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08/06/2018 | FRANCE | N°17NT01838

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 08 juin 2018, 17NT01838


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 6 décembre 2016 du préfet de Maine-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pendant un délai de deux ans, d'autre part, de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 18 avril 2016 l'assignant à résidence pour une durée de six mois.

Par des jugements 1610775 et

1605992 du 21 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 6 décembre 2016 du préfet de Maine-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pendant un délai de deux ans, d'autre part, de l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 18 avril 2016 l'assignant à résidence pour une durée de six mois.

Par des jugements 1610775 et 1605992 du 21 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée sous le numéro 17NT01838 le 19 juin 2017, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement 1610775 du tribunal administratif de Nantes du 21 avril 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2016 du préfet de Maine-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en tant qu'il porte refus de titre de séjour, l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, l'arrêté contesté doit être annulé en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en tant qu'il ne lui accorde pas de délai volontaire de départ, l'arrêté contesté doit être annulé en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- en tant qu'il fixe le pays de destination, l'arrêté contesté doit être annulé dès lors que la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 a été méconnue ;

- en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, l'arrêté contesté doit être annulé en ce qu'il n'est pas suffisamment motivé ; il doit être annulé en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; il est entaché d'une erreur d'appréciation et porte atteinte au respect de sa vie privée et familiale ; il est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a reçu aucune information de son signalement aux fins de non admission.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2017, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée sous le numéro 17NT01842 le 19 juin 2017, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement 1605992 du tribunal administratif de Nantes du 21 avril 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 avril 2016 du préfet de Maine-et-Loire l'assignant à résidence pour une durée de six mois ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté portant assignation à résidence est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2017, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 10 et 17 juillet 2017.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B..., né au Congo (Brazzaville) le 30 juin 1979, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 7 mai 2012 démuni de passeport ; que sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 5 septembre 2014 de 1'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par un arrêt du 3 juin 2015 de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il a demandé au préfet de Maine-et-Loire la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 8 octobre 2015, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de faire droit à sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français ; que par un arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 18 avril 2016 M. B...a été assigné à résidence ; que le 26 avril 2016, il a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 6 décembre 2016, la préfète de Maine-et-Loire a pris à son encontre un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé son pays d'origine comme pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ou tout autre pays pour lequel il établit être admissible et a fixé à deux ans l'interdiction de retour en France ; que M. B... relève appel des jugements du 21 avril 2017 par lesquels le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 18 avril 2016 et du 6 décembre 2016 ;

2. Considérant que les requêtes n° 17NT01838 et 17NT01842 sont présentées par le même requérant et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 18 avril 2016 :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté prononçant l'assignation à résidence de M. B...mentionne les considérations de fait et de droit qui le fondent ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;

4. Considérant que si le requérant soutient que l'arrêté attaqué portant assignation à résidence pendant une durée de six mois est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que cette mesure serait incompatible avec son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier que les pathologies dont il souffre seraient incompatibles avec une telle mesure ; que dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 18 avril 2016 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2016 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 6 décembre 2016 que M. B... reprend en appel sans plus de précision ou de justification, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge ;

6. Considérant, en second lieu, que si M. B...est atteint d'hypertension artérielle et souffre de lombalgies, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale qui ne pourrait être assurée dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, par un avis du 21 mai 2015 émis dans le cadre de la demande présentée par le requérant sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé du requérant ne nécessitait aucune prise en charge médicale ; que le requérant, par les deux certificats médicaux qu'il produit, n'établit pas que son état de santé se serait fortement dégradé ; que s'il fait valoir que son traitement est inaccessible dans son pays d'origine, en l'absence d'affiliation à un système de sécurité sociale au Congo et qu'il n'y a ni famille, ni travail, ces éléments ne suffisent pas à établir que l'admission au séjour de l'intéressé répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait par des motifs exceptionnels au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le moyen selon lequel l'arrêté portant refus de titre de séjour serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doit être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des points 5 et 6 du présent arrêt que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

8. Considérant, en second lieu, que M. B...a déclaré, à l'appui de sa demande de reconnaissance du statut de réfugié, avoir des attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent ses enfants nés en 1996, 2001 et 2012 ; qu'à la date de la décision contestée, il n'établit pas vivre en situation de concubinage de façon stable en France ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des points 5 et 6 du présent arrêt que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

10. Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à faire valoir que, compte tenu de son état de santé, le préfet de Maine-et-Loire ne pouvait décider de le priver d'un délai de départ volontaire, M. B...n'établit pas que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant qu'en vertu de leurs termes mêmes, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, aujourd'hui codifiées aux articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre des décisions fixant le pays de destination, dès lors qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer dans ce dernier code l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

12. Considérant, en premier lieu, que, pour prendre à l'encontre du requérant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, la préfète de Maine-et-Loire, après avoir relevé sa présence récente en France, l'absence de liens forts sur le territoire national et le fait qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prononcée à son encontre en 2015, a également indiqué que son comportement constitue une atteinte réelle et manifeste à l'ordre public, qu'il ne respecte pas les valeurs de la République puisqu'il a usé d'une fausse identité en France et a fait de fausses déclarations quant à ses conditions d'entrée ; que, par suite, l'interdiction de retour sur le territoire français comporte les motifs de droit et de fait sur lesquels elle est fondée ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des points 5 et 6 du présent arrêt que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

14. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

15. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que M. B...n'aurait pas été informé de ce que 1'interdiction de retour sur le territoire français entraînait un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen est sans incidence sur la légalité de cette décision ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes ;

Sur le surplus des conclusions :

17. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes 17NT01838 et 17NT01842 de M. B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juin 2018.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT01838 et 17NT01842


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01838
Date de la décision : 08/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : KADDOURI ; KADDOURI ; KADDOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-08;17nt01838 ?
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