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27/04/2018 | FRANCE | N°16NT03165

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 27 avril 2018, 16NT03165


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, la Sarl Le Duguesclin et la Sarl Théodolite ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération n° 7 du 9 juillet 2013, par laquelle le conseil municipal de la commune de Saint-Brieuc a approuvé la modification de la convention d'amodiation de 52 places de stationnement conclue le 23 mai 2011 entre la commune et la société Ferré Hôtels.

Par un jugement n° 1303214 du 13 juillet 2016, le tribunal admin

istratif de Rennes a annulé cette délibération du 9 juillet 2013.

Procédure deva...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, la Sarl Le Duguesclin et la Sarl Théodolite ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération n° 7 du 9 juillet 2013, par laquelle le conseil municipal de la commune de Saint-Brieuc a approuvé la modification de la convention d'amodiation de 52 places de stationnement conclue le 23 mai 2011 entre la commune et la société Ferré Hôtels.

Par un jugement n° 1303214 du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé cette délibération du 9 juillet 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 septembre 2016, la commune de Saint-Brieuc, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 13 juillet 2016 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, la Sarl Duguesclin et la Sarl Théodolite devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge de l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, de la Sarl Duguesclin et de la Sarl Théodolite respectivement la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le nouveau tarif fixé par la délibération litigieuse ne constitue pas une aide économique contraire aux dispositions de l'article L. 1511-3 alinéa 1 du code général des collectivités territoriales ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que les dispositions de l'article L. 1511-3 du code général des collectivités territoriales excluaient toute autre forme d'aide de même nature.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2017, l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, la Sarl Dugesclin et la Sarl Théodolite concluent au rejet de la requête et demandent que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Brieuc, au profit de chacune d'elles, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- la délibération n°7 du 9 juillet 2013 méconnaît le principe d'égalité entre les usagers.

Par une ordonnance du 6 mars 2018, prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 mars 2018 à 12 :00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public.

1. Considérant que, dans le cadre du projet de rénovation du quartier de la gare, la commune de Saint-Brieuc a construit un parc de stationnement, appelé " Gare-Charner ", d'une capacité de 308 places, qu'elle exploite en régie ; qu'elle a également cédé à la société Ferré Hôtels, le 31 octobre 2012, un ensemble immobilier à rénover, situé " Espace Charner ", en vue de la construction et de l'exploitation d'un hôtel trois étoiles, d'un hôtel économique et d'un restaurant ; que, par une convention d'amodiation signée le 23 mai 2011, la commune de Saint-Brieuc a mis à la disposition de la société Ferré Hôtels 52 places de stationnement dans le parking " Gare-Charner ", pour une durée de 30 ans et moyennant une redevance forfaitaire de 267 000 euros et une redevance annuelle d'entretien de 12 700 euros ; qu'en raison de la dégradation du contexte économique et des surcoûts rencontrés dans le cadre de l'opération de réhabilitation menée par la société Ferré Hôtels, le conseil municipal de Saint-Brieuc a, par une délibération du 9 juillet 2013, approuvé une modification de la convention d'amodiation signée le 23 mai 2011, conduisant à mettre à disposition 55 places de stationnement, dont 37 vingt-quatre heures sur vingt-quatre et 18 seulement entre 18h00 et 9h00, pour une redevance totale de 120 000 euros pour trente ans incluant la redevance annuelle d'entretien du parking ; que par un jugement du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Rennes a, à la demande de l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie des Côtes d'Armor, de la Sarl Duguesclin et de la Sarl Théodolite, annulé cette délibération du 9 juillet 2013 ; que la commune de Saint-Brieuc relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la délibération du 9 juillet 2013 :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2251-2 du code général des collectivités territoriales : " Lorsque l'intervention de la commune a pour objet de favoriser le développement économique, elle peut accorder des aides dans les conditions prévues par le titre Ier du livre V de la première partie et à l'article L. 2253-1. " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 1511-2 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Les aides accordées par les collectivités territoriales ou leurs groupements au titre du présent article et de l'article L. 1511-3 ont pour objet la création ou l'extension d'activités économiques. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1511-3 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le montant des aides que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer, seuls ou conjointement, sous forme de subventions, de rabais sur le prix de vente, de location ou de location-vente de terrains nus ou aménagés ou de bâtiments neufs ou rénovés est calculé par référence aux conditions du marché, selon des règles de plafond et de zone déterminées par décret en Conseil d'Etat. Ces aides donnent lieu à l'établissement d'une convention et sont versées soit directement à l'entreprise bénéficiaire, soit au maître d'ouvrage, public ou privé, qui en fait alors bénéficier intégralement l'entreprise. " ; que les modalités d'intervention ainsi définies sont, en l'absence de toute habilitation législative donnée aux collectivités locales, exclusives de toute autre forme d'aide de même nature ; que la faculté pour une commune d'octroyer des aides à des personnes privées poursuivant un but lucratif doit s'exercer conformément aux principes définis par les articles L. 1511-1 et suivants du code général des collectivités territoriales qui précisent notamment que les aides au développement économique accordées par les communes peuvent intervenir soit en complément d'une aide décidée par le conseil régional ou à tout le moins octroyée avec son accord, soit dans le cadre d'une aide à l'immobilier d'entreprise ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'avenant à la convention d'amodiation signée le 23 mai 2011, dont la signature est autorisée par la délibération litigieuse, diminue le montant de la redevance totale versée par la société Ferré Hôtels à la commune de Saint-Brieuc pour la mise à disposition de places de parking de 528 000 euros ; que si cet avenant prévoit également que seules 37 des 55 places mises à disposition de la société Ferré Hôtels le seront 24 heures sur 24, les 18 places restantes n'étant mises à disposition que la nuit, le prix moyen annuel d'une place de stationnement représente moins du quart du prix fixé dans la convention initiale ; que la délibération litigieuse indique elle-même que ce rabais vise à compenser le mauvais contexte économique et les surcoûts des travaux de rénovation auxquels était confrontée la société Ferré Hôtels ; que dans ces conditions, ce rabais constitue une aide accordée à cette société ; qu'il est constant que celle-ci n'a été accordée ni en complément ou avec l'accord du conseil régional, dans les conditions fixées par l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales, ni, dès lors que la commune ne justifie pas remplir les conditions de plafond et de zonage applicables, dans le cadre de l'aide à l'immobilier d'entreprise prévue par les dispositions de l'article L. 1511-3 du même code ; qu'il suit de là, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Rennes, que l'aide accordée par la délibération litigieuse n'entre pas dans le cadre légal fixé par les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, qui ainsi qu'il a été dit au point 2, constitue le seul cadre légal d'intervention économique des collectivités locales ;

4. Considérant, d'autre part, que la commune de Saint-Brieuc invoque la possibilité pour une collectivité de céder un bien à une personne privée à un prix inférieur à sa valeur lorsque cette cession est justifiée par des motifs d'intérêt général et comporte des contreparties suffisantes ; que cependant, et en tout état de cause, s'il ressort des pièces du dossier que l'opération de rénovation du bâtiment cédé à la société Ferré Hôtels en vue de l'ouverture notamment d'un hôtel haut de gamme et du développement économique du quartier de la gare et plus largement de la commune présente un caractère d'intérêt général, la délibération litigieuse, qui modifie la convention d'amodiation signée dans le cadre de cette opération de cession sans que cette opération soit en elle-même remise en cause et sans nouvelle contrepartie pour la commune, ne peut légalement s'inscrire dans le cadre de cette dérogation au principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Brieuc n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération de son conseil municipal du 9 juillet 2013 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la commune de Saint-Brieuc, partie perdante ;

7. Considérant en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune de Saint-Brieuc la somme de 500 euros chacune au titre des frais exposés par l'Union des métiers et des industries des Côtes d'Armor, la Sarl Duguesclin et la Sarl Théodolite et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Brieuc est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Brieuc versera 500 euros à l'Union des métiers et des industries des Côtes d'Armor, 500 euros à la Sarl Duguesclin et 500 euros à la Sarl Théodolite au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Brieuc, à l'Union des métiers et des industries des Côtes d'Armor, à la Sarl Duguesclin et à la Sarl Théodolite.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 avril 2018.

Le rapporteur,

S. RIMEULa présidente,

N. TIGER-WINTERHALTER

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne préfet des Côtes d'Armor en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT03165


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03165
Date de la décision : 27/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-04-27;16nt03165 ?
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