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02/07/2018 | FRANCE | N°16NT01663

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 02 juillet 2018, 16NT01663


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 19 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région Centre a rejeté la dépense de 5 250 euros engagée au titre de son activité de dispensateur de formation professionnelle continue, ainsi que la décision du 25 mars 2014 rejetant son recours préalable.

Par un jugement n°1402048 du 24 mars 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et

un mémoire, enregistrés les 23 mai et 24 octobre 2016, M.B..., représenté par MeD..., demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 19 décembre 2013 par laquelle le préfet de la région Centre a rejeté la dépense de 5 250 euros engagée au titre de son activité de dispensateur de formation professionnelle continue, ainsi que la décision du 25 mars 2014 rejetant son recours préalable.

Par un jugement n°1402048 du 24 mars 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 mai et 24 octobre 2016, M.B..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mars 2016 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 mars 2014 par laquelle le préfet de la région Centre a rejeté la dépense de 5 250 euros engagée au titre de son activité de dispensateur de formation professionnelle continue ;

2°) d'annuler la décision du 25 mars 2014 par laquelle le préfet de la région Centre a rejeté la dépense de 5 250 euros engagée au titre de son activité de dispensateur de formation professionnelle continue ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné le moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration a considéré qu'il ne pouvait faire cours le 11 novembre 2011 de 13h30 à 16h30 dans un restaurant parisien, et prendre un train en gare d'Austerlitz à 18h00 ;

- la décision contestée est irrégulière :

• en ce qu'elle a été prise par l'autorité qui a pris la décision initiale du 19 décembre 2013 ; cette autorité ne saurait être regardée comme impartiale ;

• il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet de la région Centre aurait validé une subdélégation au profit de MmeA..., signataire de la décision contestée ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- il n'a pas fait un usage personnel des produits achetés pour son activité ;

- il démontre par la production d'attestations et de feuilles de présence qu'il a été dans l'obligation d'annuler et de reprogrammer des cours ; il n'a pas dispensé de cours le 12 novembre au matin à Paris ;

- le pourcentage d'utilisation personnelle du véhicule à hauteur de 80% n'est pas justifié par l'administration.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 8 février 2018 en vertu d'une ordonnance du 4 janvier 2018.

La ministre du travail a produit des pièces complémentaires le 24 avril 2018 en réponse aux demandes formulées par le magistrat rapporteur les 20 et 23 avril 2018 en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouchardon,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite du contrôle administratif et financier de l'entreprise individuelle " J'apprends la cuisine.com ", réalisé sur le fondement de l'article L. 6361-2 du code du travail par les services de l'Etat au titre des activités de formation professionnelle continue de la société, le préfet de la région Centre a estimé, par décision du 19 décembre 2013, confirmée par décision du 25 mars 2014 prise sur recours administratif préalable obligatoire, que la somme de 5 250 euros, correspondant à la facturation de prestations de formation à hauteur de 3 500 euros, de frais de carburant à hauteur de 561 euros, d'entretien de matériel de transport à hauteur de 432 euros, et de facture d'achats de marchandises à hauteur de 757 euros, ne pouvait être retenue, et en a ordonné le reversement au Trésor public ; que M.B..., en sa qualité de dirigeant de cette enseigne commerciale, relève appel du jugement du 24 mars 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 mars 2014 par laquelle le préfet de la région Centre a rejeté cette dépense de 5 250 euros ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.B..., le tribunal administratif d'Orléans a répondu à l'ensemble des moyens que comportait la demande de première instance ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit dès lors être écarté ;

Sur la légalité de la décision en litige :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 6362-6 du code du travail : " L'intéressé qui entend contester la décision administrative qui lui a été notifiée en application de l'article R. 6362-4, saisit d'une réclamation, préalablement à tout recours pour excès de pouvoir, l'autorité qui a pris la décision. Le rejet total ou partiel de la réclamation fait l'objet d'une décision motivée notifiée à l'intéressé " ;

4. Considérant, d'une part, qu'eu égard aux termes mêmes de ces dispositions, qui ne font pas du recours préalable obligatoire qu'elles prévoient un recours hiérarchique, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait irrégulière pour avoir été prise par l'autorité qui a signé la décision initiale du 19 décembre 2013 ne peut qu'être rejeté ;

5. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., signataire de la décision contestée, bénéficiait d'une subdélégation de signature en date du 15 avril 2013 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) du Centre, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du 19 avril 2013, à l'effet de signer décisions et actes administratifs relevant de la direction, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figure pas la décision contestée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait limité la portée de la subdélégation que le DIRECCTE était habilité à consentir, malgré la possibilité que lui en donnait le 4° de l'article 38 du décret 2004-374 du 29 avril 2014 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...était régulièrement habilitée, par l'effet de la subdélégation du 15 avril 2013, à signer la décision en litige ;

6. Considérant, en second lieu, que la décision contestée vise les dispositions applicables du code du travail ; qu'après avoir exposé que l'entreprise individuelle " J'apprends la cuisine.com " n'était pas en mesure de justifier de l'accomplissement de prestations de formation, de dépenses de frais de carburant, d'entretien de matériel de transport et de facture d'achats de marchandises, elle énonce les sanctions infligées, les irrégularités les justifiant et les sommes en litige ; que la circonstance que la décision fasse état de " supposés stagiaires " sans préciser le sens à donner à cette expression n'est pas de nature à établir une insuffisance de motivation ; que cette décision comporte ainsi l'exposé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ;

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Considérant qu'aux termes du 1° de l'article L. 6361-2 du code du travail, dans sa version applicable à la date de la décision contestée : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur (...) Les activités en matière de formation professionnelle continue conduites par (...) les organismes de formation (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-5 du même code : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle (...) : 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10 " et qu'aux termes de l'article L. 6362-6 dudit code : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement au cocontractant des sommes perçues conformément à l'article L. 6354-1 " ;

8. Considérant qu'en sa qualité d'organisme de formation, l'entreprise individuelle " J'apprends la cuisine.com " était tenue, en application des dispositions de l'article L. 6352-7 du code du travail, de retracer en comptabilité de façon distincte son activité de formation professionnelle continue ; qu'en l'absence de comptabilité distincte, il appartient à M.B..., qui exerce des activités autres que celle de formation continue, d'apporter la preuve que les dépenses concernées ont été effectuées dans le cadre de l'exercice d'une activité conduite en matière de formation professionnelle ;

S'agissant de l'obligation de remboursement de dépenses non rattachables à l'activité de formation :

9. Considérant, d'une part, que le moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration a retenu un taux de 80 % pour ce qui concerne l'utilisation de son véhicule professionnel à des fins personnelles, que le requérant renouvelle en appel sans apporter aucune précision supplémentaire, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 9 de leur décision ;

10. Considérant, d'autre part, que M. B... soutient que c'est à tort que le préfet a refusé le rattachement à son activité de formation professionnelle continue de 20 % des dépenses alimentaires comptabilisées ; que le requérant n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir qu'il n'aurait pas fait une consommation personnelle des dépenses alimentaires utilisées lors de ses activités d'ateliers culinaires, de nature à justifier le taux retenu ; que, dans ces conditions, le requérant n'établit pas que le préfet aurait, à tort, rejeté les dépenses en litige ;

S'agissant de l'obligation de remboursement de sommes perçues au titre de la dispensation de formation professionnelle continue :

11. Considérant que le ministre produit en défense une feuille d'émargement relatant une formation dispensée par M. B...le 12 novembre 2011 au matin pour trois salariés de l'entreprise " Brasserie Royal Villiers " à Paris, lesquels y ont apposé leur signature ; qu'il est par ailleurs constant que l'intéressé a pris un train la veille, 11 novembre 2011, à 18h16, pour une arrivée à Cahors (Lot) à 23h36 ; que, dans ces conditions, en dépit de la circonstance que le requérant produit plusieurs attestations, notamment du directeur général de cet établissement, qui affirme que cette séquence a en réalité été reportée, la réalisation par M. B... de cette formation ne peut être regardée comme établie ; que dès lors, c'est sans commettre d'erreur de fait que le préfet a pu, sur le fondement des dispositions mentionnées au point 8, décider du reversement au Trésor Public des sommes afférentes à ce poste de dépense ; que si M. B...produit des pièces tendant à établir la réalité d'une formation dispensée au sein de la " Brasserie Royal Villiers " à Paris, 4 Place de la Porte de Champerret, le 11 novembre 2011 de 13h30 à 16h30, ces éléments ne sont en tout état de cause pas au nombre des faits retenus par la décision contestée ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat (...) " ; que la présente instance n'ayant pas donné lieu à dépens au sens de l'article susvisé, les conclusions de M. B...tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser les dépens ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais qu'il a exposés pour l'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1 : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée au préfet de la région Centre-Val de Loire.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller.

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2018.

Le rapporteur,

L. BOUCHARDONLe président,

J. FRANCFORT

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°16NT01663


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01663
Date de la décision : 02/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Laurent BOUCHARDON
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELAFA DELAGARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-07-02;16nt01663 ?
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