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16/04/2018 | FRANCE | N°17NT00511

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 16 avril 2018, 17NT00511


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 11 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 29 janvier 2014 portant refus d'autorisation de son licenciement pour motif économique collectif et a autorisé son licenciement.

Par un jugement n°1403965 du 9 décembre 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par u

ne requête et un mémoire, enregistrés les 9 et 27 février 2017, MmeD..., représentée par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 11 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 29 janvier 2014 portant refus d'autorisation de son licenciement pour motif économique collectif et a autorisé son licenciement.

Par un jugement n°1403965 du 9 décembre 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 et 27 février 2017, MmeD..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 11 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 29 janvier 2014 portant refus d'autorisation de son licenciement pour motif économique collectif et a autorisé son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cause économique du licenciement n'est pas avérée au niveau du groupe " GAD/PRESTOR/CECAB ", en méconnaissance de l'article L.1233-2 du code du travail ;

- la SAS (société par actions simplifiée) GAD n'a pas respecté son obligation de reclassement prévue par l'article L.1233-4 du code du travail ;

* elle a mis en place une bourse de l'emploi, qui constitue une pratique illégale, sans avoir communiqué au préalable aux différentes entités du groupe tant en France qu'à l'étranger les profils professionnels de chacun des salariés ;

* l'employeur lui a adressé une simple invitation à postuler sur les emplois communiqués en indiquant de surcroît une préférence ;

- la SAS GAD n'a pas respecté son obligation conventionnelle de reclassement, telle que définie par l'accord national interprofessionnel du 10 févier 1969 relatif à la sécurité de l'emploi qui crée une obligation de reclassement externe préalable au licenciement dans le cadre du secteur d'activité de l'entreprise :

* l'employeur devait de rechercher les possibilités de reclassement dans le secteur d'activité en cause et saisir de manière utile la commission paritaire nationale de l'emploi de l'industrie des commerces en gros des viandes (CNPE).

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2017, la SAS GAD, agissant par son liquidateur judiciaire Me E..., la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) " Ajire " et la société civile professionnelle (SCP) " F...Perdereau-Manière El Baze ", en la personne de Me B...et de MeF..., en qualité d'administrateurs judiciaires, concluent au rejet de la requête.

Elles soutiennent que :

- la Selarl " Ajire " et la SCP "F...Perdereau-Manière El Baze ", en leur qualité d'administrateurs judiciaires du plan de continuation d'activité de la SAS GAD, doivent être mis hors de cause dans la présente instance ;

- les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2017, la ministre du travail conclut au rejet de la requête ;

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...relève appel du jugement du 9 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 29 janvier 2014 portant refus d'autorisation de son licenciement pour motif économique collectif et a autorisé son licenciement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié.

3. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 631-17 du code de commerce que, dès lors qu'un licenciement a été autorisé par un jugement du tribunal de commerce, la réalité des difficultés économiques de l'entreprise et la nécessité des suppressions de postes ne peuvent être contestées qu'en exerçant les voies de recours ouvertes contre ce jugement et ne peuvent être discutées utilement devant l'administration.

4. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de licenciement de la requérante est intervenue à la suite de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la SAS GAD par un jugement du tribunal de commerce de Rennes du 27 février 2013. La mise en place d'un plan de continuation autorisant le licenciement pour motif économique de 889 salariés a été validée par un jugement du même tribunal en date du 11 octobre 2013. Dans ces conditions, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Mme D...ne saurait utilement soutenir que le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, qui est tenu par l'appréciation portée par le tribunal de commerce sur l'existence du motif économique, n'aurait pas examiné les difficultés de l'entreprise au niveau du groupe auquel elle appartient.

5. En deuxième lieu, pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu, à ce titre, comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.

6. Il ressort des pièces du dossier que la SAS GAD a défini une stratégie globale en plusieurs étapes afin de répondre à son obligation de reclassement des salariés dont le licenciement était envisagé. Elle a, à cette fin, recensé l'ensemble des postes disponibles dans les catégories professionnelles auxquelles appartenaient les salariés concernés au sein de chacune des sociétés du groupe CECAB sous la forme d'une " bourse de l'emploi ", procédé qui, par lui-même, n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail. Dans le but d'affiner ses propositions de reclassement et de procéder à une recherche de reclassement personnalisée, elle a ensuite invité, le 10 septembre 2013 et le 9 octobre 2013, Mme D...à lui faire part des formations qu'elle avait suivies, des compétences particulières dont elle disposait, ainsi que de son itinéraire professionnel antérieur via un questionnaire de recueil de parcours professionnel ainsi que d'un questionnaire relatif à la mobilité à l'international. Il n'est pas contesté que la requérante n'a pas répondu à ces demandes d'informations. Malgré cette omission, Mme D...s'est vue proposer 62 postes de reclassement correspondant à sa catégorie professionnelle d'ouvrière spécialisée. Contrairement à ce qui est allégué, ces offres auxquelles la requérante n'a pas donné suite, ne constituaient pas de simples " invitation à postuler ", mais des propositions de reclassement fermes. Dans ces conditions, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la SAS GAD n'a pas procédé à des recherches loyales, sérieuses et personnalisées de reclassement.

7. En troisième lieu, il n'est pas contesté que la SAS GAD a saisi la commission paritaire nationale de l'emploi et de la formation professionnelle de l'industrie et des commerces en gros des viandes, par courrier recommandé du 28 juin 2013, auquel était jointe la note d'information sur le projet de licenciement pour motif économique, incluant un projet de plan de sauvegarde de l'emploi. En réponse à cette saisine, la commission paritaire a indiqué à la société qu'elle n'était pas compétente pour rendre un avis sur le projet de licenciement collectif, cette prérogative n'entrant plus dans le champ de compétences de la commission, conformément aux dispositions de l'article 3.2 de l'accord du 13 mai 2009 sur le fonctionnement et le financement du paritarisme dans la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et des commerces en gros des viandes, accord qui avait abrogé et remplacé l'accord du 7 avril 1994 créant la convention collective nationale de branche. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la SAS GAD n'aurait pas respecté son obligation conventionnelle de reclassement, alors qu'aucune des missions de la commission paritaire nationale de l'emploi et de la formation professionnelle de l'industrie et des commerces en gros des viandes, telles que définies par l'accord du 13 mai 2009, ne porte sur le reclassement des salariés en cas de licenciement.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les conclusions de la Selarl " Ajire " et de la SCP "F...Perdereau-Manière El Baze " tendant à être mises hors de cause dans la présente instance, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D...demande au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D..., à la société par actions simplifiée GAD, à MeE..., liquidateur judiciaire de la SAS GAD, à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée AJIRE, en la personne de Me B...et à la société civile professionnelle F...Perdereau Manière El Baze, en la personne de MeF..., en qualité d'administrateurs judiciaires de la SAS GAD et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 avril 2018.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT00511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00511
Date de la décision : 16/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-04-16;17nt00511 ?
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