Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 21 octobre 2015, la société AFM Recyclage, représentée par MeB..., a demandé à la cour d'annuler le jugement du 25 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 10 juin 2010 du conseil municipal de Trignac en tant qu'il a adopté la modification n° 3 du plan local d'urbanisme communal ainsi que cette délibération et la décision du maire de Trignac du 30 septembre 2010 portant rejet de son recours gracieux et de mettre à la charge de la partie défaillante la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par l'arrêt du 15 décembre 2017, avec les mémoires et les pièces qui y sont visés, la cour administrative d'appel de Nantes, avant de statuer sur la requête visée ci-dessus, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai imparti à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), venant aux droits de la commune de Trignac, pour notifier à la cour une délibération régularisant l'insuffisance de la note explicative de synthèse transmise aux conseillers municipaux préalablement à l'adoption de la délibération contestée.
Par des mémoires, enregistrés le 4 avril 2018 et le 31 mai 2018, la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), venant aux droits de la commune de Trignac, représentée par la société d'avocatsC..., Alibert et associés demande à la cour de prendre acte de la notification de la nouvelle délibération d'approbation de la modification n°3 du plan local d'urbanisme de la commune de Trignac, adoptée le 27 mars 2018 par le conseil communautaire en exécution de l'arrêt susvisé du 15 décembre 2017, de rejeter la requête de la société AFM Recyclage, et de condamner cette dernière à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par des mémoires enregistrés le 9 mai 2018 et le 12 septembre 2018, la société AFM Recyclage demande à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir du Conseil d'Etat saisi d'un pourvoi contre l'arrêt du 15 décembre 2017, ou à tout le moins, d'annuler la délibération du 10 juin 2010 en tant que le conseil municipal de Trignac a adopté la modification n° 3 du plan local d'urbanisme communal ainsi que la décision du maire de Trignac du 30 septembre 2010 portant rejet de son recours gracieux et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle soutient que :
elle a formé un pourvoi devant le Conseil d'Etat contre l'arrêt de la cour du 15 décembre 2017, de sorte qu'il serait de bonne administration de surseoir à statuer dans l'attente de la décision rendue par la haute juridiction ;
la cour ne pouvait surseoir à statuer dans l'attente de la régularisation du vice qu'elle a retenu dès lors que celui-ci, qui consistait en l'absence de toute note de synthèse, n'était pas régularisable ;
la délibération venant régulariser la procédure a été prise par une autorité incompétente ;
la délibération est entachée d'un vice de procédure faute d'établir que les conseillers communautaires ont reçu la convocation cinq jours avant la séance du 27 mars 2018 ;
l'information des conseillers communautaires ne peut être regardée comme satisfaisante.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hirondel,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la société AFM Recyclage, et de Me D..., substituant MeC..., représentant la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire.
Une note en délibéré présentée par la société AFM Recyclage a été enregistrée le 27 septembre 2018.
Considérant ce qui suit :
1. Selon l' l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme : " Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un schéma de cohérence territoriale, un plan local d'urbanisme ou une carte communale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'une illégalité entachant l'élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d'être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d'urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : / 1° En cas d'illégalité autre qu'un vice de forme ou de procédure, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité est susceptible d'être régularisée par une procédure de modification prévue à la section 6 du chapitre III du titre IV du livre Ier et à la section 6 du chapitre III du titre V du livre Ier ; / 2° En cas d'illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l'illégalité a eu lieu, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / Si, après avoir écarté les autres moyens, le juge administratif estime que le vice qu'il relève affecte notamment un plan de secteur, le programme d'orientations et d'actions du plan local d'urbanisme ou les dispositions relatives à l'habitat ou aux transports et déplacements des orientations d'aménagement et de programmation, il peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce. ".
2. Il résulte de ces dispositions que les parties à l'instance ayant donné lieu à la décision de sursis à statuer en vue de permettre la régularisation de l'acte attaqué peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices affectant sa légalité externe et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant-dire droit. Elles ne peuvent soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.
3. Par l'arrêt avant dire droit du 15 décembre 2017 susvisé,
la cour, après avoir écarté les autres moyens développés par la société AFM Recyclage et constaté que la note explicative de synthèse communiquée aux conseillers municipaux de Trignac préalablement à l'adoption de la délibération contestée était insuffisante au regard des obligations rappelées au point ci-dessus, et qu'en conséquence la délibération en litige avait été approuvée à l'issue d'une procédure irrégulière, a sursis à statuer sur la requête présentée par la société AFM Recyclage jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, à compter de la notification de cet arrêt, imparti à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), venant aux droits de la commune de Trignac, pour notifier à la cour une délibération régularisant cette insuffisance de la note explicative de synthèse.
4. En premier lieu, selon le troisième alinéa du III de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales : " L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert des compétences, aux communes qui le créent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. ".
5. En l'espèce, la compétence en matière de plan local d'urbanisme a été transférée à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) dont est membre la commune de Trignac par un arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 17 novembre 2015. Aussi, et conformément aux dispositions surappelées, la CARENE était compétente, à la date du 27 mars 2018, pour se prononcer sur la modification n°3 du plan local d'urbanisme de cette commune, sans que sa délibération ait un effet rétroactif.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". L'article L. 2121-12 du même code prévoit que : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. / (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs (...) ". Ces dispositions sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale, en vertu de l'article L. 5211-1 du même code lorsque, comme la CARENE, ils comprennent au moins une commune de 3 500 habitants et plus.
7. Il ressort des mentions du registre de la délibération du conseil communautaire que la convocation à la séance du 27 mars 2018 a été adressée aux conseillers communautaires le 21 mars 2018, soit dans le respect du délai de cinq jours francs prévu par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales. Si la société AFM Recyclage conteste que la convocation ait été faite dans les délais légaux, elle n'assortit ses allégations d'aucun élément circonstancié. Par suite, ces allégations ne sauraient conduire à remettre en cause la mention factuelle précise du registre des délibérations, qui, au demeurant, fait foi jusqu'à preuve contraire. La société requérante n'est, dans ces conditions, pas fondée à soutenir que le délai prévu par l'article L. 2121-12 aurait été méconnu. En outre si la " lettre circulaire " de convocation produite par la CARENE ne mentionne pas le nom et l'adresse de chacun des membres du conseil communautaire, cette seule circonstance ne saurait suffire à caractériser une méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales.
8. En troisième lieu, la société AFM Recyclage ne saurait utilement contester, dans la présente instance, le bien-fondé de l'arrêt de la cour du 15 décembre 2017 qui a jugé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, que le vice de procédure tiré de l'insuffisance de la note explicative de synthèse était, en l'espèce, régularisable, en reprenant le moyen qu'elle avait déjà exposé dans ses écritures lorsqu'elle avait été invitée à présenter ses observations avant la mise en oeuvre de ces dispositions.
9. En quatrième et dernier lieu, il résulte des dispositions précitées des articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, que la convocation aux réunions d'un conseil communautaire doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut de note explicative lors de l'envoi de la convocation aux conseillers communautaires entache alors d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le président du conseil communautaire n'ait fait parvenir aux intéressés, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et d'apprécier les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas, toutefois, de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
10. Par une délibération du 27 mars 2018, produite à la cour le
4 avril 2018, le conseil communautaire de la CARENE a approuvé la modification n°3 du plan local d'urbanisme de la commune de Trignac, en faisant précéder ce nouveau vote de la transmission aux conseillers communautaires d'une note explicative de synthèse exposant le contexte juridique dans lequel s'inscrit la délibération sur laquelle le conseil est invité à se prononcer, reprenant les principales étapes de l'élaboration du document d'urbanisme et précisant l'objet de la modification envisagée en mentionnant notamment les articles du règlement qui ont été modifiés afin de permettre la mise en oeuvre du projet de zone d'aménagement concerté (ZAC). Selon la délibération du 27 mars 2018, cette note de synthèse était, en outre accompagnée, du dossier de modification n°3 du plan local d'urbanisme, du rapport du commissaire enquêteur, du projet de délibération et de l'arrêt de la cour. Ainsi, et, contrairement à ce que soutient la société AFM Recyclage, les conseillers communautaires ont disposé d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Dans ces conditions, cette délibération a eu pour effet de régulariser la procédure d'approbation de la modification n°3 du plan local d'urbanisme de la commune de Trignac au regard des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales.
11. Il résulte de tout ce qui précède, ainsi que de l'arrêt avant dire droit rendu par la cour le 15 décembre 2017, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat saisi d'un pourvoi contre cet arrêt, que la société AFM Recyclage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société AFM Recyclage la somme que la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE) demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la société AFM Recyclage soit mise à la charge de la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE), qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par la société AFM Recyclage est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société AFM Recyclage et à la communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire.
Copie en sera adressée pour son information au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 octobre 2018.
Le rapporteur,
M. E...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT03219