Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 26 octobre 2012 du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Angers portant retrait de son agrément de policier municipal ainsi que l'arrêté du 26 novembre 2012 ayant le même objet pris par le préfet de Maine-et-Loire.
Par un jugement n° 1212219 du 23 mars 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre la décision du 26 octobre 2012 du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Angers et annulé l'arrêté du 26 novembre 2012 du préfet de Maine-et-Loire portant retrait de son agrément de policier municipal.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 25 mai, 4 juillet et 16 novembre 2016 M. B...A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 mars 2016 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2012 du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Angers ;
2°) d'annuler cette décision du 26 octobre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité pour omission à statuer sur ses conclusions et pour insuffisante motivation ;
- les premiers juges ont commis une erreur dans la qualification juridique des faits ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit dès lors que les faits reprochés ne pouvaient légalement justifier un retrait d'agrément ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant la liberté d'expression ;
- la décision contestée est entachée d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation ; il a toujours informé le maire par lettres de ses préoccupations ; c'est en l'absence de réaction de l'autorité administrative qu'il a saisi le parquet ; si le procureur a classé sans suite sa dénonciation, un tel classement ne signifie pas que les faits qu'il a dénoncés n'existent pas et ne justifie en aucun cas un retrait d'agrément ; son comportement antérieur n'a pas été pris en compte alors que ses évaluations le font apparaître comme un fonctionnaire sérieux et compétent ;
- l'agrément ne pouvait lui être retiré dès lors que les faits qui lui sont reprochés concernent exclusivement le fonctionnement interne de la police municipale de Saumur et ses relations avec ses supérieurs ; il n'a jamais commis d'infraction et son honorabilité n'est pas en question.
La commune de Saumur, représentée par MeE..., a produit des observations le 24 août 2016 et conclu au rejet de la requête.
Le préfet de Maine-et-Loire a produit des observations le 5 septembre 2016 et conclu au rejet de la requête.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2017, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par M. A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., substituant MeD..., représentant M.A....
1. Considérant que M.A..., nommé agent de police municipal à Saumur par un arrêté du maire du 13 avril 2010, s'est vu délivrer l'agrément du préfet de Maine-et-Loire par un arrêté du 28 mai 2010 et celui du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Angers par une décision du 1er octobre 2010 ; que, les 14 juin et 10 octobre 2012, le maire de Saumur a sollicité de ces deux autorités le retrait de l'agrément de l'intéressé au motif " d'un manquement grave à ses obligations professionnelles " ; que, par une décision du 26 octobre 2012 et un arrêté du 26 novembre 2012, le procureur de la République et le préfet de Maine-et-Loire ont, chacun en ce qui le concerne, procédé au retrait de l'agrément de M.A... ; que celui-ci a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces deux décisions ; que, par un jugement du 23 mars 2016, cette juridiction a prononcé l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2012 du préfet de Maine-et-Loire mais rejeté la demande de M. A...en tant qu'elle était dirigée contre la décision du 26 octobre 2012 du procureur de la République ; que M. A...relève appel de ce jugement du 23 mars 2016 dans cette dernière mesure ;
Sur la légalité de la décision du 26 octobre 2012 du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Angers :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Ils sont nommés par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés. (...) L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. (...)" ; que l'agrément accordé à un policier municipal sur le fondement de ces dispositions peut légalement être retiré lorsque l'agent ne présente plus les garanties d'honorabilité auxquelles est subordonnée la délivrance de l'agrément ; que l'honorabilité d'un agent de police municipale, nécessaire à l'exercice de ses fonctions, dépend notamment de la confiance qu'il peut inspirer, de sa fiabilité et de son crédit ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., policier municipal de la commune de Saumur, a dénoncé auprès du procureur de la République diverses malversations qui auraient été commises par certains chefs de service ou certains de ses collègues, consistant notamment en des faux en écriture publique, et divers abus de pouvoir, en particulier, usurpation de grade par un collègue avec l'assentiment de la hiérarchie, usurpation de fonctions, classement de contraventions, estimant par ailleurs être victime comme d'autres agents de son service de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie ; que, toutefois, à l'issue de l'enquête préliminaire diligentée à la demande du procureur de la République et menée au sein du service de police municipale saumurois, le service régional de la police judiciaire a conclu le 4 janvier 2012 à l'absence, au sein de ce service, de dysfonctionnements particuliers pouvant caractériser une infraction pénale, étant notamment relevé " que le courrier de M. A...et son audition témoignaient d'une volonté de faire un amalgame entre sa situation personnelle et le fonctionnement général du service ", ainsi qu'à l'absence, faute de tout élément objectif recueilli, de pratiques constitutives d'un harcèlement moral ;
4. Considérant que les accusations portées par M. A...ne pouvaient que perturber le bon fonctionnement du service de manière importante et durable ; que l'agent ne bénéficiait plus de la confiance nécessaire au bon accomplissement de sa mission tant en ce qui concerne ses collègues, ses supérieurs, que le maire et l'autorité judiciaire ; qu'ainsi il ne présentait plus les garanties d'honorabilité requises pour occuper les fonctions d'autorité auxquelles il avait été nommé ; que, dans ces conditions, les faits de dénonciations infondées étant établis ainsi qu'il a été rappelé au point 3, le procureur de la République n'a, en retirant l'agrément en litige, ni méconnu les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure ni commis d'erreur d'appréciation ;
5. Considérant, en second lieu, que M. A...ne saurait, pour soutenir que le retrait d'agrément contesté serait entaché d'illégalité, invoquer le bénéfice des dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale, aux termes desquelles " tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en informer sans délai le procureur de la République et de lui transmettre tous renseignements qui y sont relatifs ", dès lors que l'essentiel des faits qu'il a dénoncés auprès de l'autorité judiciaire n'en relèvent pas, et que les infractions identifiées par lui n'ont pas finalement été regardées comme constituées et ne sont d'ailleurs pas davantage établies par les éléments versées au dossier ; que, pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision contestée méconnaitrait les stipulations de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : " Toute personne a droit à la liberté d'expression (...) " ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'omission à statuer, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande dirigée contre la décision du procureur de la République en date du 26 octobre 2012 ;
Sur les frais de l'instance :
7. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie sera transmise au maire de Saumur, au préfet de Maine-et-Loire et au tribunal de grande instance d'Angers.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Berthon premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 mars 2018.
Le rapporteur,
O. CoiffetLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01711