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12/11/2018 | FRANCE | N°17NT02675

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 12 novembre 2018, 17NT02675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Distribution Casino France a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2015 du maire de la commune de Saint-Doulchard délivrant à la société Saint-Doulchard Distribution un permis de construire une station-service sur un terrain situé au lieudit " Champ des quatre-vingt Boisselées ", ainsi que le rejet de son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1600286 du 29 juin 2017 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure d

evant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 août 2017 et 6 septembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Distribution Casino France a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2015 du maire de la commune de Saint-Doulchard délivrant à la société Saint-Doulchard Distribution un permis de construire une station-service sur un terrain situé au lieudit " Champ des quatre-vingt Boisselées ", ainsi que le rejet de son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1600286 du 29 juin 2017 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 août 2017 et 6 septembre 2018, la société Distribution Casino France, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 29 juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Doulchard et de la société Saint-Doulchard Distribution une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en appréciant son intérêt à agir exclusivement au regard des effets induits par le projet de station-service alors même que ce projet était indissociablement lié à la construction du centre commercial, les deux permis de construire ayant été délivrés concomitamment ;

- le tribunal a commis une erreur de qualification juridique des faits en considérant qu'elle n'établissait pas son intérêt pour agir en qualité de voisin du projet, alors même qu'elle avait produit des pièces précises et circonstanciées, notamment une étude d'impact des flux de circulation, le projet ayant un impact significatif sur les conditions de circulation de la route départementale 2076, principale voie de desserte du bien de la société Distribution Casino ;

- la procédure de mise à disposition du public du dossier de demande de permis de construire a eu lieu pendant les vacances scolaires, ce qui a nui à l'information du public et a été susceptible d'influer sur le sens de la décision attaquée, comme en témoigne l'absence d'observations émises par le public ;

- l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le projet portant atteinte à la sécurité de la circulation routière, les aménagements prévus étant insuffisants ;

- l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2017, la société Saint-Doulchard Distribution, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 3 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Saint-Doulchard Distribution fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.

Un mémoire, enregistré le 30 août 2018, a été présenté par la société Saint-Doulchard Distribution, représentée par Me F...mais n'a pas été communiqué dès lors qu'il ne faisait état d'aucun élément nouveau utile à la solution du litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2018, la commune de Saint-Doulchard, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Saint-Doulchard fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour la société Casino France, Me B...substituant Me F...pour la société Saint-Doulchard Distribution et de MeE..., représentant la commune de Saint-Doulchard.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux arrêtés en date du 9 septembre 2015, le maire de la commune de Saint-Doulchard a délivré à la société Saint-Doulchard Distribution deux permis de construire autorisant, pour le premier, la réalisation d'un centre commercial d'une surface de plancher totale de 24 195,23 m², composé d'un hypermarché E. Leclerc de 5 999 m², de huit cellules commerciales sous la même enseigne d'une surface de vente de 1 367,50 m² et de cinq boutiques d'une surface totale de vente de 275 m² et pour le second, la réalisation d'une station-service à la même enseigne. La société Distribution Casino France a alors contesté la légalité de ces arrêtés. La Cour, compétente en premier et dernier ressort, en vertu de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme, pour connaître du litige relatif à l'arrêté autorisant la construction de l'hypermarché et tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale, a rejeté la requête dirigée contre le premier arrêté par un arrêt du 25 janvier 2018. La société Distribution Casino France relève appel de l'ordonnance en date du 29 juin 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande à l'encontre du second arrêté autorisant la construction d'une station-service comme étant manifestement irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir.

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". En dehors du cas où les caractéristiques particulières de la construction envisagée sont de nature à affecter par elles-mêmes les conditions d'exploitation d'un établissement commercial, ce dernier ne justifie pas d'un intérêt à contester devant le juge de l'excès de pouvoir un permis de construire délivré à une entreprise concurrente, même située à proximité.

3. Il ressort des pièces du dossier que la société Distribution Casino France exploite un hypermarché à environ deux kilomètres du projet de station-service litigieux. Cette-dernière se prévaut d'une étude d'impact des flux de circulation réalisée en février 2017 qui indique qu'avec l'ouverture prochaine du centre commercial Leclerc, dont le permis de construire a été délivré concomitamment à celui relatif à la station-service, " des rétentions se formeraient de façon récurrente sur la RD 2076, sur un linéaire pouvant dépasser 1km et atteindre 2kms le vendredi soir et le samedi. (...) Le parking de Casino serait saturé le vendredi soir avec un temps de sortie de parking supérieur à 2 minutes et le samedi avec un temps de sortie du parking supérieur à 10 minutes ". Cependant, les données de cette étude, laquelle ne porte pas spécifiquement sur le projet litigieux de la station-service, qui ne comporte au demeurant ni lien physique ni lien fonctionnel avec le projet de centre commercial, sont contestées par le département du Cher dans une note indiquant que le surcroît de trafic sur la RD 2076 en provenance de Bourges semble surestimé et qu'aucune baisse de fréquentation de la zone commerciale Casino n'a été prise en compte. De plus, aucune explication n'est apportée par la société requérante sur la différence sensible de résultat relatif au trafic supplémentaire engendré par le projet de pôle commercial, avec une multiplication par dix des véhicules, entre le dossier de demande d'exploitation commerciale déposé par la société Saint-Doulchard Distribution et l'étude réalisée à la demande de la société Distribution Casino France. Cette dernière étude est d'ailleurs fondée sur une situation moyenne constatée sur des pôles commerciaux de 10 000 m² de surface de vente environ alors qu'il est constant que le projet de la société Saint-Doulchard Distribution est inférieur à 8 000 m² de surface de vente. Les résultats de l'étude dont se prévaut la requérante ne sont pas davantage corroborés par le dossier de demande d'exploitation commerciale pour un projet voisin à l'enseigne " Cultura ", l'autorité environnementale, n'ayant pas, dans son avis sur ce dernier projet, remis en cause les résultats de l'étude de trafic qui avait été réalisée concernant la RD 2076. Il n'est donc pas établi que les conclusions du rapport de présentation réalisé à l'occasion de la demande d'exploitation commerciale de l'hypermarché Leclerc, aux termes desquelles l'augmentation de flux de véhicules ne représente que 5 %, soit 584 véhicules, en tenant compte des migrations pendulaires, avec un chiffre porté à 654 véhicules avec la construction simultanée d'une station-service, augmentation pouvant être absorbée par les infrastructures existantes, seraient erronées. La saturation alléguée de la RD 2076 et la gêne qui en résulterait pour l'exploitation du commerce de la société requérante ne sont ainsi pas établies. Cette dernière ne justifie pas, par conséquent, d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire de la station-service en litige.

4. Il résulte de ce qui précède que la société Distribution Casino France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif a rejeté sa demande comme irrecevable dès lors qu'elle était dépourvue d'intérêt à agir.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Doulchard et de la société Saint-Doulchard Distribution, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement d'une somme au titre desdites dispositions. En revanche, il y a lieu, en l'espèce, de mettre à la charge de la société Distribution Casino France le versement à la commune de Saint-Doulchard d'une part, et à la société Saint-Doulchard Distribution d'autre part, d'une somme de 2 000 euros, chacune, au titre des frais exposés en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Distribution Casino France est rejetée.

Article 2 : La société Distribution Casino France versera à la commune de Saint-Doulchard d'une part, et à la société Saint-Doulchard Distribution d'autre part, la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Distribution Casino France, à la commune de Saint-Doulchard et à la société Saint-Doulchard Distribution.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 novembre 2018.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la Cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT02675


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02675
Date de la décision : 12/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SCP COURRECH et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-12;17nt02675 ?
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