Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, et des cotisations d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 et 2011 et de contribution sur les hauts revenus au titre de l'année 2011.
Par un jugement n° 1403844 du 30 novembre 2016, le tribunal administratif de Rennes a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009 (article 1er) et a rejeté le surplus de ses conclusions (article 2).
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 février 2017, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration a regardé son activité de joueur de poker comme professionnelle, en a imposé le bénéfice en application de l'article 92 du code général des impôts et a, faute de déclaration de cette activité, appliqué la majoration de 80% pour activité occulte prévue par l'article 1728 du code général des impôts par une application rétroactive des définitions d'activité professionnelle effectuées par la réponse ministérielle. Filipetti Assemblée nationale 15 novembre 2011 p. 12011 n° 110952 et l'instruction BOI-BNC-CHAMP-10-30-40 n° 20 du 12 septembre 2012 alors que l'application de la réponse ministérielle Crépeau Assemblée nationale 3 octobre 1979 p. 7697 n° 16515, de la documentation 5 G 116 n° 118 du 15 septembre 2000 et de l'instruction BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-40 n° 400 du 3 février 2016 n'auraient pas abouti à une telle imposition ;
- en tout état de cause, le service n'a pas pris en compte les dépenses, d'un montant de 56 887 euros, au titre de l'année 2011, liées à trois accords de rétrocession de recettes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour M. C...a été enregistré le 16 avril 2018 après clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Geffray,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... a été imposé à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, en application de l'article 92 du code général des impôts, au titre des années 2009 à 2011, ainsi qu'à la contribution sur les hauts revenus au titre de cette dernière année sur les bénéfices imposables de son activité de joueur de poker. Ces impositions ont été assorties de l'intérêt de retard et de la pénalité pour activité occulte prévue à l'article 1728 du code général des impôts et mises en recouvrement le 31 décembre 2013. Saisi du rejet de sa réclamation portant sur l'ensemble de ces impositions, le tribunal administratif de Rennes, à l'article 1er de son jugement du 30 novembre 2016, a déchargé M.C..., en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009 et, à son article 2, a rejeté le surplus de sa demande. M. C...relève appel de l'article 2 de ce jugement et demande la décharge des impositions en litige, à savoir, d'une part, la cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, soit la somme de 9 389 euros en droits et 8 550 euros en intérêts de retard et pénalités, d'autre part, les cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution sur les hauts revenus au titre de l'année 2011, soit les sommes de 113 449 euros en droits et 94 181 euros en intérêts de retard et pénalités.
Sur le caractère de revenu imposable des gains et le caractère occulte de l'activité :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. ".
3. Si le jeu de poker fait intervenir des distributions aléatoires de cartes, un joueur peut parvenir, grâce à l'expérience, la compétence, l'habileté et la stratégie dans la pratique de ce jeu, à atténuer notablement le caractère aléatoire du résultat et à accroître de façon sensible sa probabilité de percevoir des gains importants et réguliers. Par suite, dès lors qu'une personne se livre à une pratique habituelle de ce jeu dans l'intention d'en tirer des bénéfices, ceux-ci doivent être regardés comme tirés d'une occupation lucrative ou d'une source de profits, au sens des dispositions de l'article 92 du code général des impôts, et imposables en application de cet article.
4. M. C... a participé en 2010 et 2011 respectivement à treize et onze tournois de poker en France et à l'étranger, où il s'est classé à plusieurs reprises dans les premières places. Il a par ailleurs régulièrement pratiqué le poker sur des sites de jeu en ligne. Les gains réalisés par M. C... à raison de cette pratique se sont élevés à 72 380 euros en 2010 et à 292 016 euros en 2011. Enfin, M. C...a bénéficié d'une notoriété dans le domaine de ce jeu, ainsi qu'en atteste son référencement sur plusieurs sites d'internet. Par suite, eu égard au caractère habituel de cette activité génératrice de revenus importants, M. C... doit être regardé comme ayant exercé, au cours des années 2010 et 2011, une activité lucrative de joueur de poker lui procurant des profits réguliers imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application de l'article 92 du code général des impôts. De même son activité étant restée occulte, les impositions ont été à bon droit majorées de la pénalité pour activité occulte prévue par l'article 1728 du même code.
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :
5. Il résulte de ce qui précède, s'agissant de l'application de la loi fiscale, que M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'administration a fait une application rétroactive des définitions d'activité professionnelle effectuées par la réponse ministérielle Filipetti Assemblée nationale 15 novembre 2011 p. 12011 n° 110952 et l'instruction BOI-BNC-CHAMP-10-30-40 n° 20 du 12 septembre 2012. Il n'est pas plus fondé à se prévaloir des interprétations administratives de la loi fiscale, qui ne sont pas différentes de celle du présent arrêt, contenues dans la réponse ministérielle Crépeau Assemblée nationale 3 octobre 1979 p. 7697 n° 16515, la documentation 5 G 116 n° 118 du 15 septembre 2000. Enfin il ne peut utilement invoquer l'instruction BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-40 n° 400 du 3 février 2016, en tout état de cause postérieure au délai de déclaration des impositions.
Sur le montant des bases imposables :
6. Pour contester le montant des bases imposables, le requérant soutient que l'administration fiscale n'a pas tenu compte des versements effectués au profit de trois autres joueurs à l'issue de tournois ayant eu lieu à Deauville et à San Remo en 2011 et constituant selon lui des charges déductibles. Toutefois, si M. C...verse trois attestations de bénéficiaires de rétrocessions de gains obtenus lors de ces tournois, ces attestations compte tenu de leurs incohérences ne sont pas probantes. Par ailleurs, il ne produit aucun autre document permettant d'établir la réalité et la date de versements ayant la nature de dépenses nécessitées par son activité de joueur de poker.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 19 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 mai 2018.
Le rapporteur,
J.-E. GeffrayLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00472