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15/06/2018 | FRANCE | N°17NT00356

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 juin 2018, 17NT00356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 28 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains a implicitement rejeté sa demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune approuvé par délibération du conseil municipal le 28 janvier 2014.

Par un jugement n° 1500395 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mém

oire, enregistrés le 27 janvier 2017 et le 22 janvier 2018, M. E..., représenté par MeF..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 28 décembre 2014 par laquelle le maire de la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains a implicitement rejeté sa demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune approuvé par délibération du conseil municipal le 28 janvier 2014.

Par un jugement n° 1500395 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 janvier 2017 et le 22 janvier 2018, M. E..., représenté par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 1er décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre à la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains d'abroger la délibération portant approbation du plan local d'urbanisme, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, les dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ne rendent pas irrecevables, à l'appui de conclusions dirigées contre une décision rejetant une demande d'abrogation d'un document d'urbanisme, les moyens tirés des vices de forme ou de procédure dont serait entaché ce document ;

- en l'absence de mention de tout critère ou indicateur permettant de procéder à l'évaluation des résultats de l'application du plan local d'urbanisme, le rapport de présentation est entaché d'insuffisance au regard des dispositions du 5° de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique omet de mentionner, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'environnement, la ou les décisions pouvant être adoptée(s) au terme de l'enquête, les autorités compétentes pour les édicter, les caractéristiques principales du plan ainsi que l'identité des personnes responsables de ce plan ou auprès desquelles des informations peuvent être demandées ;

- le dossier soumis à enquête publique était incomplet, faute de comporter la note de présentation prévue par les dispositions du 2 de l'article R. 123-8 du code de l'environnement et l'indication des textes régissant l'enquête publique, la façon dont celle-ci s'insère dans la procédure, les décisions susceptibles d'être édictées à son issue ainsi que les autorités compétentes pour les prendre, ainsi que le prévoient les dispositions du 3 du même article ;

- les modifications apportées au plan local d'urbanisme à l'issue de l'enquête publique ne procèdent pas des résultats de cette dernière et portent atteinte à l'économie générale du plan local d'urbanisme ;

- le classement de la parcelle cadastrée OB n°51 en zone N et celui de la parcelle OB n° 133 en zone Aa sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 juin 2017 et le 6 février 2018, la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens se rattachant à la légalité externe du plan local d'urbanisme sont irrecevables et, subsidiairement, non fondés ;

- le moyen tiré de la méconnaissance du 5° de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.

Par une lettre du 22 mai 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.

Par un mémoire, enregistré le 24 mai 2018, M. E...a présenté des observations en réponse au moyen d'ordre public.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant M. E...et de MeB..., substituant MeC..., représentant la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains.

1. Considérant que M. E...relève appel du jugement du 1er décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de la décision par laquelle le maire de Saint-Martin-aux-Chartrains a implicitement refusé de convoquer le conseil municipal en vue de l'abrogation du plan local d'urbanisme de cette commune, approuvé par une délibération du conseil municipal du 28 janvier 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les vices de forme et de procédure :

2. Considérant que si, dans le cadre d'un recours dirigé contre le refus opposé à une demande d'abrogation d'un acte réglementaire, la légalité des règles fixées par cet acte, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux ;

3. Considérant qu'il suit de là que M. E...ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à sa demande du 28 décembre 2014 d'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains, approuvé par délibération du conseil municipal le 28 janvier 2014, les irrégularités dont auraient été entachés l'ouverture et le déroulement de l'enquête publique, les modifications apportées à l'issue de l'enquête publique et l'insuffisance du rapport de présentation du plan ;

En ce qui concerne le classement d'une partie de la parcelle OB n° 51 en zone naturelle :

4. Considérant qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de définir, en conséquence, les zones urbaines, normalement constructibles, et les zones dites naturelles dans lesquelles la construction peut être limitée ou interdite ; que s'il résulte de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, alors en vigueur, que le classement en zone naturelle peut concerner des zones à protéger en raison, de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment, du point de vue esthétique, écologique ou historique, un tel classement peut, en vertu du même article, également résulter du caractère d'espaces naturels du secteur considéré ; que l'appréciation à laquelle se livrent les auteurs du plan local d'urbanisme lorsqu'ils classent en zone naturelle un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation, ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts ou est entachée d'erreur manifeste ;

5. Considérant que les auteurs du plan local d'urbanisme de Saint-Martin-aux-Chartrains ont souhaité, d'une part, proportionner l'extension urbaine de la commune aux enjeux démographiques restreints de cette dernière et, d'autre part, " mettre fin à l'urbanisation linéaire et la surconsommation de l'espace ", en privilégiant le développement du tissu urbain du bourg et la densification, limitée aux seules " dents creuses ", des hameaux de " La Gare ", de " L'Eglise " et de " Tout la Ville " ; qu'ils ont, par ailleurs, entendu préserver de l'urbanisation les secteurs présentant un intérêt naturel ou paysager ; qu'il ressort du règlement graphique du plan local d'urbanisme litigieux que la partie haute de la parcelle OB n° 51, partiellement construite et bordant, au nord, la voie autour de laquelle s'est développé le hameau de " Tout la Ville ", a été classée en zone urbaine ; que si la partie basse jouxte à l'ouest des parcelles classées en zone urbaine, elle s'ouvre également, à l'est et au sud, sur de vastes terrains situés en zones naturelle et agricole ; que le classement de cette fraction de la parcelle en zone naturelle traduit le parti, exprimé dans le rapport de présentation, consistant à définir des limites urbaines lisibles et permet de contenir l'étalement urbain tout en favorisant la constitution de secteurs cohérents ; que M. E... n'apporte aucun élément ni même aucune précision au soutien de son allégation selon laquelle cette partie de la parcelle, dont il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas bâtie, ne serait pas à l'état naturel ; que s'il soutient qu'elle ne présente aucune sensibilité particulière d'un point de vue environnemental ni ne présente d'intérêt qui justifierait sa protection, il ressort de la réponse du maire apportée au cours de l'enquête publique aux observations formulées par le requérant, qu'elle présente un enjeu paysager en raison de la co-visibilité depuis la vallée ; que, dans ces conditions, alors même que la parcelle concernée serait desservie par les réseaux et bénéficierait d'une desserte des voies publiques, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché son classement doit être écarté ;

En ce qui concerne le classement de la parcelle OB n° 133 en zone agricole :

6. Considérant que, d'une part, la parcelle cadastrée OB n° 133 dont M. E...est propriétaire est située dans un secteur à vocation agricole ; que si elle est entourée au nord et, de l'autre côté d'une voie, à l'est, de terrains supportant des constructions, il ressort des pièces du dossier que ces terrains, dont la densité de bâti est très faible, ont été classés en zone N ou Nh ; que la seule circonstance qu'ait été délivré un certificat d'urbanisme positif en vue de l'édification d'une maison d'habitation sur une parcelle, de plus faible dimension, contigüe à celle de M. E...ne permet pas de regarder cette dernière comme intégrée à l'espace déjà urbanisé du hameau de " Tout la Ville " ; que, d'autre part, si le requérant soutient que sa parcelle, qui n'est pas exploitée, n'accueille pas le siège d'une exploitation agricole ni ne se situe à proximité d'un tel siège, il ressort des pièces du dossier que ce terrain, non construit est susceptible d'accueillir une activité de pâture et présente, par suite, un potentiel agricole ; qu'ainsi, eu égard à la localisation et aux caractéristiques de la parcelle, et alors même que celle-ci bénéficierait de réseaux et d'une desserte des voies publiques, les auteurs du plan local d'urbanisme ont pu, sans commettre, d'erreur manifeste d'appréciation, l'inclure en zone agricole ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. E...doivent être rejetées ;

Sur les frais liés au litige :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il a lieu, en revanche, de mettre à la charge du requérant le versement à la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains de la somme de 1 500 euros au titre des frais même nature qu'elle a exposés ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : M. E...versera à la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et à la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2018, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

M.A...'hirondel, premier conseiller,

Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 juin 2018.

Le rapporteur,

K. BOUGRINE

Le greffier,

K. BOURON

Le président,

A. PEREZ

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00356
Date de la décision : 15/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : GUEZENNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-15;17nt00356 ?
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