Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, la décision du 31 octobre 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur, saisi sur recours hiérarchique, a confirmé la décision du sous-préfet de L'Haÿ-les-Roses du 18 mars 2014 rejetant sa demande de naturalisation et, d'autre part, cette décision préfectorale.
Par un jugement n° 1410906 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 31 octobre 2014, a enjoint au ministre de procéder au réexamen de la demande de M.C..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus de la requête.
Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 8 juin 2017, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 avril 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient que :
contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nantes, la décision litigieuse n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des liens que M. C...a conservé avec son pays d'origine ;
les autres moyens invoqués par M. C...en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2017, M. B...C..., représenté par MeD..., conclut au rejet du recours et ce que l'Etat lui verse la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
le code civil ;
le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié ;
le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 31 octobre 2014 rejetant la demande de naturalisation formée par M.C... ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les liens particuliers unissant le postulant à un Etat ou une autorité publique étrangère ;
3. Considérant que pour rejeter par la décision contestée, annulée par les premiers juges, la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M.C..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur la circonstance que le loyalisme du postulant envers la France et ses institutions n'était pas garanti dès lors qu'il a été employé par l'antenne parisienne de l'Organisation pour la Libération de la Palestine, puis par la Délégation Générale de Palestine et qu'il tirait toujours, à la date de cette décision, sa principale source de revenus d'une puissance étrangère ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., qui est né le 25 mai 1943 et est de nationalité jordanienne, réside habituellement en France depuis 1971 ; qu'il a exercé auprès de la délégation générale de Palestine à Paris les fonctions de chargé des affaires culturelles à compter du 1er octobre 1979, puis celles de délégué permanent adjoint à compter de janvier 2001 ; qu'il a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juillet 2008 et perçoit, depuis, une pension de retraite qui lui est versée par l'Organisation de la libération de la Palestine - Fonds national palestinien ; que le montant de cette retraite s'élevait à la somme de 2 500 dollars américains à la date de la décision querellée ; qu'il n'est pas contesté que cette pension de retraite constitue les revenus essentiels du postulant ; que, dans ces conditions, et alors même que M. C...est à la retraite et qu'il s'acquitte de ses impôts en France, la circonstance que ses revenus proviennent essentiellement d'une autorité étrangère révèle un lien particulier unissant encore le requérant à cette autorité ; que le ministre a pu ainsi estimer, sans erreur manifeste d'appréciation, que ce lien particulier conservé avec le pays d'origine n'était pas, en l'espèce, compatible avec l'allégeance française ; que, par suite, c'est à tort que pour annuler la décision du ministre du 31 octobre 2014, les premiers juges se sont fondés sur ce qu'elle était entachée d'une telle erreur ;
5. Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif ;
6. Considérant, en premier lieu, que M. C...ne saurait utilement soutenir qu'il remplit les conditions de recevabilité requises pour acquérir la nationalité française, et en particulier celles prévues aux articles 21-16 et 21-17 du code civil, dès lors que la décision litigieuse a été prise, non sur le fondement de ces dispositions, mais sur celles de l'article 48 du décret précité du 30 décembre 1993 ;
7. Considérant, en second lieu, que les circonstances que M. C...séjourne en France depuis 1971 où vivent ses deux enfants de nationalité française, qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il est attaché aux valeurs de la République et qu'il est en règle avec l'administration fiscale sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée eu égard au motif sur laquelle elle est fondée ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 31 octobre 2014 ;
Sur les frais liés au litige :
9. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. C... une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 avril 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. C...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. B...C....
Délibéré après l'audience du 17 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Phémolant, présidente de la Cour,
- M. Degommier, président-assesseur,
- M.A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 mai 2018.
Le rapporteur,
M. E...La présidente de la Cour,
B. PHÉMOLANT
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01753