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04/06/2018 | FRANCE | N°16NT02002

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 04 juin 2018, 16NT02002


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif " Amiante Tréfimétaux " a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a implicitement rejeté sa demande d'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Par un jugement n°1501889 du 19 avril 2016, le tribunal

administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le collectif " Amiante Tréfimétaux " a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a implicitement rejeté sa demande d'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Par un jugement n°1501889 du 19 avril 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 juin 2016 et le 10 mars 2017, le collectif " Amiante Tréfimétaux ", représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 19 avril 2016 ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a implicitement rejeté sa demande d'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de statuer à nouveau sur la demande d'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des sites visés par l'article 41 de la loi du 23 décembre 2008 et ce dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'existence de circonstances de fait nouvelles telles que l'augmentation des maladies professionnelles justifie l'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

- le tribunal administratif et le ministre ont commis une erreur de qualification juridique en estimant que les activités exercées au sein de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer, entrant dans le champ d'application de l'article 41 de la loi n° 98- 11 94 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, ne présentaient pas un caractère significatif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2016, la société par actions simplifiée (SAS) Tréfimétaux, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du collectif " Amiante Tréfimétaux " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, il n'est pas démontré que le tribunal ait été saisi en l'état d'une délibération régulière prise en conformité avec les statuts de l'association, le collectif " Amiante Tréfimétaux " ne justifie pas de sa qualité et de son intérêt pour agir, la requête du collectif méconnait le principe de sécurité juridique et l'autorité absolue de la chose jugée ;

- les moyens soulevés par le collectif " Amiante Tréfimétaux " ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 10 janvier 2017, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le collectif " Amiante Tréfimétaux " ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 10 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, notamment son article 41 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- les observations de MeA..., représentant la société Tréfimétaux.

Considérant ce qui suit :

Sur la procédure antérieure :

1. Par un jugement du 27 juin 2006, le tribunal administratif de Caen a annulé une première décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 7 juin 2005 refusant d'inscrire l'établissement de la société Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements prévue par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et a enjoint au ministre de procéder à un nouvel examen de la demande dont il se trouvait saisi par l'effet de cette annulation. A la suite de cet examen, le ministre a refusé de nouveau, le 24 octobre 2006, de procéder à l'inscription demandée au motif que l'activité accessoire de calorifugeage pratiquée au sein de l'établissement ne présentait pas un caractère significatif. Par une ordonnance du 21 décembre 2006, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a suspendu l'exécution de la décision du 24 octobre 2006 et enjoint au ministre de prendre une nouvelle décision. Par un arrêté du 7 mars 2007, le ministre du travail a décidé d'inscrire l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998. Par deux jugements du 5 février 2008, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 24 octobre 2006 de refus d'inscription et rejeté la requête de la SAS Tréfimétaux (ex-KME France), venant aux droits de la société Tréfimétaux, tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2007. Par un arrêt du 30 octobre 2008, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du tribunal administratif du 5 février 2008 ainsi que l'arrêté du 7 mars 2007 inscrivant l'établissement sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998.

2. Par une décision du 23 décembre 2010, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel, les deux jugements du tribunal administratif du 5 février 2008 ainsi que l'arrêté du 7 mars 2007 au motif que si des opérations de calorifugeage à l'amiante ont été régulièrement effectuées au sein de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer jusqu'à sa fermeture en 1986, en particulier pour l'isolation des fours, ces opérations ne peuvent être regardées comme ayant représenté, au cours de cette période, une part significative de l'activité de l'établissement, le degré d'exposition des salariés aux poussières d'amiante et l'existence de maladies professionnelles liées à l'amiante recensées dans un établissement n'étant pas, en outre, par eux-mêmes, de nature à justifier légalement l'inscription de cet établissement sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998. Par courrier du 31 mars 2015, le collectif " Amiante Tréfimétaux " a de nouveau sollicité l'inscription de l'établissement Tréfimétaux de Dives-sur-Mer sur la liste des établissements ouvrant droit à la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par l'administration le 31 mai 2015. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande d'annulation de la décision implicite du ministre.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 : " I.-Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ; (....) ". Il résulte de ces dispositions que peuvent seuls être légalement inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante ou de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements.

4. La circonstance, à la supposer avérée, que 300 anciens salariés depuis 2007 auraient contracté une maladie professionnelle liée à l'amiante sur un effectif total de 900 salariés de l'établissement en 1983-1984 n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation du Conseil d'Etat dans sa décision du 23 décembre 2010, selon laquelle les opérations de calorifugeage à l'amiante ne pouvaient être regardées comme ayant représenté, au cours de la période considérée, une part significative de l'activité de l'établissement. Le degré d'exposition des salariés aux poussières d'amiante et l'existence de maladies professionnelles liées à l'amiante recensées dans un établissement ne sont pas, par eux mêmes, susceptibles de justifier légalement l'inscription de cet établissement sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998. Contrairement à ce qui est allégué par les requérants, le Conseil d'Etat, en rappelant que la situation de l'établissement devait être appréciée au regard de l'ensemble des activités exposant à l'amiante concernées par les dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, s'est prononcé sur l'ensemble des opérations susceptibles d'exposer les salariés au risque considéré. Si le collectif invoque l'existence d'une activité de fabrication de matériaux contenant de l'amiante non prise en compte par le Conseil d'Etat, il n'apporte aucun élément probant justifiant l'existence d'une telle activité au sein de l'établissement. Dans ces conditions, la demande du 31 mars 2015 du collectif " Amiante Tréfimétaux ne comporte aucun élément de droit ou de fait nouveau de nature à remettre en cause l'autorité de la chose jugée revêtue par la décision du Conseil d'Etat du 23 décembre 2010 et la requête du collectif " Amiante Tréfimétaux " doit être rejetée comme irrecevable.

5. Il résulte de ce qui précède que le collectif " Amiante Tréfimétaux " n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le collectif " Amiante Tréfimétaux " demande au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du collectif " Amiante Tréfimétaux " la somme réclamée par la SAS Tréfimétaux au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête du collectif " Amiante Tréfimétaux " est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SAS Tréfimétaux sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au collectif " Amiante Tréfimétaux ", à la SAS Tréfimétaux et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juin 2018.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

J. FRANCFORT

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°16NT02002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02002
Date de la décision : 04/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : LABRUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-04;16nt02002 ?
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