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17/09/2018 | FRANCE | N°17NT02534

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 17 septembre 2018, 17NT02534


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2017 par lequel la préfète du Cher a décidé sa remise aux autorités tchèques, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du 17 juillet 2017 l'assignant à résidence dans le département du Cher pour une durée de quarante-cinq jours.

Par jugement n° 1702773 du 31 juillet 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a annulé les arrêtés du 12 et 17 juill

et 2017 de la préfète du Cher.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2017 par lequel la préfète du Cher a décidé sa remise aux autorités tchèques, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du 17 juillet 2017 l'assignant à résidence dans le département du Cher pour une durée de quarante-cinq jours.

Par jugement n° 1702773 du 31 juillet 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a annulé les arrêtés du 12 et 17 juillet 2017 de la préfète du Cher.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 11 août 2017 et 5 février 2018, la préfète du Cher demande à la cour l'annulation du jugement du 31 juillet 2017.

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que la décision de transférer M. C... aux autorités tchèques était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013.

Vu le jugement attaqué ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2018, M.C..., représenté par Me B... conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés par la préfète du Cher ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 10 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant arménien, né le 17 avril 1987, est entré irrégulièrement en France le 28 décembre 2016, selon ses déclarations. Il a, le 5 avril 2017, sollicité son admission au séjour au titre de l'asile auprès de la préfecture du Cher et s'est vu remettre une attestation de demande d'asile mentionnant qu'il devait faire l'objet de la procédure dite " Dublin " dès lors qu'il est titulaire d'un visa pour la République Tchèque délivré par les autorités consulaires tchèques en Arménie. Les autorités tchèques ont été saisies d'une demande de réadmission le 17 mai 2017 en application de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Suite à leur accord explicite du 26 juin 2017, la préfète du Cher, par un arrêté du 12 juillet 2017, a décidé le transfert de M. C...aux autorités tchèques. Par un arrêté du 17 juillet 2017, elle a assigné M. C...à résidence dans le département du Cher pour une durée de quarante-cinq jours. Saisi par M. C...d'une demande d'annulation de ces décisions, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans y a fait droit par un jugement du 31 juillet 2017 dont la préfète du Cher relève régulièrement appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013: " (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (....) ". Aux termes de l'article 2 du même règlement : " Définitions. Aux fins du présent règlement, on entend par : (...) g) " membres de la famille ", dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présente sur le territoire des Etats-membres : / le conjoint du demandeur (...) / les enfants mineurs des couples (...) lorsque le demandeur est mineur et non marié, le père, la mère ou un autre adulte qui est responsable du demandeur (...) h) " proche ", la tante ou l'oncle adulte ou un des grands-parents du demandeur (...) ".

3. En second lieu, la mise en oeuvre, par les autorités françaises, des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être assurée à la lumière des exigences définies par le second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, selon lequel : " ...les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ". Il en résulte que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

4. Si M.C..., qui est entré récemment en France le 28 décembre 2016, majeur, célibataire et sans enfants à charge et de surcroit n'établissant pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, se prévaut de la présence en France de ses parents, titulaires d'un titre de séjour et présents en France depuis le 23 janvier 2006, de celle de son frère présent sur le territoire français depuis le 23 septembre 2005, ainsi que de la présence en France de sa belle-soeur, de son neveu et de sa nièce, il est constant que l'intéressé a été séparé de ses parents pendant dix ans, et de son frère pendant onze ans, avant son entrée irrégulière sur le territoire français. Il n'établit pas, en outre, l'intensité et l'ancienneté de ses liens avec les membres de sa famille résidant en France et n'invoque aucune circonstance particulière qui rendrait indispensable sa présence à leurs côtés. Dans ces conditions, la préfète du Cher est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que la décision de transférer M. C...aux autorités tchèques était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013.

5. M. C...n'ayant pas développé d'autre moyen devant le tribunal ou la cour à l'appui des ses conclusions en annulation, il résulte de ce qui précède que la préfète du Cher est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé ses décisions du 11 juillet 2017 portant transfert de M. C... aux autorités italiennes et assignation à résidence.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions combinées des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 31 juillet 2017 est annulé.

Article 2 : la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Cher

Délibéré après l'audience du 31 aout 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2018.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

J. FRANCFORT

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT02534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02534
Date de la décision : 17/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : GOURDAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-09-17;17nt02534 ?
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