Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par la voie du déféré, le préfet de Loir-et-Cher a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 20 juin 2014 par lequel le maire de la commune d'Angé a accordé un permis d'aménager modificatif pour la création de deux locaux de rangement et l'installation d'hébergements légers ou démontables sur un terrain situé chemin départemental n° 158 au lieu-dit " Le Moulin " à Angé.
Par un jugement n° 1502713 du 18 juillet 2016, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du maire d'Angé du 20 juin 2014.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2016, la commune d'Angé, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 18 juillet 2016 ;
2°) à titre principal, de rejeter le déféré du préfet, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente d'une régularisation par un permis d'aménager modificatif, ou à défaut, de limiter l'annulation aux seules dispositions irrégulières ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen de défense tiré de la régularité de la plateforme en béton au regard des dispositions du plan de prévention des risques d'inondation ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que le déféré préfectoral était recevable ;
- il a fait application de dispositions de l'article R. 443-5 du code de l'urbanisme dans une rédaction en vigueur postérieurement à la date de décision contestée ;
- le rapport d'enquête publique précédant la mise en compatibilité du plan d'occupation des sols est de nature à pallier l'insuffisance du dossier du pétitionnaire ; une telle omission portant sur des modifications de faible ampleur par rapport au permis initial n'a pas exercé d'influence sur l'appréciation du projet ;
- la réalisation d'une plateforme en béton ne méconnaît pas les prescriptions du plan de prévention des risques d'inondation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2016, le préfet de Loir-et-Cher conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la commune d'Angé ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lenoir, président ;
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...substituant MeB..., représentant la commune d'Angé.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 14 août 2012, le maire d'Angé a délivré à cette commune un permis d'aménager un terrain de camping, situé chemin départemental n° 158 au lieu-dit " Le Moulin ". Le 11 février 2014, un dossier de permis d'aménager modificatif a été déposé pour la création de deux locaux techniques de rangement et l'installation d'hébergements légers ou démontables, soit trois cabanes forestières, un chalet sur pilotis et deux plateformes " pour activités festives et pour stationnement et atelier des bicyclettes ". Par un arrêté du 20 juin 2014, le maire d'Angé a accordé ce permis d'aménager modificatif. La commune d'Angé relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Orléans a, sur déféré du préfet de Loir-et-Cher, annulé cet arrêté du 20 juin 2014.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort de la lecture du point 11 jugement attaqué que tribunal administratif après avoir cité les dispositions du plan de prévention des risques d'inondation du Cher applicables en secteur d'aléa 3 puis avoir constaté " qu'il ressort des pièces du dossier que le permis modificatif prévoit l'installation d'une plateforme " pour activités festives ", soit une dalle en béton de 180 mètres carrés, qui sera utilisée pour des jeux et des danses, estimé que cette structure ne constituait pas une construction nécessaire au fonctionnement du terrain de camping et qu'une telle construction ne pouvait donc, sans méconnaître le PPRI, être autorisée en secteur d'aléa 3 et qu'en conséquence le préfet était fondé à soutenir que le permis modificatif méconnaît les dispositions du PPRI applicables en secteur d'aléa 3. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en réponse à l'argumentation en défense de la commune fondée sur la qualification de la plateforme en béton en cause et sa régularité au regard des prescriptions du plan de prévention des risques d'inondation du Cher manque en fait et doit être écarté.
Sur la recevabilité du déféré préfectoral :
3. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission (...) ". Parmi les actes mentionnés par l'article L. 2131-2 de ce code figure, au 6° : " Le permis de construire et les autres autorisations d'utilisation du sol et le certificat d'urbanisme délivrés par le maire ". Aux termes de l'article L. 2131-1 du même code, " (...) la preuve de la réception des actes par le représentant de l'Etat dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen. L'accusé de réception, qui est immédiatement délivré, peut être utilisé à cet effet mais n'est pas une condition du caractère exécutoire des actes ". Enfin, l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque l'autorité compétente pour délivrer le permis (...) est le maire au nom de la commune, celui-ci transmet un exemplaire de la demande (...) au préfet dans la semaine qui suit le dépôt ".
4. En application de ces dispositions, le préfet défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission et figurent au nombre de ces actes les permis de construire ou d'aménager tacites. Une commune doit être réputée avoir satisfait à l'obligation de transmission dans le cas d'un permis tacite si elle a transmis au préfet l'entier dossier de demande, en application de l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme, le délai du déféré courant alors à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l'hypothèse où la commune ne satisfait à l'obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission.
5. Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Angé, qui a déposé un dossier de demande de permis d'aménager modificatif en mairie le 11 février 2014, complété le 17 mars 2014, est devenue titulaire d'un permis d'aménager tacite le 17 juin 2014, à l'issue du délai d'instruction de trois mois prévu par l'article R. 423-3 du code de l'urbanisme. Si elle soutient qu'elle a transmis au préfet de Loir-et-Cher, le 2 juillet 2014, " l'entier dossier " de demande de permis d'aménager, elle se borne à produire tant en appel qu'en première instance un certificat signé du maire de la commune et daté du 18 mai 2016, alors que le préfet, qui conteste avoir reçu ce dossier, l'a mise en demeure, par courrier du 28 mai 2015, de lui transmettre les autorisations d'urbanisme concernant les travaux d'extension du camping. Le préfet n'a été avisé de la délivrance d'un permis d'aménager modificatif que par le courrier du 11 juin 2015, reçu le 15 juin suivant en préfecture, lui transmettant l'arrêté du maire du 20 juin 2014 et a déféré cet arrêté le 7 août 2015 avant l'expiration du délai de recours contentieux. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'en l'absence de preuve de la réception du dossier de permis d'aménager, par l'accusé de réception délivré par le préfet ou par un autre moyen, le déféré dirigé contre le permis confirmatif était recevable.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. En vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans cette hypothèse, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Si, en revanche, il estime qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens qu'il lui appartient d'écarter si aucun d'entre eux n'est fondé. A l'inverse, en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il lui revient de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges
7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 122-2 du code de l'environnement : " I.-Les travaux, ouvrages ou aménagements énumérés dans le tableau annexé au présent article sont soumis à une étude d'impact soit de façon systématique, soit après un examen au cas par cas, en fonction des critères précisés dans ce tableau. / II.-Sont soumis à la réalisation d'une étude d'impact de façon systématique ou après un examen au cas par cas les modifications ou extensions des travaux, ouvrages ou aménagements lorsqu'elles répondent par elles-mêmes aux seuils de soumission à étude d'impact en fonction des critères précisés dans le tableau susmentionné. / III.-En outre, les dispositions des I et II du présent article sont applicables : / 1° Si les travaux, ouvrages ou aménagements visés au présent article n'ont pas déjà fait l'objet d'une étude d'impact, lorsque ces modifications ou extensions font entrer ces derniers pris dans leur totalité dans les seuils de soumission à étude d'impact en fonction des critères précisés dans le tableau susmentionné. Sont exclus les travaux, ouvrages ou aménagements autorisés avant l'entrée en vigueur du décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements ". Le tableau annexé à cet article énonce, dans sa rubrique 45, que les terrains de camping et de caravaning permanents " permettant l'accueil de plus de 20 personnes ou de plus de 6 emplacements de tentes, caravanes ou résidences mobiles de loisirs, et de moins de 200 emplacements ", sont soumis à la procédure de " cas par cas ". L'article R. 443-5 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable prévoit que : " Le dossier de demande comporte également : a) L'étude d'impact définie à l'article R. 122-3 du code de l'environnement lorsque la demande vise un projet comportant deux cents emplacements ou plus ; / b) Une notice exposant les conditions dans lesquelles le projet satisfait aux préoccupations d'environnement définies par l'article R. 122-1 du même code dans les autres cas " ;
8. Il ressort des pièces du dossier que si le projet d'extension du camping de la commune d'Angé, portant sur la création de dix-huit emplacements de camping, relevait en l'espèce de la procédure de " cas par cas " en application des dispositions du code de l'environnement précitées, il n'est toutefois pas contesté que le projet en cause ne comportait ni d'étude d'impact ni la décision de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement dispensant le demandeur de réaliser une telle étude. En outre, contrairement à ce que soutient la commune requérante, le rapport d'enquête publique conjointe préalable à la déclaration de projet pour la création d'un camping et la mise en compatibilité du plan d'occupation des sols datant de 2012 n'est pas de nature à pallier l'insuffisance des pièces du dossier de demande de permis modificatif déposé en février 2014, ni la notice établie en 2012 jointe au dossier de demande de permis d'aménager, dont le contenu est trop succinct pour permettre d'apprécier les effets du projet sur l'environnement. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que le dossier était incomplet et que ces insuffisances avaient été de nature à influencer l'appréciation portée par le maire sur le permis d'aménager.
9. En second lieu, le plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) du Cher définit la zone où se situe le projet de camping en tant que zone inondable A " à préserver de toute urbanisation nouvelle " Selon ses prescriptions, en secteur d'aléa 3, les constructions, ouvrages, installations ou travaux sont interdits afin de ne pas compromettre la préservation des champs d'inondation ou l'écoulement des eaux à l'exception des : " ...terrains de camping et de caravaning et les constructions nécessaires à leur fonctionnement ", " ... structures provisoires (tentes, parquets, structures flottables, baraquements, tribunes...) sous réserve qu'il soit possible de les démonter et de les mettre hors d'eau en cas de crue dans un délai rapide (de 12 à 48 heures) et que l'implantation de ces structures en zone inondable n'intervienne qu'entre le 1er avril et le 1er novembre ". En secteur d'aléa 4, aucune construction ou installation de ce type n'est autorisée.
10. Il ressort des pièces du dossier que les trois cabanes forestières et le chalet sur pilotis ne constituent ni une construction nécessaire au fonctionnement du terrain de camping au sens des dispositions du PPRI, ni une structure provisoire ; par suite, c'est à bon droit que le tribunal a, pour ce motif et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la nature de la plate-forme en béton, retenu la méconnaissance des dispositions du PPRI à l'encontre de l'arrêté délivrant le permis d'aménager modificatif en cause.
11. Compte tenu de ce qui précède, les vices dont est affecté l'arrêté litigieux ne sont pas susceptibles d'être régularisés par la délivrance d'un permis modificatif. Par suite, les conclusions de la commune relatives à l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme doivent être écartées.
12. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Angé n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 20 juin 2014.
Sur les frais d'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante le versement à la commune d'Angé de la somme qu'elle sollicite au titre des frais d'instance qu'elle a exposé. Les conclusions de la commune en ce sens doivent donc être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Angé est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Angé et au ministre de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Loir-et-Cher.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Mony, premier conseiller,
- M. Sacher, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 23 juillet 2018.
L'assesseur le plus ancien,
A. MONYLe président-rapporteur,
H. LENOIR
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT03189