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19/11/2018 | FRANCE | N°17NT00412

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 novembre 2018, 17NT00412


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 11 mai 2015 par laquelle le président de la communauté de communes de la Suisse normande, le président du syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, le maire de Saint-Rémy-sur-Orne et le maire de Saint-Omer ont rejeté sa demande tendant au retrait des décisions emportant retrait des aménagements de ses postes de travail.

Par un jugement n° 1501433 du 30 novembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté

sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 jan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 11 mai 2015 par laquelle le président de la communauté de communes de la Suisse normande, le président du syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, le maire de Saint-Rémy-sur-Orne et le maire de Saint-Omer ont rejeté sa demande tendant au retrait des décisions emportant retrait des aménagements de ses postes de travail.

Par un jugement n° 1501433 du 30 novembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2017, MmeA..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 30 novembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 11 mai 2015 ;

3°) d'enjoindre à la communauté de communes Cingal-Suisse normande, au syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, à la commune de Saint-Rémy-sur-Orne et à la commune de Saint-Omer de procéder à son affectation sur un poste aménagé, et subsidiairement de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge des collectivités défendreresses le versement d'une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'un défaut d'examen des circonstances propres à sa situation, notamment en ce qui concerne les aménagements mis en place, en considération de son handicap, pour l'exercice de ses fonctions d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles, d'aide cuisine et de cantinière ;

- les fonctions d'aide en cuisine et cantine et d'ATSEM jusqu'alors exercées par Madame A...et pour lesquelles des aménagements avaient été mis en place n'ont pas été prises en considération, malgré les recommandations et préconisations renouvelées du médecin du travail ;

- l'administration n'établit pas la réalité de l'intérêt du service qui s'attacherait au retrait des aménagements mis en place ;

- il résulte des changements successifs de ses plannings un retrait des aménagements de ses postes, l'augmentation des rotations de ménages et de la charge physique de ces travaux ainsi qu'une augmentation d'amplitude horaire, en méconnaissance des articles 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 et 35 et 60 quinquies de la loi du 26 janvier 1984.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2017, la communauté de communes Cingal-Suisse normande, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 17 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 17 novembre 2017.

Un mémoire présenté pour MmeA..., enregistré le 16 novembre 2017, n'a pas été communiqué à défaut d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la communauté de communes Cingal- Suisse normande.

Considérant ce qui suit :

Les faits

1. Mme D...A..., adjoint technique territorial de 2ème classe, reconnue travailleur handicapé en 2007, exerce diverses fonctions, notamment d'aide à la préparation et à la surveillance des repas et d'entretien, pour le compte à la fois de la communauté de communes Suisse normande devenue communauté de communes Cingal-Suisse normande, du syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, de la commune de Saint-Rémy-sur-Orne et de la commune de Saint-Omer. Elle a exercé également, au titre des années scolaires 2006-2007, 2007-2008 et, après avoir obtenu un CAP Petite Enfance, au titre des années scolaires 2011-2012 et 2012-2013, des fonctions d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ci-après ATSEM) au sein de l'école de Saint-Rémy-sur-Orne. Cette activité d'ATSEM a été réduite puis supprimée au titre respectivement des années scolaires 2013/2014 et 2014/2015, Mme A...se voyant uniquement confier, à compter du 1er novembre 2014, des taches d'aide à la préparation des repas et de service de cantine à l'école de Saint-Rémy sur Orne, ainsi que l'entretien de locaux relevant des collectivités territoriales qui l'emploient.

2. Par un courrier du 3 avril 2015, Mme A...a demandé le retrait des décisions par lesquelles ces autorités ont, selon elle, procédé au retrait des aménagements relatifs à ses postes d'ATSEM, d'aide cuisine et de service à la cantine assurés à l'école maternelle de Saint-Rémy-sur-Orne. Par une décision conjointe du 11 mai 2015, le président de la communauté de communes de la Suisse normande, le président du syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, le maire de la commune de Saint-Rémy-sur-Orne et le maire de la commune de Saint-Omer ont rejeté sa demande. Mme A...relève appel du jugement du 30 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne le droit applicable à Mme A...en sa qualité de travailleur handicapé :

5. Aux termes de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 323-3 [devenu l'article L. 5212-13] du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. ". Aux termes de l'article 60 quinquies de la loi du 26 janvier 1984 : " Des aménagements d'horaires propres à faciliter son exercice professionnel ou son maintien dans l'emploi sont accordés à sa demande au fonctionnaire handicapé relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 323-3 du code du travail, dans toute la mesure compatible avec les nécessités du fonctionnement du service. (...) " ;

En ce qui concerne les conséquences de la diminution puis la suppression des fonctions d'ATSEM :

6. Aux termes de l'article 12 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " " Le grade est distinct de l'emploi./ Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent " ; et aux termes de l'article 4 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les fonctionnaires territoriaux appartiennent à des cadres d'emplois régis par des statuts particuliers, communs aux fonctionnaires des communes, des départements, des régions et de leurs établissements publics./ Ces statuts particuliers ont un caractère national. Un cadre d'emplois regroupe les fonctionnaires soumis au même statut particulier, titulaires d'un grade leur donnant vocation à occuper un ensemble d'emplois. Chaque titulaire d'un grade a vocation à occuper certains des emplois correspondant à ce grade "

7. Il résulte de ces dispositions que MmeA..., titulaire du grade d'adjoint technique territorial de 2ème classe, a vocation à exercer l'un des emplois prévus par le décret portant statut particulier du cadre d'emplois auquel elle appartient. En revanche elle ne peut se prévaloir d'aucun droit à conserver l'exercice d'un emploi qui lui est confié à un moment de sa carrière, l'autorité hiérarchique pouvant modifier l'organisation du travail de l'intéressée dans l'intérêt du service.

8. Or, d'une part la requérante ne conteste pas que l'évolution de son emploi du temps soit en lien avec une modification de l'organisation du service intervenue pour tenir compte de la réforme des rythmes scolaires, d'autre part Mme A...ne conteste pas que les fonctions d'aide-cuisinier, de service en cantine ainsi que d'entretien des locaux qui composent la totalité de son service depuis le 1er novembre 2014 sont bien de celles que son grade lui donne vocation à exercer, alors qu'au contraire Mme A...ne relève pas du cadre d'emplois des ATSEM.

9. Mme A...n'est dès lors pas fondée à contester cette suppression, ni, par voie de conséquence, la perte des aménagements qui en étaient inséparables.

En ce qui concerne le respect des conditions de travail dues à Mme A...en sa qualité de travailleur handicapé :

10. Ainsi qu'il a été dit le service de Mme A...comprenait uniquement, à compter du 1er novembre 2014, des travaux d'aide à la préparation et à la surveillance des repas au sein de l'école de Saint-Rémy-sur-Orne, ainsi que l'entretien de divers locaux appartenant aux collectivités publiques qui l'employaient.

11. Cette organisation du service de MmeA..., sur laquelle le comité technique paritaire compétent a émis un avis favorable le 14 octobre 2014, a été précédée d'une visite du poste de travail, organisée à la demande de l'intéressée le 9 avril 2014 et qui a donné lieu le 3 juillet 2014 à un certificat du médecin du travail, auquel il convient de se reporter à défaut pour Mme A...de revendiquer d'autres aménagements à ses fonctions que ceux préconisés par ce professionnel.

12. D'une part, les considérations de ce certificat relatives aux aménagements des fonctions d'ATSEM sont inopérantes, dès lors que cette activité ne figure plus à l'emploi du temps de MmeA....

13. D'autre part, à propos des heures de ménage, le médecin a prévu l'attribution d'un balai spécifique pour éviter l'essorage manuel, ainsi qu'un allongement des horaires, sauf à ce que Mme A...soit assistée d'une collègue ou d'une assistance de vie professionnelle. Mme A...ne conteste pas que le matériel en question lui a été attribué, cependant qu'il résulte de la lecture de son emploi du temps et des explications non contestées de la communauté de communes Cingal-Suisse normande que la requérante dispose d'un temps très supérieur à celui accordé à ses collègues afin d'effectuer l'entretien des sanitaires et des salles de classe. En conséquence les aménagements de travail dont bénéficie Mme A...correspondent bien aux préconisations du médecin du travail.

14. Par ailleurs il ne ressort pas des pièces du dossier que MmeA..., qui continuera de participer à la préparation des repas en compagnie d'une collègue, ne conservera pas le bénéfice des aménagements afférents à ce poste de travail.

15. Enfin il ne résulte pas de l'emploi du temps de MmeA..., qui ne comporte qu'une seule pause, les lundis, mardis, jeudis et vendredis, de 11h45 à 12h30, que l'organisation du travail ainsi définie imposerait à la requérante des allers-et retour superflus à son domicile.

16. Par suite Mme A...n'est pas fondée à soutenir que les collectivités publiques qui l'emploient auraient insuffisamment examiné les données propres à sa situation ou négligé de procéder aux aménagements et facilités auxquels elle avait droit en application des dispositions précitées des lois du 13 juillet 1983 et 26 janvier 1984.

17. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeA..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Cingal-Suisse normande, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande la requérante au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...le versement à la communauté de communes Cingal-Suisse normande d'une somme au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes Cingal-Suisse normande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et à la communauté de communes Cingal-Suisse normande, au syndicat à vocation scolaire des Rouges Terres, à la commune de Saint-Rémy-sur-Orne et à la commune de Saint-Omer.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00412


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00412
Date de la décision : 19/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : GARNIER-DURAND

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-19;17nt00412 ?
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