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15/03/2018 | FRANCE | N°16NT02190

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 mars 2018, 16NT02190


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement no 1502810 du 10 mai 2016, le tribunal administratif d'Orléans a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant au bénéfice du sursis de paiement et a rejeté le surplus de sa demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juillet 2016 et 5 oc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement no 1502810 du 10 mai 2016, le tribunal administratif d'Orléans a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant au bénéfice du sursis de paiement et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juillet 2016 et 5 octobre 2017,

M.D..., représenté par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie de frais kilométriques engagés pour la société Dal Industries et de frais de déplacement au Maroc pris en charge par les sociétés Dal Industrie et Strudal Préfabriqués ;

- la société Strudal Préfabriqués n'a pas comptabilisé des factures fictives et il justifie des prestations réalisées par les sociétés ABMG et EBR ; les sommes qu'il a perçues doivent être qualifiées de commissions pour partie et non de revenus distribués en raison des prestations réalisées par les sous-traitants ;

- l'administration aurait dû prendre en compte la somme de 253 000 euros qu'il a reversée à la société Strudal Préfabriqués en 2010 avant toute majoration ; il n'y a pas de non-lieu à statuer en ce qui concerne la prise en compte d'un déficit catégoriel pour un montant de 98 194 euros dont l'administration doit tirer les conséquences sur l'ensemble des rectifications ;

- les pénalités pour activité occulte, pour manquement délibéré et pour manoeuvres frauduleuses ne sont ni motivées ni justifiées ;

- la pénalité pour activité occulte n'est applicable que si, d'une part, l'administration justifie qu'est exercée une activité professionnelle, d'autre part, que cette activité n'a pas été déclarée auprès de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) et que le contribuable n'a souscrit aucune déclaration fiscale ;

- la perception de redevances préalablement à la cession de brevet ne relève pas de l'exercice d'une activité en soi ou d'une profession mais uniquement de l'alinéa 2 de l'article 92 du code général des impôts ;

- l'instruction 13 N-1-07 n°70 du 19 février 2007 publiée au BOI-CF-INF10-20-10 précise que le type d'activités susceptibles d'encourir la pénalité pour activité occulte ne peut correspondre à la simple perception de revenus tirés de l'exploitation du patrimoine ;

- les revenus issus de la concession du brevet Elida ont été soumis irrégulièrement aux prélèvements sociaux relevant des revenus du patrimoine alors que l'administration a relevé qu'il s'agissait de revenus d'activité.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 16 mars et 13 octobre 2017, le ministre chargé des finances conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer sur la demande en ce qu'elle admet l'existence d'un déficit d'un montant de 98 194 euros dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2010, au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement accordé en cours d'instance, soit une somme de 20 502 euros et au rejet du surplus de la demande.

Il fait valoir que :

- le litige est dépourvu d'objet en tant qu'il porte sur les droits et pénalités dégrevés ;

- l'argument selon lequel le reversement de la somme de 253 000 euros doit être imputé avant l'application de la majoration est retenu et le déficit catégoriel s'établit à 98 194 euros au lieu de 59 492 euros ;

-les conclusions tendant à la condamnation au paiement d'intérêts moratoires sont irrecevables ;

- les autres moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chollet,

- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

1. Considérant que M. D...a fait l'objet de deux examens de sa situation fiscale personnelle au titre de ses revenus des années 2008, 2009 et 2010 ; qu'il relève appel du jugement du 26 avril 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision du 12 octobre 2017, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à hauteur de 2 558 euros pour 2008 et de 17 944 euros pour 2009, des contributions sociales supplémentaires mises à la charge de M. D...; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ; que, dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article 54 bis de ce code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les contribuables visés à l'article 53 A (...) / (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel " ;

4. Considérant que, lorsque l'administration établit que des revenus occultes ont été appréhendés par une personne physique, les sommes correspondantes doivent être, sauf preuve contraire apportée par le contribuable, regardées comme ayant été perçues au cours de l'année de la clôture de l'exercice au titre duquel l'excédent de distribution a été constaté ;

5. Considérant, d'une part que, dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société anonyme (SA) Dal Industries, l'administration a remis en cause la déduction, respectivement au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, des sommes de 4 665 euros, 4 941 euros et 5 356 euros, relatives au remboursement de notes de frais de déplacement de

M. D...au motif que la société n'a pu justifier de l'intérêt social de ces remboursements qui font double emploi avec la mise à disposition d'un véhicule de société au profit de

M. D...; que l'administration a également remis en cause la déduction, au titre des exercices clos en 2009 et 2010, des sommes de 3 984 euros et 296 euros, relatives à des frais de voyage au Maroc au profit de ce dernier au motif que la société n'a pas justifié du caractère professionnel de ces dépenses ; que l'administration a regardé ces sommes comme des libéralités non déclarées, constitutives d'un avantage occulte au sens du c de l'article 111 du code général des impôts et imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2008, 2009 et 2010, à défaut d'avoir été explicitement déclarées ou justifiées comme avantages en nature au profit de M. D...; que ce dernier n'a apporté ni dans ses observations sur les propositions de rectification, ni devant le tribunal, ni devant la cour le moindre justificatif quant aux sommes versées et se borne à soutenir avoir justifié de l'activité de la société devant l'administration ; qu'ainsi, en l'absence d'éléments contraires présentés par le requérant, ces avantages doivent être regardés comme constituant des distributions occultes, au sens du c de l'article 111 du code général des impôts, imposables au titre de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

6. Considérant, d'autre part, que, dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée (SAS) Strudal Préfabriqués, l'administration a remis en cause la déduction, au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, des sommes respectives de 2 361 euros, 8 945 euros et 6 093 euros, relatives à des frais de voyage au Maroc de M. D... au motif que la société n'a pas justifié du caractère professionnel de ces dépenses ; que l'administration a regardé ces sommes comme des libéralités non déclarées constitutives d'un avantage occulte, au sens du c de l'article 111 du code général des impôts, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2008, 2009 et 2010, à défaut d'avoir été explicitement déclarées ou justifiées comme avantages en nature au profit de

M.D... ; que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent du présent arrêt, c'est à bon droit que l'administration a réintégré ces sommes au revenu imposable de M. D...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / (...) " ; que, s'agissant des revenus distribués, il appartient en principe à l'administration, lorsque le contribuable a régulièrement contesté les rectifications, d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions ainsi que de leur appréhension ;

8. Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de la société Strudal Préfabriqués, au titre des années 2008 et 2009, les sommes de 48 597 euros et 79 737 euros correspondant à des factures de la société ABMG, comptabilisées au débit des comptes fournisseurs, en constatant que les chèques comptabilisés avaient été adressés à M. D...et encaissés par ce dernier sur son compte bancaire personnel ; qu'en effet, l'administration fait valoir que la société ABMG, qui n'a rempli aucune de ses obligations fiscales et sociales depuis sa création, n'avait pas les moyens humains et matériels d'effectuer les prestations facturées et n'a pas justifié du recours à des sous-traitants ; qu'elle précise en outre que les factures ne font mention d'aucune date d'intervention, d'aucun nombre d'heures facturées et d'aucun taux horaire de main-d'oeuvre et qu'il n'existe pas non plus de bons de commande ni de réception des travaux ; que, par ailleurs, elle fait valoir que des factures à en-tête de la société ABMG ont été retrouvées dans les locaux de la société Strudal Préfabriqués lors de la perquisition judiciaire ; que l'administration a regardé ces sommes comme des revenus distribués entre les mains de

M.D... ; que ce dernier soutient, sans l'établir, que la société ABMG a effectué les prestations facturées à l'aide de sous-traitants, que ses clients ont confirmé que les travaux avaient été correctement achevés et qu'une partie de ces sommes correspondait à des commissions qu'il a perçues ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les sommes litigieuses ont été versées en contrepartie de factures fictives et les a imposées à l'impôt sur le revenu de M. D...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

9. Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de la société Strudal Préfabriqués, au titre de l'année 2009, la somme de 65 883 euros correspondant à des factures de la société EBR, en constatant que les chèques comptabilisés avaient été adressés à

M. D...et versés par ce dernier sur son compte bancaire personnel ; qu'en effet, l'administration fait valoir que la société EBR, qui n'a rempli aucune de ses obligations fiscales, ne pouvait avoir sous-traité à la société Victoire les prestations de travaux facturées à la société Strudal Préfabriqués, comme elle l'a enregistré en comptabilité, puisque cette société était liquidée depuis le 12 décembre 2008 ; qu'en outre, l'administration a relevé que la société EBR ne peut justifier ni de déplacements sur les chantiers ni de l'emploi de salariés ; que l'administration a regardé cette somme comme des revenus distribués entre les mains de

M.D..., qui se borne à contester ces rectifications sans apporter d'éléments justifiant de la réalisation des prestations ; que si M. D...soutient qu'une partie de ces sommes correspond à des commissions qu'il a perçues, il n'apporte aucun élément à l'appui de ces allégations ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les sommes litigieuses ont été versées en contrepartie de factures fictives et les a imposées à l'impôt sur le revenu de M. D...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

10. Considérant que l'administration a également réintégré dans les résultats de la société Strudal Préfabriqués la somme de 2 498 euros correspondant à un chèque émis au nom de la société Carlson Wagonlit au titre de l'année 2009 en constatant que le règlement avait été effectué sur un compte ouvert au nom de M. D...auprès de l'agence Carlson Wagon Lit Travel qui servait à régler des frais de voyage personnels de ce dernier ; que M. D...n'apporte aucun élément pour justifier du versement de cette somme à son profit et se borne à contester cette rectification en se référant à " des observations faites antérieurement " ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a imposé cette somme à l'impôt sur le revenu de

M. D...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ;

11. Considérant, en troisième lieu, que M. D...soutient que l'administration a imposé à tort la totalité des revenus distribués au titre des années 2009 et 2010 dès lors qu'il a remboursé à la société Strudal Préfabriqués une somme de 253 000 euros le 8 novembre 2010 ; qu'il précise que l'administration aurait dû en tirer les conséquences non seulement pour les opérations ayant eu lieu en 2010 comme elle l'a fait, mais aussi pour celles de l'année 2009 ; que, cependant, les événements postérieurs à 2009 sont sans influence sur les impositions dues au titre de cette année ; que, par suite, l'administration n'avait pas à tenir compte du reversement invoqué pour l'année 2009 ;

12. Considérant, en quatrième lieu, en tout état de cause, que M. D...n'est pas fondé, au titre de l'année 2010, à demander que la somme de 253 000 euros soit imputée avant l'application de la majoration de 25 % du 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts dès lors que l'administration a admis pour cette raison, dans son mémoire en défense du 16 janvier 2017 un déficit catégoriel de 98 194 euros au titre de l'année 2010 au lieu de 59 492 euros ;

En ce qui concerne les contributions sociales :

13. Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. / 2. Ces bénéfices comprennent notamment : / (...) 3° Les produits perçus par les inventeurs au titre soit de la concession de licences d'exploitation de leurs brevets, soit de la cession ou concession de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article 93 du même code : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. / (...) / 2. Dans le cas de concession de licence d'exploitation d'un brevet, ou de cession ou de concession d'un procédé ou formule de fabrication par l'inventeur lui-même, il est appliqué sur les produits d'exploitation ou sur le prix de vente un abattement de 30 % pour tenir compte des frais exposés en vue de la réalisation de l'invention, lorsque les frais réels n'ont pas déjà été admis en déduction pour la détermination du bénéfice imposable, sauf application des dispositions du deuxième alinéa du I de l'article 93 quater I. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 93 quater du même code : " I. Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies. / Ce régime est également applicable aux produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies quelle que soit la qualité de leur bénéficiaire (...) " ; qu'aux termes de l'article 39 terdecies du même code : " 1. Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values de cession de brevets, d'inventions brevetables ou de perfectionnements qui y ont été apportés, ainsi qu'au résultat net de la concession de licences d'exploitation des mêmes éléments. / (...) " ;

14. Considérant que M. D...et M.B..., dirigeants de la SAS Strudal Préfabriqués, sont les inventeurs du procédé industriel Elidal relatif à la manutention intégrée de dalles alvéolées précontraintes ; qu'une vérification de comptabilité de la SAS Strudal Préfabriqués a révélé que ces derniers avaient établi une convention d'indivision le 10 avril 2006, aux termes de laquelle chacun était propriétaire en indivision à hauteur de 50% du brevet relatif au procédé Elidal, déposé auprès de l'Institut national de la propriété industrielle, dont la protection a été accordée le 16 avril 2004 pour une durée de vingt ans à compter du 28 mars 2001 ; que l'indivision B...-D... a rédigé, le 10 avril 2006, une convention de cession de ce brevet au profit de la SAS Strudal Préfabriqués, aux termes de laquelle elle s'engage à lui céder au plus tard le 31 décembre 2011 ce brevet pour un montant de 550 000 euros répartis par moitié entre chacun des indivisaires ; que cette convention prévoit également que, durant la période intercalaire, l'indivision B...-D... autorise la SAS Strudal Préfabriqués à utiliser le procédé de fabrication moyennant une redevance annuelle qui sera établie en fonction des superficies produites chaque année ; qu'à l'issue d'un examen de la situation fiscale personnelle de M.D..., l'administration lui a notifié des redressements dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en imposant la plus-value réalisée dans le cadre de la concession du brevet Elidal pour les années 2008 à 2010 ;

15. Considérant, ainsi qu'il sera dit au point 22 du présent arrêt, que l'administration apporte la preuve que l'activité à laquelle s'est livrée l'indivision B...-D..., au titre des années 2008 à 2010, constitue une activité professionnelle habituelle non salariée pour les trois années en litige, dont les revenus ont le caractère de bénéfices non commerciaux au sens de l'article 92 du code général des impôts ;

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale : " Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis : / 1° Les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 136-3 du même code, dans sa rédaction alors applicable, relatif à la contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement : " Sont soumis à la contribution les revenus professionnels des employeurs et travailleurs indépendants au sens de l'article L. 242-11 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 242-11 de ce code, dans sa rédaction applicable : " Les cotisations d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants sont calculées conformément aux dispositions de l'article L. 131-6 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 131-6 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité et d'allocations familiales des travailleurs non salariés non agricoles et les cotisations d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles ou commerciales sont assises sur le revenu professionnel non salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires. Le revenu d'activité pris en compte est déterminé par référence à celui retenu pour le calcul de l'impôt sur le revenu (...) Il n'est pas tenu compte (...) des plus-values et moins-values professionnelles à long terme (...) " ;

17. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les travailleurs indépendants, considérés comme domiciliés en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie, sont assujettis, sur les revenus tirés de leur activité, à la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement, dont l'assiette est, en ce qui les concerne, fixée à l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale ;

18. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale : " I.- Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu (...) / f) De tous revenus qui entrent dans la catégorie (...) des bénéfices non commerciaux (...) au sens du code général des impôts, à l'exception de ceux qui sont assujettis à la contribution sur les revenus d'activité et de remplacement définie aux articles L. 136-1 à L. 136-5. (...) / III. - La contribution portant sur les revenus mentionnés aux I et II ci-dessus est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu " ; qu'aux termes de l'article 1600-0 C du code général des impôts : " La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale " ; que les dispositions de l'article 1600-0 G du même code, en ce qui concerne la contribution pour le remboursement de la dette sociale, renvoie, sans aucune restriction s'agissant des revenus de source française, aux dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale quant aux personnes physiques assujetties à cette contribution ; qu'enfin, les dispositions de l'article 1600-0 F bis de ce code prévoient que le prélèvement social sur les revenus du patrimoine est établi conformément aux dispositions de l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale, lequel renvoie, notamment, au I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale pour définir l'assiette du prélèvement ;

19. Considérant que M. D...est l'inventeur, avec M.B..., d'un procédé industriel breveté ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 17 du présent arrêt qu'il se trouve assujetti, pour les revenus tirés de son activité en qualité de travailleur indépendant, à la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement ; que ces mêmes revenus ne peuvent donc être inclus dans l'assiette de la contribution sur les revenus du patrimoine définie par les dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, ni, par suite, dans celles de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social sur les revenus du patrimoine majoré de ses contributions additionnelles ; qu'il suit de là que les rappels de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social majoré de ses contributions additionnelles, auxquels a procédé l'administration fiscale en conséquence des plus-values réalisées dans le cadre de la concession d'un brevet, sont dépourvus de fondement ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne la majoration pour activité occulte :

20. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 92 de ce code : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. / 2. Ces bénéfices comprennent notamment : / (...) / 3° Les produits perçus par les inventeurs au titre soit de la concession de licences d'exploitation de leurs brevets, soit de la cession ou concession de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / (...) " ;

21. Considérant, en premier lieu, que, concernant les majorations pour activité occulte, les propositions de rectification des 19 décembre 2011 et 27 août 2012 précisent les redressements concernés et les raisons pour lesquelles, pour les années litigieuses, l'administration a retenu l'existence d'une activité occulte ; qu'elles sont suffisamment motivées au regard des prescriptions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ;

22. Considérant qu'en ce qui concerne la majoration pour activité occulte,

M. D...soutient qu'il s'est borné à percevoir des redevances qui ne nécessitaient que l'émission de factures et qu'il n'a exercé aucune activité professionnelle ; que, toutefois, l'indivision B...-D... a cédé à la SAS Strudal Préfabriqués, dès le 10 avril 2006, le droit d'usage et d'exploitation qu'elle détenait sur le procédé Elidal dont M. B...et M. D... sont propriétaires et inventeurs ; que l'indivision a bénéficié au cours des années litigieuses, en rémunération de la concession de son brevet, de plusieurs versements sur un compte bancaire ouvert au nom de M. D...à la suite de facturations des 31 décembre 2007 pour un montant de 100 000 euros, 16 octobre 2008 pour 66 000 euros, 14 décembre 2008, 15 décembre 2009 et 3 décembre 2010 pour 60 000 euros chacune ; que l'indivision B...-D... doit être regardée comme ayant partagé avec la SAS Strudal Préfabriqués les risques de l'exploitation du brevet, du fait du caractère variable des redevances, dont le montant est directement lié au niveau d'activité de la SAS Strudal Préfabriqués, en fonction des superficies produites annuellement, alors même que l'indivision n'a pas mis en oeuvre de moyens matériels et humains pour l'exploitation du brevet ; qu'il est constant que M. D...a reversé pour moitié ces sommes à M. B...en application de la convention d'indivision du 10 avril 2006 et en a conservé l'autre moitié ; que, dans ces conditions, l'administration établit que l'activité à laquelle s'est livrée l'indivision au titre des années 2008 à 2010, dont est membre M.D..., constitue une activité professionnelle habituelle non salariée pour les trois années en litige, engendrant des bénéfices non commerciaux au sens de l'article 92 du code général des impôts ;

23. Considérant, enfin, qu'il est constant que les sommes perçues à raison de l'activité de l'indivision B...-D... n'ont pas donné lieu à des déclarations de bénéfices non commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée et que les représentants légaux de l'indivision n'ont pas déclaré leur activité auprès de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) compétente et agissant comme centre de formalités des entreprises en application des dispositions de l'article R. 123-3 du code de commerce auquel renvoie l'article 371 AJ de l'annexe II au code général des impôts ; que M. D...n'allègue pas que l'indivision aurait commis une erreur justifiant qu'elle ne se soit acquittée d'aucune de ses obligations déclaratives ;

24. Considérant que, par suite, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle exercée par M. D...et est fondée à faire application de la majoration de 80 % prévue par les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts ;

25. Considérant, en dernier lieu, que M. D...n'est pas fondé à se prévaloir de l'instruction 13N-1-07 du 19 février 2007 n° 70, dont les dispositions ont été reprises au BOFiP BOI-CF-INF-10-20-10, qui ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt ;

En ce qui concerne la majoration pour manoeuvres frauduleuses :

26. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (... ) " ;

27. Considérant que, concernant la majoration pour manoeuvres frauduleuses, la proposition de rectification du 27 août 2012 précise les redressements concernés et les raisons pour lesquelles, pour l'année 2009, l'administration a retenu l'existence de manoeuvres frauduleuses ; qu'elle est suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ;

28. Considérant que l'administration fait valoir, sans être utilement contestée, que

M.D..., actionnaire et directeur général de la société Strudal Préfabriqués, a participé personnellement, et en en retirant un profit personnel, à l'élaboration et l'animation d'un circuit de fausse facturation en utilisant des sociétés éphémères et défaillantes fiscalement, à savoir les sociétés ABMG, EBR et Construction TP ; qu'elle précise que M. D...a agi sciemment compte tenu de ses fonctions sociales et que les procédés mis en place attestent d'une intention délibérée d'appréhender les fonds sociaux, d'égarer l'administration, de restreindre son pouvoir d'investigation et de contrôle et d'éluder l'impôt ; que l'administration fait valoir également que M. D...a souhaité masquer ses agissements personnels en encaissant une partie des sommes sur un compte ouvert à son nom auprès de l'agence Carlson Wagon Lit Travel et que seul l'exercice d'un droit de communication a permis à l'administration de connaître l'identité réelle du bénéficiaire des sommes ainsi détournées ; que l'administration justifie ainsi l'application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses appliquée au titre de l'année 2009 pour la part des droits, seule contestée, qui procède des revenus distribués consécutifs aux factures fictives émises par les sociétés ABMG, EBR et Construction TP ;

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :

29. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré / (...) " ;

30. Considérant que, concernant la majoration pour manquement délibéré, les propositions de rectification des 19 décembre 2011 et 27 août 2012 précisent les redressements concernés et les raisons pour lesquelles, pour les années 2008 et 2009, l'administration a retenu l'existence d'un manquement délibéré ; qu'elles sont suffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ;

31. Considérant que l'administration fait valoir, sans être utilement contestée, qu'au regard de ses responsabilités au sein des sociétés Dal Industries et Strudal Préfabriqués,

M. D...ne pouvait ignorer avoir fait supporter à ces sociétés, de manière répétée sur l'ensemble de la période soumise à l'examen de sa situation fiscale personnelle, des prestations indues telles que les remboursements de frais de déplacement qui faisaient double emploi et la prise en charge de voyages au Maroc pour lesquels aucun intérêt social n'est démontré et que M. D... savait que ces prestations avaient un caractère privé et en a ainsi tiré un profit personnel ; que l'administration justifie ainsi l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré appliquée au titre des années 2008 et 2009 pour la partie des droits qui procède des revenus distribués consécutifs au rejet de charges comptabilisées par les sociétés Dal Industries et Strudal Préfabriqués ;

Sur le bénéfice des intérêts moratoires :

32. Considérant qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable public et M. D... concernant le versement d'intérêts moratoires ; que, dès lors, les conclusions tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ne peuvent qu'être rejetées ;

33. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande aux fins de décharge des cotisations supplémentaires de cotisation sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social, ainsi que des contributions additionnelles et des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010 en conséquence des rectifications au titre des plus-values réalisées dans le cadre de la concession de brevet ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D...à concurrence du dégrèvement, en droits et pénalités, à hauteur de 2 558 euros pour 2008 et de 17 944 euros pour 2009, des contributions sociales supplémentaires mises à sa charge.

Article 2 : M. D...est déchargé des cotisations supplémentaires de cotisation sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social, ainsi que des contributions additionnelles et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010 en conséquence des rectifications au titre des plus-values réalisées dans le cadre de la concession de brevet.

Article 3 : Le jugement n° 1502810 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 15 février 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Chollet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mars 2018.

Le rapporteur,

L. CholletLe président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No16NT02190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02190
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SELAS MARCEAU CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-03-15;16nt02190 ?
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