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12/02/2019 | FRANCE | N°18NT00556

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 12 février 2019, 18NT00556


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 février 2016 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 15 mars 2016.

Par un jugement n° 1601168 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'article 2 de l'arrêté du 23 février 2016 fixant la date d'effet de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions au 15 mars 2

016 et a rejeté le surplus des conclusions de M.D....

Procédure devant la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 février 2016 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 15 mars 2016.

Par un jugement n° 1601168 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'article 2 de l'arrêté du 23 février 2016 fixant la date d'effet de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions au 15 mars 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de M.D....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 février 2018, M.D..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 décembre 2017 du tribunal administratif de Rennes, à l'exception de son article 1er ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2016 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 15 mars 2016 ;

3°) d'enjoindre au département du Finistère de le réintégrer et de le rétablir dans ses droits sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département du Finistère une somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement contesté est insuffisamment motivé ;

- la sanction révèle " un abandon de compétence et une méconnaissance de son champ de compétence " de la présidente du conseil départemental du Finistère ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, en ce qu'il se borne à renvoyer à une enquête administrative ;

- l'arrêté en cause est entaché d'une erreur de fait, en ce que la sanction se fonde sur des faits inexistants ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit, d'un détournement de pouvoir et présente un caractère discriminatoire, il s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2018, le département du Finistère conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. D...à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

L'instruction a été close au 21 aout 2018, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire a été présenté pour M.D..., enregistré le 23 novembre 2018, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- les observations de Me G...représentant le département du Finistère.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., adjoint administratif territorial de seconde classe, employé par le département du Finistère depuis 2007, exerce les fonctions " d'agent volant " et a été, à ce titre, missionné au centre départemental d'action sociale (CDAS) de Concarneau à compter du 1er juillet 2015 pour exercer des fonctions " d'appui aux différents postes ". Suite à un avis défavorable du conseil de discipline du 19 janvier 2016, la présidente du conseil départemental du Finistère a infligé au requérant la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 15 mars 2016 par un arrêté du 23 février 2016. Par sa présente requête, M. D...relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes par lequel ce dernier a annulé l'article 2 de l'arrêté du 23 février 2016 fixant la date d'effet de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions au 15 mars 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de l'intéressé.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) ".

3. D'autre part, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

4. En premier lieu, l'arrêté litigieux est signé par la présidente du conseil départemental du Finistère. Les allégations du requérant selon lesquelles la décision de sanction aurait été établie par la directrice des ressources humaines du département et caractériserait un " abandon de compétence " et une " méconnaissance de son champ de compétence " par la présidente du conseil départemental ne sont corroborées par aucun élément.

5. En second lieu, l'arrêté attaqué vise les dispositions législatives et réglementaires applicables et indique avec suffisamment de précision les faits reprochés à l'intéressé. Il est, dès lors, suffisamment motivé.

6. En troisième lieu, l'arrêté du 23 février 2016 infligeant à M. D...la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois est fondée sur le motif selon lequel le requérant a " eu des attitudes et des gestes à caractère sexuel à l'égard de collègues féminines sur le lieu de travail ". Il précise : " qu'il résulte de l'enquête administrative menée par les services du conseil départemental et des témoignages produits à l'appui du dossier disciplinaire, d'une part, que Madame B...F...s'est plainte de l'attitude de Monsieur C...D...qui lui a touché les fesses en passant derrière elle le 20 juillet 2015 alors qu'elle affranchissait le courrier, et d'autre part, que Mesdames Gaëlle H...et Nathalie I...ont témoigné de leur malaise face aux regards ou gestes de Monsieur C...D...à leur égard consistant notamment à fixer leur décolleté ".

7. Il ressort des pièces du dossier que, pour prononcer la sanction d'exclusion temporaire de fonctions à l'encontre de l'intéressé, la présidente du conseil départemental s'est fondée sur les résultats d'une enquête administrative diligentée en août 2015 à la suite de la réception du témoignage écrit adressé le 27 juillet 2015 à la direction des ressources humaines par Mme F..., agent employé par le département en contrat d'emploi avenir, indiquant que le requérant avait posé une main sur ses fesses alors qu'elle affranchissait le courrier, avant de s'éloigner. MmeF..., reçue par sa hiérarchie le 10 août 2015, a confirmé ses accusations. Trois autres agents du service, Mmes H..., E..., et I...ont été entendues au cours de l'enquête administrative. Mme H...a évoqué " des regards insistants " du requérant et " une attitude ambiguë ". MmeE..., qui indique que Mme F...l'a immédiatement informée du geste commis par M.D..., a par ailleurs évoqué la propension de M. D...à se rapprocher excessivement et à jeter des regards appuyés sur son décolleté. Enfin, Mme I...affirme qu'elle a dû esquiver un contact intentionnel de la main de M. D.... De plus, il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'entretien annuel d'évaluation du requérant pour l'année 2014, la question de son comportement envers ses collègues féminines avait déjà donné lieu à un appel à " plus de vigilance ", suite à un signalement d'incidents de la part de certaines de ses collègues de sexe féminin. Si le requérant nie l'ensemble des faits qui lui sont reprochés, il se borne à produire le témoignage d'une ancienne collègue ne faisant pas partie des effectifs du CDAS de Concarneau, évoque la subjectivité des témoignages recueillis, la fragilité psychologique d'une de ses collègues et affirme que les accusations formulées à son encontre s'inscrivent dans un contexte de harcèlement moral. Ces allégations insuffisamment précises ne peuvent cependant suffire pour établir l'absence de véracité des faits relatés plus haut. En conséquence, M. D...ne contredit pas sérieusement l'ensemble des témoignages à charge recueillis à son encontre et les constatations de l'enquête administrative dont il a fait l'objet. Par suite, la matérialité des faits sur lesquels s'est fondée la présidente du conseil départemental pour sanctionner M. D...doit être regardée comme établie.

8. En quatrième lieu, les faits reprochés au requérant, de par leur gravité, justifiaient l'engagement d'une procédure disciplinaire. Si M. D...évoque la situation de souffrance au travail dans laquelle il est placé et soutient que la procédure disciplinaire dont il a fait l'objet traduirait l'acharnement du département à son encontre et serait constitutive d'une discrimination et d'un harcèlement moral, il n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations.

9. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la sanction disciplinaire prononcée à son encontre.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ne peuvent être accueillies.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du département du Finistère, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. D... au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme réclamée par le département du Finistère au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département du Finistère sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au département du Finistère.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 février 2019.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT00556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00556
Date de la décision : 12/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : GARET

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-12;18nt00556 ?
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