Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 28 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Maisons (Calvados) a procédé à son licenciement pour inaptitude physique à compter du 15 octobre 2015.
Par un jugement n°1502309 du 29 juin 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 août 2016, M.D..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 29 juin 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 septembre 2015 par lequel le maire de Maisons a procédé à son licenciement pour inaptitude physique ;
3°) d'enjoindre au maire de Maisons de procéder à sa réintégration et à l'adaptation de son poste ou de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé, ou à défaut, de procéder à son reclassement dans un emploi pour lequel il est en mesure de remplir ses fonctions, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Maisons la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, le maire de Maisons n'ayant pas procédé à un examen des circonstances propres à sa situation individuelle, notamment de l'avis du comité médical du 26 novembre 2014 ;
- son licenciement méconnaît les dispositions des articles 81 et 82 de la loi 84-53 du 26 janvier 1984, ainsi que des articles 1 et 2 du décret 85-1054 du 30 septembre 1985, la commune de Maisons n'ayant pas satisfait à son obligation de reclassement :
* elle ne lui a pas proposé, préalablement à son licenciement, soit un détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, soit le bénéfice des modalités de reclassement ;
* elle ne l'a pas informé de la nécessité de saisir le centre de gestion pour une recherche de reclassement et ne l'a pas mis en mesure de saisir le centre de gestion d'une demande de reclassement ;
- la commune n'a pas recherché si le poste qu'il occupait pouvait être adapté à son état physique et ne lui a pas davantage proposé une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé ;
- la réalité des efforts de reclassement de la commune n'est pas établie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2016, la commune de Maisons, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. D...à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984.
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985.
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de MeA..., substituant MeC..., représentant la commune de Maisons.
Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 juin 2018, présentée pour M.D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D...a été recruté en tant que stagiaire par la commune de Maisons par arrêté du 16 juillet 1998. Le 16 juillet 1999, le requérant a été titularisé sur son poste au grade d'adjoint technique territorial de 2ème classe pour exercer les fonctions d'agent d'entretien. Par un arrêté du 28 septembre 2015, le maire de Maisons a prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 15 octobre 2015. Par sa présente requête, M. D...relève appel du jugement du 29 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2015.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 1er du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire. / L'autorité territoriale procède à cette affectation après avis du service de médecine professionnelle et de prévention, dans l'hypothèse où l'état de ce fonctionnaire n'a pas rendu nécessaire l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé. ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale ou le président du centre national de la fonction publique territoriale ou le président du centre de gestion, après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ".
3. Il est constant que le comité médical départemental, dans sa séance du 26 novembre 2014, a déclaré M. D... " inapte définitivement à ses fonctions mais pas à toutes fonctions " et a émis un avis favorable à un reclassement sur un autre emploi. Dans ces conditions, à la date à laquelle il a pris sa décision, le maire de la commune de Maisons, qui n'était pas tenu de rechercher un reclassement de l'intéressé dans une autre collectivité, ne pouvait, sans méconnaître les dispositions réglementaires citées, licencier M. D...sans l'avoir invité préalablement soit à présenter une demande un détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emploi, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues par l'article 82 de la loi du 26 janvier 1984. Si par courrier du 23 avril 2015, le maire de Maisons a invité le requérant à " présenter, dans les plus brefs délais, une demande de reclassement ", il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de la commune ait invité M. D..., antérieurement ou postérieurement aux démarches infructueuses entreprises pour reclasser le requérant au sein des effectifs de la collectivité, à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps avant de licencier l'intéressé. En outre, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la commune ait transmis à M. D... le courrier du centre de gestion en date du 9 juillet 2015 par lequel ce dernier informe le maire de la commune que " toute recherche d'un poste auprès d'un nouvel employeur sera conditionnée par une démarche volontaire de l'agent, qui à ce jour n'a pas été enregistrée auprès de notre établissement (...) ". Par suite le maire de Maisons a méconnu les dispositions précitées du décret du 30 septembre 1985.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 septembre 2015 par lequel le maire de Maisons a procédé à son licenciement pour inaptitude physique.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
6. Le présent arrêt implique nécessairement la réintégration de M. D... à compter du 15 octobre 2015. Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au maire de la commune de Maisons d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. D....
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M. D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par la commune de Maisons au titre des frais de procédure. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de la commune de Maisons la somme réclamée au profit du conseil de M.D....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1502309 du 29 juin 2016 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 28 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Maisons a procédé au licenciement pour inaptitude physique de M. D... est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Maisons de réintégrer M. D...à compter du 15 octobre 2015 dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. D...est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la commune de Maisons sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et à la commune de Maisons.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 juillet 2018.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
J. FRANCFORT
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT02988