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15/02/2019 | FRANCE | N°18NT01952

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 février 2019, 18NT01952


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H...G...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 31 décembre 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a maintenu l'ajournement à trois ans de sa demande de naturalisation à compter du 2 octobre 2014.

Par un jugement n° 1502946 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 31 décembre 2014 et a enjoint au ministre de réexaminer la demande de naturalisation présentée par M. G...dans un délai de deux mo

is à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H...G...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 31 décembre 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a maintenu l'ajournement à trois ans de sa demande de naturalisation à compter du 2 octobre 2014.

Par un jugement n° 1502946 du 3 avril 2018, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 31 décembre 2014 et a enjoint au ministre de réexaminer la demande de naturalisation présentée par M. G...dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 mai 2018 et le 13 décembre 2018, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. G...devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

­ la décision litigieuse n'est pas entachée d'incompétence dès lors que son auteur, M. E..., disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

­ la décision contestée n'est pas entachée d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de ce que les faits reprochés à M. G...n'étaient pas dépourvus de gravité et étaient encore récents à la date de la décision contestée ;

­ elle est suffisamment motivée ;

­ il a bien été procédé à un examen particulier de la situation de M.G... ;

­ M. G...ne saurait soutenir que la décision a été prise en méconnaissance des articles 21-13 et 21-24 du code civil dès lors qu'elle est fondée sur les dispositions des articles 45 et 48 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993.

­ pour le surplus, il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par un mémoire enregistré le 29 novembre 2018, M. H...G..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête du ministre n'est fondé et réitère ses moyens développés en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ le code civil ;

­ le décret n° 93-1362 du 30 décembre modifié ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M.A...'hirondel,

­ et les observations de MmeF..., représentant le ministère de l'intérieur.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 3 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M.G..., sa décision du 31 décembre 2014 ajournant à trois ans la demande de naturalisation de ce dernier.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Conformément aux dispositions de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, le directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté dispose de la délégation pour signer au nom du ministre chargé des naturalisations, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous son autorité. Par décret du 3 octobre 2013, publié au Journal officiel de la République française du 4 octobre suivant, Mme D...a été nommée directrice de l'accueil, de l'accompagnement des étrangers et de la nationalité. Par décision du 24 octobre 2013, régulièrement publiée au Journal officiel de la République française du 27 octobre suivant, Mme D...a accordé à M. C...E..., agent contractuel, dont il ressort des pièces du dossier qu'il est le signataire de la décision contestée, une délégation de signature à cet effet. En conséquence, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision contestée a été prise par une autorité incompétente et par suite ont, à tort, prononcé, pour ce motif, par le jugement attaqué, l'annulation de sa décision du 31 décembre 2014.

3. Il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. G...tant en première instance qu'en appel.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 27 du code civil : " Toute décision déclarant irrecevable, ajournant ou rejetant une demande d'acquisition, de naturalisation ou de réintégration par décret (...) doit être motivée ".

5. Pour ajourner la demande de naturalisation de M.G..., le ministre s'est fondé, en droit, sur les dispositions des articles 45 et 48 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993. Il s'est, par ailleurs, fondé, en fait, sur les circonstances que le postulant a été l'auteur, le 3 mai 2008, de conduite d'un véhicule à moteur malgré injonction de restituer le permis de conduire résultant du retrait de la totalité des points, ce qui a donné lieu à sa condamnation à une amende de 1 200 euros dont 600 euros avec sursis par le tribunal correctionnel de Montpellier le 3 septembre 2008 et, d'autre part, de conduite, le 25 avril 2009, sous l'empire d'un état alcoolique avec concentration d'alcool par litre d'au moins 0,80gr (sang), ce qui a donné lieu à une condamnation à une amende de 200 euros et une suspension de permis de conduire pendant deux mois par le même tribunal le 30 juillet 2009. Par suite, la décision contestée mentionne de manière suffisamment précise les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Dans ces conditions, et alors que le ministre n'a pas à exposer de manière exhaustive tous les éléments de la situation de l'intéressé et qu'il a pu reprendre à son compte les mêmes motifs que ceux retenus par le préfet de l'Hérault dans la décision initiale du 2 octobre 2014, la décision contestée est suffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article 27 du code civil. Enfin, M. G...ne saurait utilement faire valoir que le motif retenu par le ministre ne pouvait donner lieu à une décision d'ajournement dès lors que le caractère suffisant de la motivation ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". L'article 48 du décret du 30 décembre 1993 prévoit : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant. Le ministre dispose, à cet égard, d'un large pouvoir d'appréciation.

7. Compte tenu du large pouvoir d'appréciation dont dispose le ministre, la motivation de la décision contestée rappelée au point 5 de l'arrêt révèle qu'elle a été prise à l'issue d'un examen approfondi de la situation personnelle de l'intéressé alors même que ce dernier n'aurait pas fait l'objet de nouvelles condamnations et justifierait de son assimilation dans la communauté française.

8. En troisième et dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles 21-20, 21-23 et 21-24 du code civil sont inopérants à l'appui des conclusions dirigées contre la décision du 31 décembre 2014, qui n'a pas déclaré irrecevable la demande de naturalisation présentée par M.G....

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé sa décision du 31 décembre 2014 ajournant à trois ans la demande de naturalisation présentée par M.G....

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt rejette les conclusions de M. G...dirigées contre la décision du ministre de l'intérieur du 31 décembre 2014 ajournant sa demande de naturalisation. Il n'implique, dès lors, aucune mesure d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. G...demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2018 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. G...devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. H...G....

Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2019.

Le rapporteur,

M. I...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01952
Date de la décision : 15/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : ROSE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-15;18nt01952 ?
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