Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 29 juin 2017 par lequel le préfet de la Manche a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par un jugement n° 1701402 du 31 octobre 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 novembre 2017 et 17 mai 2018 M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 31 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Manche du 29 juin 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Manche de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou d'examiner à nouveau sa demande de délivrance d'un tel certificat, dans un délai de deux semaines à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 200 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que :
- le jugement contesté a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire, dès lors que les premiers juges se sont notamment fondés sur le motif tiré de ce qu'il n'était pas établi qu'il résidait depuis plus de dix années en France, alors qu'il ne s'agit pas d'un des motifs de l'arrêté contesté et qu'aucune substitution de motif n'avait été demandée ni aucun moyen d'ordre public soulevé ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dès lors qu'il justifie résider depuis 2005 en France, ce que le préfet n'a jamais contesté ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à son insertion professionnelle et personnelle et à la durée de sa présence sur le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2018, le préfet de la Manche conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés et renvoie à ses écritures produites en première instance.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Massiou a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né en 1984, est entré en France le 28 mars 2005 sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'il a sollicité en 2007 un titre de séjour en raison de son état de santé, qui lui a été délivré pour quelques mois, avant de faire l'objet d'une première mesure d'éloignement par arrêté préfectoral du 3 décembre 2007, qu'il n'a pas mis à exécution ; qu'il a formé deux nouvelles demandes de délivrance d'un titre de séjour en 2012, qui n'ont pas abouti, et a alors fait l'objet d'une deuxième mesure d'éloignement par un arrêt préfectoral du 24 mai 2013, qu'il n'a pas non plus exécuté ; qu'il a de nouveau sollicité en avril 2015 la régularisation de sa situation ; qu'après un avis défavorable rendu le 18 mai 2017 par la commission du titre de séjour, le préfet de la Manche a, par un arrêté du 29 juin 2017, refusé de lui délivrer une carte de résident, pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans ; que M. A...relève appel du jugement du 31 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que M. A...soutient que le jugement attaqué aurait été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire, dès lors que les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait pas prétendre à la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 au motif qu'il ne justifiait pas d'une résidence de dix années en France, alors même qu'il ne s'agit pas d'un des motifs de l'arrêté contesté et qu'aucune substitution de motif n'a été sollicitée en défense ni aucun moyen d'ordre public soulevé à cet égard ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A...a présenté une demande de carte de résident sur le fondement de ces dispositions et s'est prévalu de leur méconnaissance devant le tribunal administratif, auquel il appartenait, par suite, d'examiner si ce moyen était fondé, dès lors notamment que l'arrêté contesté faisait état de ce qu'il ne pouvait pas être fait droit à sa demande à quelque titre que ce soit ; que M. A...n'est, par suite, pas fondé à se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait irrégulier à cet égard ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) " ; que si M. A...a versé en appel des pièces nouvelles permettant d'attester de sa présence en France durant certaines des dix années précédant sa demande de délivrance d'une carte de résident sur ce fondement, l'intéressé n'a produit au titre de l'année 2005 que la copie de son passeport comportant son visa d'entrée en France, et au titre de l'année 2006 une ordonnance médicale datée du mois de février et les résultats d'un scanner datés de décembre ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ;
4. Considérant, en second lieu et pour le surplus, que M. A...se borne à évoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, pas plus que la décision faisant interdiction à l'intéressé de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, laquelle n'est, par ailleurs, pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant, ni insuffisamment motivée ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de la requête à fin d'injonction sous astreinte doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les frais de l'instance :
7. Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A...sollicite le versement à son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Manche.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2018, où siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Le Bris, premier conseiller,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 juin 2018.
Le rapporteur,
B. MassiouLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03549