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26/10/2018 | FRANCE | N°18NT01169

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 octobre 2018, 18NT01169


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...G..., l'association Défense des Monts et l'association Belle Normandie Environnement ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite du 15 août 2017, ou subsidiairement la décision du 9 août 2017, par laquelle le préfet de l'Orne a refusé de constater la péremption du permis de construire délivré le 22 mai 2007 à la société Innovent en vue de la construction de deux éoliennes et d'un poste de livraison situés à Argentan.

Par une ordonnance n° 1701782 du

18 janvier 2018, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...G..., l'association Défense des Monts et l'association Belle Normandie Environnement ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite du 15 août 2017, ou subsidiairement la décision du 9 août 2017, par laquelle le préfet de l'Orne a refusé de constater la péremption du permis de construire délivré le 22 mai 2007 à la société Innovent en vue de la construction de deux éoliennes et d'un poste de livraison situés à Argentan.

Par une ordonnance n° 1701782 du 18 janvier 2018, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 16 mars 2018, 6 août 2018 et 4 octobre 2018, M. D...G..., l'association Défense des Monts et l'association Belle Normandie Environnement, représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du président du tribunal administratif de Caen du 18 janvier 2018 ;

2°) de renvoyer, à défaut, l'affaire devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) d'annuler la décision implicite du 15 août 2017 ou, subsidiairement, la décision du 9 août 2017 ;

4°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de l'Orne de constater la péremption du permis de construire accordé le 22 mai 2007 à la société Innovent et d'ordonner l'interruption du chantier, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'État et de la société Innovent une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

­ contrairement à ce que retient l'ordonnance attaquée, une décision implicite de rejet est bien née du silence gardé par l'administration à leur demande du 12 juin 2017 dès lors que la lettre du préfet de l'Orne du 9 août 2017 les avisant de ce que des mesures d'instruction seraient prises, ne peut être regardée comme une réponse d'attente, de sorte que l'ordonnance est insuffisamment motivée et entachée d'une erreur de droit ;

­ la décision n'a pas de caractère confirmatif et, en tout état de cause, elle ne peut avoir ce caractère confirmatif en ce qui concerne les deux associations requérantes ;

­ ils ont, chacun en ce qui les concerne, un intérêt à agir ;

­ la décision implicite de rejet du 15 août 2017 a été prise en méconnaissance de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration, la lettre du 9 août 2017 accusant réception de leur demande n'étant pas conforme aux dispositions de l'article L. 112-5 du même code ;

­ c'est à tort que le préfet de l'Orne a refusé de constater la caducité du permis de construire qu'il a délivré le 22 mai 2007 dès lors qu'en l'absence de réalisation de travaux suffisamment significatifs qui ont, par ailleurs été interrompus, ce permis était périmé à la date des décisions litigieuses.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2018, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête de M. G...et autres n'est fondé pour contester la régularité de l'ordonnance du président du tribunal administratif de Caen ;

- il s'en remet, pour les autres moyens développés par M.G..., aux fins de non recevoir et aux écritures présentées en première instance par le préfet de l'Orne alors que, de plus, les associations requérantes n'établissent pas que le projet en cause serait de nature à porter atteinte à leurs intérêts statutaires et que les documents produits par les requérants ne permettent pas d'établir que le permis de construire serait caduc.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 juillet 2018 et le 25 septembre 2018, la société Innovent, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. G... et autres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé pour contester la régularité de l'ordonnance du président du tribunal administratif de Caen ;

- à titre subsidiaire, les requérants ne disposant pas d'un intérêt à agir pour contester le permis de construire en litige ne peuvent demander à l'administration d'en constater la caducité ;

- à titre infiniment subsidiaire, les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions contestées du préfet de l'Orne.

La clôture d'instruction est intervenue le 5 octobre 2018 à minuit en application des dispositions du premier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour la société Innovent a été enregistré le 6 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A... 'hirondel,

­ les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

­ et les observations de MeC..., représentant M. G...et autres, et de MeE..., substituant MeB..., représentant la société Innovent.

Considérant ce qui suit :

1. M.G..., l'association Défense des Monts et l'association Belle Normandie Environnement relèvent appel de l'ordonnance du 18 janvier 2018 par laquelle le président du tribunal administratif de Caen a rejeté comme manifestement irrecevable, sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, leur requête tendant à l'annulation de la décision implicite du 15 août 2017, ou subsidiairement de la décision du 9 août 2017, par laquelle le préfet de l'Orne a refusé de constater la péremption du permis de construire qu'il a délivré le 22 mai 2007 à la société Innovent en vue de la construction de deux éoliennes et d'un poste de livraison aux lieux-dits les Vigiles et la Pucelle sur le territoire de la commune d'Argentan.

Sur les fins de non recevoir opposées par le ministre et par la société Innovent :

S'agissant de l'intérêt à agir de M.G... :

2. Il ressort des pièces du dossier que la propriété de M. G...est distante d'environ 1,230 km et 1,5 km des deux éoliennes, d'une hauteur totale chacune de 90 mètres, objet du permis de construire dont l'intéressé a demandé à l'autorité administrative de constater la caducité. Si M. G...allègue que ces deux aérogénérateurs seront visibles à partir de sa propriété au niveau de la route départementale n°771, il ne justifie pas, au regard tant de la distance qui sépare sa propriété du site retenu pour l'implantation du projet éolien que de la configuration des lieux, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir. S'il soutient qu'il subira des nuisances lors de la phase de chantier ainsi que des nuisances sonores, il n'apporte au soutien des ses allégations aucun élément de nature à permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. M. G... ne justifie pas ainsi d'un intérêt suffisant lui donnant qualité pour contester l'arrêté du 22 mai 2007 par lequel le préfet de l'Orne a délivré à la société Innovent un permis de construire deux éoliennes et un poste de livraison sur un terrain situé à Argentan. Par suite, il n'était pas recevable à contester le refus de l'autorité administrative de constater la caducité de ce permis de construire.

S'agissant de l'intérêt à agir de l'association Défense des Monts et de l'association Belle Normandie Environnement :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-1 du code de justice administrative : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ". Selon l'article R. 424-17 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Le permis de construire (...) est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. / Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. ".

4. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme que l'expression de " décision relative à l'occupation ou à l'utilisation des sols " doit être regardée comme concernant aussi la décision par laquelle l'autorité administrative refuse de constater la caducité d'un permis de construire sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme et qui a nécessairement pour effet de confirmer la validité d'une décision valant autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol au sens de l'article L. 600-1-1 précité.

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation du maire d'Argentan du 28 septembre 2018, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, que la demande de permis de construire déposée le 13 décembre 2005 par la société Innovent portant sur le projet d'éolienne litigieux a été affichée en mairie dans les 15 jours suivant son dépôt alors que les statuts de l'association Défense des Monts et de l'association Belle Normandie Environnement ont été déposés respectivement en préfecture en 2012 et le 13 juillet 2006. Ces associations, qui n'étaient pas recevables pour contester le permis de construire litigieux, ne sauraient, par suite, contester le refus du préfet d'en constater la caducité.

6. Il résulte de ce qui précède que les requérants n'étant pas recevables à contester le refus de l'autorité administrative de constater la caducité de l'arrêté du 22 mai 2007 par lequel le préfet du Calvados a délivré à la société Innovent un permis de construire deux éoliennes et un poste de livraison sur un terrain situé à Argentan, ils ne sauraient se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. G... et autres la somme que la société Innovent demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par M. G...et autres soit mise à la charge de l'État et de la société Innovent, qui n'ont pas la qualité de partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. G...et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Innovent tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M.G..., à l'association Défense des Monts, à l'association Belle Normandie Environnement, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la société Innovent.

Une copie sera adressée au préfet de l'Orne.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.

Le rapporteur,

M. F...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01169


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01169
Date de la décision : 26/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : GREEN LAW AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-10-26;18nt01169 ?
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