ont été infligées au titre des exercices clos en 2011 et 2012 sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts sont remises, en droits et pénalités, à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de l'EURL Lutétia 1er sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Lutetia 1er.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 février 2019.

Le rapporteur,

F. MalingueLe président,

F. Bataille

Le greffier,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°17NT01964

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01964
Date de la décision : 18/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-18;17nt01964 ?
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