Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 29 juin 2016 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 29 juin 2016 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français.
Par un jugement n° 1603336, 163337 du 2 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a, après les avoir jointes, rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2017, M.C..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 29 juin 2016 le concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa vie privée et familiale ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le refus de titre de séjour sur lequel elle est fondée étant illégal, elle est elle-même illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2018, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;
- les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 octobre 2017.
II. Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2017, MmeA..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 2 mai 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 29 juin 2016 la concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, après l'avoir munie d'une autorisation provisoire de séjour, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle contrevient aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur sa vie privée et familiale ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- étant dépourvue de base légale, elle encourt l'annulation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2018, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;
- les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 octobre 2017.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bougrine a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...et MmeA..., son épouse, ressortissants kosovares nés respectivement le 3 juin 1977 et le 25 juin 1974, sont irrégulièrement entrés en France en 2012. Ils ont chacun sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 29 juin 2016, le préfet du Loiret a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français. M. C...et Mme A...ont chacun demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté préfectoral le concernant. Ils relèvent appel du jugement du 2 mai 2017 par lequel le tribunal, après les avoir jointes, a rejeté ces demandes. Il y a lieu de joindre les requêtes d'appel de M. C... et de MmeA..., dirigées contre un même jugement, pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour :
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...). ".
3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.
S'agissant de M.C... :
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, dont la légalité s'apprécie au regard des circonstances de droit et de fait existant à cette date, M.C..., qui souffrait d'une surdité totale à l'oreille gauche et d'une surdité profonde à l'oreille droite, était en attente d'une prise en charge, au sein du " centre référent implants cochléaires Adultes Ile-de-France " (Pitié-Salpêtrière), consistant en une implantation cochléaire bilatérale suivie de réglages itératifs. Tant le médecin de l'agence régionale de santé Centre-Val de Loire, dans son avis du 6 novembre 2015, que le préfet du Loiret ont estimé que si l'état de santé de M. C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié existait au Kosovo. Le requérant produit un courrier en date du 30 novembre 2016 du responsable du centre référent au sein duquel l'implantation attendue a, postérieurement à la décision contestée, été réalisée dont il ressort notamment que la pose d'implants et les réglages consécutifs doivent être effectués dans le même centre. Il verse également aux débats le courriel du 6 décembre 2016 par lequel le représentant de l'un des principaux fabricants d'implants, interrogé sur l'existence d'une clinique ou d'un hôpital pratiquant les implantations cochléaires au Kosovo, a indiqué qu'il n'existait pas de centre d'implantation cochléaire dans ce pays. Toutefois, ces deux éléments ne suffisent pas à remettre en cause l'exactitude des renseignements contenus dans la base de données MedCOI dont un extrait a été produit devant les premiers juges et dont il ressort qu'il existe à Pristina un hôpital public assurant l'implantation cochléaire et son suivi. Dans ces conditions, en estimant que n'étaient pas remplies les conditions de délivrance d'un titre de séjour en qualité de malade au motif qu'il existait au Kosovo un traitement approprié à l'état de santé de M.C..., le préfet du Loiret n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
S'agissant de MmeA... :
5. Mme A...a subi le 28 septembre 2015 une arthroplastie totale de la hanche rendue nécessaire par une dysplasie d'origine cotyloïdienne et une inégalité de longueur des membres inférieurs. Il ressort du certificat établi le 16 mars 2016 par un médecin agréé et de celui établi le 7 septembre 2016 par le chef du service de chirurgie orthopédique et traumatologique du centre hospitalier universitaire Raymond Poincaré que l'intéressée a conservé une décompensation rachidienne lombaire, une discopathie dégénérative lombaire et une petite hernie sous-ombilicale. Son état de santé, dont l'évolution future est jugée favorable par le médecin agréé, implique une prise en charge et un suivi dans un milieu rhumatologique spécialisé ainsi que la prise d'antalgiques (Doliprane). Il ne ressort néanmoins d'aucune des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'ont estimé le médecin de l'agence régionale de santé et le préfet du Loiret, l'absence d'un tel traitement risquerait d'entraîner sur la santé de Mme A...des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
6. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier ni même n'est allégué que M. C...et Mme A... auraient sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Loiret n'a pas, par ailleurs, examiné d'office si les intéressés étaient susceptibles de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, les moyens tirés de leur méconnaissance doivent être écartés.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation :
8. Malgré une durée de séjour en France de quatre ans, leur prise en charge médicale et la scolarisation en France de leurs deux enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions refusant la délivrance à M. C...et à Mme A...d'un titre de séjour seraient entachées d'erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle et familiale des requérants.
En ce qui concerne les moyens tirés du défaut de saisine de la commission du titre de séjour :
9. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 312-2 du même code : " Le préfet (...) saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles (...) L. 313-11 (...) à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre mentionné à l'article L. 312-2, que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent des articles auxquels les dispositions de l'article L. 312-2 renvoient.
10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 du présent arrêt que M. C...et Mme A... n'étaient pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Loiret n'était pas tenu de soumettre leurs cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter leurs demandes.
Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
11. L'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...et Mme A...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, les conclusions aux fin d'injonction et d'astreinte présentées par les requérants ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...et la requête de Mme A...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., à Mme B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 01er octobre 2018.
Le rapporteur,
K. BOUGRINELe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03634,17NT03636 2
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