Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) Saint Léonard et la société à responsabilité limitée (SARL) Hathor ont demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, la décharge " des rectifications pour 503 268 euros de quote-part de résultat de la SCI ", d'autre part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SARL Hathor a été assujettie au titre de l'exercice clos au 30 novembre 2012 à hauteur d'une somme de 168 427 euros ainsi que le bénéfice du sursis de paiement.
Par un jugement no 1409679 du 10 février 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2017 et le 6 octobre 2017, la SCI Saint Léonard et la SARL Hathor, représenté par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer ces décharges ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'usufruitier n'est pas le redevable de l'impôt dû sur le transfert des constructions et améliorations au propriétaire ; seul le nu-propriétaire aurait dû être imposé ;
- le retour des constructions et améliorations au propriétaire n'a pas pu intervenir à la date du dépôt de bilan mais à la date de la résiliation du bail par le liquidateur en janvier 2012 après la vente aux enchères qui s'est déroulée dans les locaux de la société ; les rectifications doivent concerner ainsi l'année 2012 et non l'année 2011 ;
- la société est imposée sur des agencements qui n'existaient plus le jour de la vente aux enchères et la valeur nette comptable de ces agencements chez le locataire était inférieure ; seuls sont imposables les travaux conférant une plus-value à l'immeuble et dont la remise gratuite ne peut s'analyser que comme un avantage pour le bailleur ; le vérificateur aurait dû rechercher quelle était l'augmentation de valeur de l'immeuble sur la base de l'évaluation des agencements repris ou l'augmentation de la valeur vénale ; il n'y a pas d'enrichissement du propriétaire puisque le loyer normal après une période d'un an est en baisse de 23 % ;
- à titre accessoire, il convient de retenir le prix de vente aux enchères des agencements, soit la somme de 140 210, 40 euros toutes taxes comprises.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par la SCI Saint Léonard et la SARL Hathor ne sont pas fondés.
La clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2018 en vertu d'une ordonnance du 13 septembre 2018 du président de la 1ère chambre.
En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées le 20 décembre 2018 que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la SCI Saint Léonard tendant à " contester le bien-fondé des rectifications pour 503 268 euros de quote-part de résultat pour la SCI " dès lors qu'aucune somme n'a été mise en recouvrement au nom de la SCI Saint Léonard ainsi que des conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés mise à la charge de la SARL Hathor au titre de l'exercice clos au 30 novembre 2012, dès lors que la SARL Hathor est une entité juridique distincte de la SCI Saint Léonard.
Par un mémoire, enregistré le 28 décembre 2018, la SCI Saint Léonard et la SARL Harthor ont présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public et à la demande de production d'une copie lisible d'une pièce complémentaire déjà produite formulée le 20 décembre 2018 en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative en soutenant, d'une part, que la SCI a reçu un avis de mise en recouvrement pour la taxe sur la valeur ajoutée mais qu'il est exact qu'elle ne conteste pas l'imposition et n'agit que comme entité rectifiée, d'autre part, que la SARL Hathor agit en qualité d'associée de la SCI Saint Léonard et de redevable de l'impôt.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chollet,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
- et les observations de Me Jullien, avocat substituant MeC..., représentant la SCI Saint Léonard et la SARL Hathor.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile immobilière (SCI) Saint Léonard et la société à responsabilité limitée (SARL) Hathor, qui détient 99,98 % des parts de la SCI en usufruit depuis le 28 novembre 2011, relèvent appel du jugement du 10 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant d'une part, à la décharge " des rectifications pour 503 268 euros de quote-part de résultat de la SCI ", d'autre part, à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SARL Hathor a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 à hauteur d'une somme de 168 427 euros.
Sur les conclusions de la SCI Saint Léonard :
2. La SCI Saint Léonard demande, d'une part, la décharge " des rectifications pour 503 268 euros de quote-part de résultat de la SCI ". Toutefois, aucune somme n'a été mise en recouvrement au nom de la SCI Saint Léonard au titre de l'impôt sur les sociétés. Elle demande, d'autre part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL Hathor a été assujettie au titre de l'exercice clos au 30 novembre 2012 à hauteur d'une somme de 168 427 euros. Toutefois, la SCI Saint Léonard et la SARL Hathor sont des entités juridiques distinctes. Dans ces conditions, l'ensemble des conclusions de la SCI Saint Léonard est irrecevable.
Sur les conclusions de la SARL Harthor :
3. D'une part, aux termes de l'article 29 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions des articles 33 ter et 33 quater, le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires et diminué du montant des dépenses supportées par le propriétaire pour le compte des locataires. (...) / (...) ". Lorsqu'un contrat de bail prévoit, en faveur du bailleur, la remise gratuite en fin de bail des aménagements ou constructions réalisés par le preneur, la valeur de cet avantage constitue, pour le bailleur, un complément de loyer imposable au titre de l'année au cours de laquelle le propriétaire en a eu la disposition c'est-à-dire au titre de l'année au cours de laquelle le bail arrive à expiration ou fait l'objet avant l'arrivée du terme d'une résiliation. D'autre part, aux termes de l'article L. 641-12 du code de commerce : " Sans préjudice de l'application du I et du II de l'article L. 641-11-1, la résiliation du bail des immeubles utilisés pour l'activité de l'entreprise intervient dans les conditions suivantes : / 1° Au jour où le bailleur est informé de la décision du liquidateur de ne pas continuer le bail ; / (...) ".
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SCI Saint Léonard a donné en location pour une durée de neuf ans à compter du 1er juin 2009 à la SARL History Restauration, moyennant un loyer annuel de 3 000 euros hors taxe pendant les trois premières années puis 6 500 euros hors taxe au-delà, un immeuble à usage commercial situé au Mans. Il a alors été stipulé au 2 de l'article 8 du contrat de bail commercial que " tous embellissements, améliorations et installations faits par la partie preneuse pendant le cours du bail resteront la propriété de la partie bailleresse à la fin du bail, sans aucune indemnité pour la partie preneuse ". Il est constant que le locataire a fait exécuter sur l'immeuble loué, pour les besoins de son commerce, au cours de la période de juin 2009 à avril 2011, des travaux d'un montant total de 503 369 euros hors taxe. Compte tenu de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêt, c'est à bon droit que l'administration a regardé ces dépenses comme constituant un supplément de loyer résultant de l'attribution gratuite en fin de bail des aménagements réalisés imposables dans la catégorie des revenus fonciers en ce qui concerne la SCI Saint Léonard, société bailleresse. Elle a, par suite, à titre de complément de loyer, imposé légalement à l'impôt sur les sociétés la SARL Hathor à proportion de ses droits dans la SCI Saint Léonard ainsi qu'à l'impôt sur le revenu M. A...également à proportion de ses droits dans cette société. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la SARL Hathor, en qualité d'usufruitière des parts de la SCI Saint Léonard, n'aurait pas dû être imposée mais uniquement le nu-propriétaire, doit être écarté.
5. En deuxième lieu, l'administration estime que le bail commercial liant la SARL History Restauration à la SCI Saint Léonard a été résilié au plus tard en décembre 2011 et a en conséquence réintégré le montant des suppléments de loyers, correspond à la remise gratuite des immobilisations réalisées par la locataire, au titre de l'année 2011. La SARL Hathor soutient que le bail commercial de la SARL History Restauration n'a pas été rompu du seul fait de sa liquidation judiciaire en juillet 2011 ni à la date d'envoi d'un courrier du 29 décembre 2011 du liquidateur en application de l'article L. 641-12 du code de commerce mais à la date de sa réception en janvier 2012. Elle fait valoir que ce courrier a été expédié le 3 janvier 2012 et a ainsi nécessairemment été reçu en janvier 2012 par le gérant de la SCI Saint Léonard. Ainsi, elle soutient que la date réelle de la remise gratuite des immobilisations réalisées par la SARL History Restauration à la SCI Saint Léonard se situe à la date de résiliation du bail de location en 2012 en application des dispositions citées au point 3 du présent arrêt et qu'il y a erreur sur l'année d'imposition des compléments de loyers de la SCI. Toutefois, si la SARL Hathor produit le courrier du 29 décembre 2011 ainsi que, pour la première fois en appel, un accusé de réception d'un courrier adressé par le liquidateur au gérant de la SCI, M.B..., à son adresse personnelle, le cachet figurant sur ce document, daté du 3 janvier 2012, correspond à la date de retour de l'accusé de réception par la Poste à l'expéditeur, après distribution du courrier au destinataire. Ce document ne mentionnant pas la date de présentation ou de distribution du courrier au gérant, la SARL Hathor n'apporte pas la preuve de ses allégations, qu'elle est seule en mesure d'apporter, en l'absence de tout autre élément. Le moyen doit par suite être écarté.
6. En troisième lieu, l'administration a déterminé le montant des aménagements et constructions réalisés par la SARL History Restauration en se fondant sur la " liste des acquisitions du 13 mai 2009 au 31 août 2010 en date d'arrêté du 31 août 2010 " qu'elle a obtenue dans le cadre de la vérification de comptabilité de cette SARL, sur les constatations effectuées par le vérificateur lors de ces opérations de contrôle ainsi que sur certaines factures fournies à l'administration par cette SARL dans le cadre de demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée. La SARL Hathor soutient que l'administration n'a pas tenu compte de la vente aux enchères d'immobilisations de la SARL History Restauration par adjudication le 13 février 2012. Toutefois, les bordereaux d'adjudication produits ne mentionnent pas l'origine des immobilisations vendues mais uniquement le nom de l'acheteur, à savoir la SARL Hathor, et, en tout état de cause, ils ne peuvent justifier que des agencements correspondant à des travaux réalisés par le locataire ont été vendus avant la fin du bail en décembre 2011. En outre, la mise au rebut de certains immobilisations en 2012, à la supposer établie, est sans incidence sur leur transfert à la fin du bail en 2011. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que les immobilisations correspondant notamment à des travaux d'électricité, de plomberie, de peinture, de menuiserie et d'aménagements extérieurs aient fait l'objet d'une dépréciation de leur valeur entre leur réalisation pendant la période du 10 juin 2009 au 7 avril 2011 et la fin du bail en décembre 2011. Dans ces conditions, l'administration a légalement évalué le montant des aménagements et constructions réalisés par la SARL History Restauration en se fondant sur leurs coûts de réalisation pour un montant de 503 369 euros hors taxe.
7. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que le transfert de propriété à titre gratuit de ces immobilisations au bénéfice de la SCI Saint Léonard s'est produit à l'expiration du bail commercial en décembre 2011. Par suite, sont sans incidence les circonstances qu'un nouveau bail de location a été conclu pour une période de vingt-trois mois pour la période du 1er novembre 2012 au 30 septembre 2014 pour un loyer inférieur à celui versé par la SARL History Restauration ou que la valeur de l'immeuble a été évaluée à 480 000 euros par un notaire le 10 avril 2013 et entre 400 000 euros et 430 000 euros par un agent immobilier le 17 février 2014.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Hathor n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SCI Saint Léonard et de la SARL Hathor est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Saint Léonard, à la société à responsabilité limitée Hathor et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Chollet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
Le rapporteur,
L. CholletLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No17NT01078