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14/05/2018 | FRANCE | N°17NT03853

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 14 mai 2018, 17NT03853


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Evancia (Babilou) a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler le marché attribué le 14 décembre 2015 par le centre communal d'action sociale (CCAS) de Saint-Malo à la société La Maison Bleue ayant pour objet la réservation, pendant quatre ans maximum, de vingt places en crèche au sein d'une structure de gestion privée, et d'autre part, de condamner le CCAS de Saint-Malo à lui verser la somme de 156 835 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de chan

ce de se voir attribuer ce marché.

Par un jugement n° 1601033 et 1602925 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Evancia (Babilou) a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler le marché attribué le 14 décembre 2015 par le centre communal d'action sociale (CCAS) de Saint-Malo à la société La Maison Bleue ayant pour objet la réservation, pendant quatre ans maximum, de vingt places en crèche au sein d'une structure de gestion privée, et d'autre part, de condamner le CCAS de Saint-Malo à lui verser la somme de 156 835 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de chance de se voir attribuer ce marché.

Par un jugement n° 1601033 et 1602925 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a résilié, à compter du 1er juillet 2018, ce marché signé le 14 décembre 2015 entre le CCAS de Saint Malo et la société La Maison Bleue.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et deux mémoires, enregistrés sous le n° 17NT03853 les 19 décembre 2017, 28 décembre 2017 et 23 février 2018, le centre communal d'action sociale de Saint Malo, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution de ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 ;

2°) de mettre à la charge de la société Evancia la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le sursis à exécution du jugement doit être prononcé sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, en raison des moyens sérieux de nature à entraîner l'annulation de ce jugement ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, le budget affecté à l'alimentation était un élément objectif et intelligible, qui pouvait être pris en compte, parmi dix éléments d'analyse, pour noter le sous critère relatif au projet d'établissement ;

- les premiers juges ont outrepassé le caractère de leur office restreint à l'appréciation de la pertinence d'un critère ou sous-critère ;

- la neutralisation de l'élément d'analyse critiqué par la société Evancia ne permettait pas de déduire qu'elle aurait dû se voir attribuer le marché, de sorte que l'irrégularité constatée ne devait pas conduire à la résiliation du marché.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2018, la société Evancia conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge du CCAS de Saint-Malo en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu la requête no 17NT03847 présentée par le CCAS de Saint Malo tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 17NT03955 le 22 décembre 2017 et le 17 avril 2018, la société La Maison Bleue, représentée par Me Drain, demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du même jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 ;

2°) de mettre à la charge de la société Evancia la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le sursis à exécution du jugement doit être prononcé sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative car l'exécution du jugement l'expose à la perte définitive d'un chiffre d'affaires de 452 000 euros HT ;

- il doit également être prononcé sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative en raison des conséquences difficilement réparables et des moyens sérieux invoqués ;

- le budget alimentation proposé par chaque candidat constitue un élément objectif d'appréciation de l'offre, lié à l'objet du contrat et il n'est pas le seul élément à avoir été pris en compte pour noter le sous-critère relatif à la qualité de l'établissement ;

- l'irrégularité constatée n'impliquait pas la résiliation du contrat car elle permettait la poursuite de son exécution.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2018, la société Evancia conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société La Maison Bleue en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu la requête no 17NT03800 présentée par la société La Maison Bleue tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me Minescaut, avocat du CCAS de Saint-Malo, celles de Me Drain, avocat de la société La Maison Bleue, et celles de Me Benard, avocat de la société Evancia.

1. Considérant que les requêtes n° 17NT03853 et 17NT03955 présentées par le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue tendent au sursis à exécution du même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, le 16 juin 2015, le centre communal d'action sociale (CCAS) de Saint-Malo a engagé une consultation, selon la procédure adaptée prévue aux articles 28 et 30 du code des marchés publics, pour un marché relatif à la réservation, pendant quatre ans maximum, de vingt places en crèche pour l'accueil collectif d'enfants âgés de dix semaines à six ans ; que le 14 décembre 2015, le marché a été attribué à la société La Maison Bleue ; qu'à la demande de la société Evancia, dont l'offre, classée deuxième, a été rejetée, le tribunal administratif de Rennes a, par un jugement du 23 novembre 2017, prononcé la résiliation à compter du 1er juillet 2018 du marché conclu entre le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue ; que le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue demandent le sursis à exécution de ce jugement ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-14 du code de justice administrative : " Sauf dispositions particulières, le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel (...) " ; que selon l'article R. 811-17 du code de justice administrative, dans les cas autres que ceux prévus aux articles R. 811-15 et R. 811-16, relatifs au sursis à exécution, respectivement, d'un jugement annulant une décision administrative et d'un jugement prononçant une condamnation, " le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction " ;

4. Considérant, d'une part, que l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 qui prononce la résiliation, à compter du 1er juillet 2018, du contrat signé le 14 décembre 2015 entre le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue aura pour conséquence le lancement d'une nouvelle procédure de passation puis la signature d'un nouveau contrat pour la réservation de vingt places en crèche ; que si la société La Maison Bleue n'est pas l'attributaire de ce nouveau contrat, ce qui ne peut se présumer, cette résiliation aura ainsi pour elle des conséquences difficilement réparables ; que, par suite, la société La Maison Bleue est fondée à soutenir que l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

5. Considérant, d'autre part, que le jugement du 23 novembre 2017 prononce la résiliation du contrat signé le 14 décembre 2015 en raison d'une irrégularité de la procédure de passation tenant à ce que, pour l'appréciation du sous-critère du projet d'établissement, en fondant l'évaluation des prestations d'alimentation destinées aux enfants sur le seul montant du budget alimentaire, le pouvoir adjudicateur avait retenu un élément d'analyse dépourvu à lui seul de pertinence ; que le moyen tiré de ce que le pouvoir adjudicateur pouvait, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, pour apprécier les projets complémentaires du projet d'établissement, prendre en compte, avec le mode de confection des repas et les évènements autour de la nourriture et du goût, le montant du budget consacré à l'alimentation, paraît sérieux en l'état de l'instruction ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, qu'il y a lieu d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017 en application des dispositions précitées de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:

7. Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société Evancia au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

8. Considérant, d'autre part, que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au même titre par le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue ;

DECIDE :

Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les requêtes formées respectivement par le CCAS de Saint-Malo et la société La Maison Bleue contre le jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 novembre 2017, il sera sursis à l'exécution de l'article 1er de ce jugement.

Article 2 : Les conclusions présentées par le CCAS de Saint-Malo, la société La Maison Bleue et la société Evancia sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre communal d'action sociale de Saint-Malo, à la société La Maison Bleue et à la société Evancia.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mai 2018.

La rapporteure,

S. RIMEULe président,

L. LAINÉ

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT03853 et 17NT03955


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT03853
Date de la décision : 14/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : CABINET COUDRAY CONSEIL et CONTENTIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-05-14;17nt03853 ?
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