Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. CA...O..., M. AM...Y..., M. BR...H..., M. G...CO..., M. G...I..., M. CW...I..., Mme AN...CP..., M. BB...CY..., M. DH...CZ..., M. BP...BH..., M. DF...BH..., Mme BX...AB..., M. D...AC..., M. Q...AE..., M. CQ... DA..., M. BE...DA..., M. AM...K..., M. BL...BI..., M. BQ... BI..., M. L...BJ..., M. BZ...AH..., M. DH...CR..., Mme CL...M..., M. AA...BN..., M. DK...-E... BN...-DO..., M. BW...N..., M. AA... BO..., M. E...C..., M. DE...AL..., M. AG...B..., M. AI... DL..., M. BM...AO..., M. CW...AP..., M. AG...AQ..., M. P...BS..., M. BV...DJ..., M. CA...BT..., M. BQ...AR..., M. U...R..., Mme AD...AS..., M. CJ...DC..., M. AW...DD..., M. CC...CS..., M. L... BU..., Mme CW...AU..., Mme BK...AV..., M. W...AX..., M. BB...-DN...CT..., M. CF...S..., M. CJ...BC..., M. E...T..., Mme AZ...BD..., M. DH... CB..., Mme AY...CD..., M. DH...F..., M. AT...BF..., M. DB... CU..., M. CE...BG..., M. DK...-E...CV..., M. AK...CG..., M. L... V..., M. DK...-DP...CH..., M. BA...CI..., M. BY...X..., M. AF...CK..., M. BY...CX...et M. CW...CM...ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision de validation de l'accord majoritaire du 17 mai 2017 prise par l'administration le 19 mai 2017 dans le cadre du projet de restructuration de l'établissement d'Argentan de la société Amcor Flexibles France.
Par un jugement n° 1701271 du 3 octobre 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrée les 1er décembre 2017, 1er février 2018 et 2 février 2018, M. O...et autres, représentés par MeJ..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 3 octobre 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 mai 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la SAS Amcor Flexibles France ou, en tant que de besoin, de l'Etat, la somme de 600 euros à verser à chacun d'eux sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
la décision contestée a été prise par une autorité incompétente, en violation des dispositions de l'article L.1233-57-8 du code du travail, dès lors que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie n'ayant pas été désigné par le ministre en charge du travail dans le cadre du suivi de ce projet de restructuration, il ne pouvait déléguer cette compétence à la directrice de l'unité départementale de l'Orne ;
cette décision est illégale dès lors qu'elle valide l'accord collectif majoritaire du 17 mai 2017 sans que la compétence de leurs signataires soit établie, à savoir celle du représentant de la SAS Amcor Flexibles France et celle des personnes physiques agissant pour le compte des organisations syndicales ;
elle est également illégale dès lors que l'administration n'a pas homologué le document unilatéral contenant les modalités d'informations et de consultations des institutions représentatives du personnel en méconnaissance des dispositions des articles L.1233-24-1, L.1233-24-2 et L.1233-24-4 du code du travail ; qu'en effet, l'accord majoritaire du 17 mai 2011 ne contient pas le processus d'information et de consultation des institutions représentatives, cette carence n'ayant pu être palliée par l'accord de méthode du 14 février 2017 ;
le processus d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel est irrégulier dès lors, d'une part, qu'en méconnaissance des dispositions des articles L.1233-57-7 et D.1233-14-3 du code du travail, le comité d'entreprise n'a pas été de nouveau consulté à la suite de la décision de refus de l'administration de valider le premier accord majoritaire du 19 avril 2017 et, d'autre part, que la consultation du comité central d'entreprise et du comité d'établissement a été déloyale en violation des dispositions des articles L. 1233-38 et L.123330 et suivants du même code ;
les recherches d'un repreneur n'ont pas été complètes, ni sérieuses en méconnaissance des dispositions des articles L.1233-57-9 à 1233-57-20 du code du travail ;
le plan de sauvegarde de l'emploi n'a pas été apprécié au regard des moyens du groupe.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2018, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2018, la SAS Amcor Flexibles France, représentée par Mes Aubonnetet Ventejou, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
le code du travail ;
le code de commerce ;
le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. L'hirondel,
les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
et les observations de MeJ..., représentant M. CA...O...et autres, de Me Aubonnet, représentant la SAS Amcor Flexibles France, et de Mme DM...de la direction régionale des entreprises, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie, représentant le ministre du travail.
1. Considérant que la SAS Amcor Flexibles France, filiale du groupe Amcor spécialisé dans l'emballage, possède deux sites de production, l'un situé à Argentan (61), spécialisé dans la production d'emballages en film plastique, essentiellement à destination du secteur de la viande transformée et des fromages à pâte dure, et l'autre à Barbezieux (16), spécialisé dans la production d'emballages pour produits laitiers, principalement à base de papier ; que, compte tenu de la perte constante du chiffre d'affaires de l'établissement d'Argentan et de ses résultats financiers, la société a envisagé sa fermeture ; que le 10 février 2017, elle a ainsi ouvert sur le portail du ministère du travail dédié à la déclaration des plans de sauvegarde de l'emploi, un dossier par lequel elle a notifié son projet de fermeture de cet établissement et informé de l'ouverture de négociations avec les organisations syndicales représentatives ; que le 14 février 2017, un accord de méthode sur l'information et la consultation des institutions représentatives du personnel a été signé ; que, le 26 avril suivant, l'entreprise a sollicité la validation d'un accord collectif majoritaire ; que, par une décision du 12 mai 2017, la directrice de l'unité départementale de l'Orne a refusé de valider l'accord collectif au motif qu'un de ses signataires n'était pas habilité à le signer ; qu'après notification de cette décision, la société et les deux organisations syndicales représentatives ont procédé, le 17 mai 2017, à une nouvelle signature de l'accord collectif majoritaire ; que, par une nouvelle décision du 19 mai 2017, la directrice de l'unité départementale de l'Orne a validé l'accord collectif majoritaire ; que M. AM...Y...et autres, qui se présentent comme des salariés concernés par la mise en oeuvre des mesures prévues par cet accord, relèvent appel du jugement du 3 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mai 2017 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.1233-57-8 du code du travail : " L'autorité administrative compétente pour prendre la décision d'homologation ou de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-1 est celle du lieu où l'entreprise ou l'établissement concerné par le projet de licenciement collectif est établi. Si le projet de licenciement collectif porte sur des établissements relevant de la compétence d'autorités différentes, le ministre chargé de l'emploi désigne l'autorité compétente. " ;
3. Considérant que les requérants reprennent en appel le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée ; que l'établissement concerné par le projet de licenciement collectif étant situé dans le département de l'Orne, il y a lieu d'écarter ce moyen, par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 de ce code : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants. L'administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-2 du même code : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / 1° Sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 ; / 2° La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1 ; / 3° La présence dans le plan de sauvegarde de l'emploi des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 ; / 4° La mise en oeuvre effective, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20. " ;
En ce qui concerne la conformité de l'accord collectif aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'accord du 17 mai 2017 a été signé par M. AJ...DG..., directeur général délégué, au nom de la SAS Amcor Flexibles France et par M. CA... Z..., délégué syndical central de la CGT et M. AM...K..., délégué syndical central de FO ;
6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.227-6 du code de commerce, qui concerne les sociétés par actions simplifiée : " La société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social. / Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du président qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'elle ne prouve que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve. / Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article. / Les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont inopposables aux tiers. " ;
7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, qu'une personne portant le titre de directeur général délégué d'une société par actions simplifiée est investie des mêmes pouvoirs que ceux confiés au directeur général pour agir au nom de la société ; que, par suite, l'accord collectif signé par M. AJ...DG..., directeur général délégué de la SAS Amcor Flexibles France, engageait cette société ;
8. Considérant, d'autre part, que pour l'application des dispositions précitées des articles L.1233-61, L.1233-24-1 et L.1233-57-2 du code du travail, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de validation d'un accord collectif d'entreprise portant plan de sauvegarde de l'emploi, de vérifier, sous le contrôle du juge administratif, que l'accord qui lui est soumis a été régulièrement signé pour le compte d'une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations représentatives lors du premier tour des dernières élections professionnelles au sein de l'entreprise ; qu'en revanche, ces dispositions ayant pour objet de déroger à celles des articles L. 2232-12 et L. 2232-13 du code du travail, qui fixent les taux de représentativité auxquels est subordonnée la validité des accords d'entreprise de droit commun, l'administration n'a pas à vérifier que l'accord qui lui est soumis remplit également les conditions posées par ces articles ;
9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'a l'appui de la demande de validation de l'accord collectif majoritaire, la société avait produit les procès-verbaux des résultats du premier tour des dernières élections professionnelles aux comités d'établissement, qui se sont déroulées, le 6 décembre 2016 et le 12 janvier 2017 sur les deux sites d'Argentan et de Barbezieux, ainsi qu'un tableau récapitulatif de ces résultats permettant d'apprécier la représentativité des syndicats en présence ; qu'il ressort de ces documents, et n'est pas contesté, que la CGT a obtenu 76 % et FO 24 % des suffrages exprimés, de sorte que ces organisations syndicales ont recueilli, à elles deux, 100 % des suffrages exprimés et que M. Z...et M. K... ont été élus ; qu'étaient également jointes à la même demande des attestations de ces syndicats selon lesquelles M. Z...et M. K... ont été désignés comme délégué syndical central de leur organisation ; que du seul fait de ces désignations, ils étaient investis de plein droit du pouvoir de négocier et de conclure un accord d'entreprise, quelle qu'en soit l'importance ; que, par suite, la directrice départementale de l'unité départementale de l'Orne, qui a vérifié la validité des mandats des cosignataires de l'accord, a pu, à bon droit, estimer qu'il avait été régulièrement signé sans qu'elle ait à exiger que soient, de plus, apportés des justificatifs concernant la personnalité morale de chacun de ces syndicats ;
En ce qui concerne la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel :
10. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.1233-24-2 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise, en particulier les conditions dans lesquelles ces modalités peuvent être aménagées en cas de projet de transfert d'une ou de plusieurs entités économiques prévu à l'article L. 1233-61, nécessaire à la sauvegarde d'une partie des emplois ; (...) " ;
11. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise ne constituent pas un élément obligatoire devant figurer dans l'accord collectif majoritaire ; que, par suite, les requérants ne sauraient valablement soutenir que l'accord querellé serait illégal pour ne pas contenir les modalités d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel ; que, par ailleurs, pour l'application des dispositions de l'article L.1233-57-2 du code du travail, l'autorité administrative a été à même de vérifier, ainsi qu'il ressort des énonciations de la décision contestée, la régularité de la procédure d'information-consultation du comité d'entreprise et du comité d'établissement ; que cette décision vise ainsi les nombreuses réunions, ainsi que les procès-verbaux qui en ont résulté, qui se sont tenues dans le cadre de cette procédure ; qu'en outre, l'article 6 de l'accord mentionne la période d'information et de consultation dont le préambule rappelle de manière détaillée le processus, les parties s'en étant au demeurant remises à l'accord de méthode, conclu le 14 février 2017, déposé le 21 avril 2017 auprès des services du ministère du travail et visé par la décision contestée, ainsi qu'il résulte de l'annexe de cet accord qui en fait partie intégrante ;
12. Considérant d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1233-57-7 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : " En cas de décision de refus de validation ou d'homologation, l'employeur, s'il souhaite reprendre son projet, présente une nouvelle demande après y avoir apporté les modifications nécessaires et consulté le comité d'entreprise " ; qu'aux termes de l'article D. 1233-14-3 du même code : " En cas de décision de refus de validation ou d'homologation, le comité d'entreprise est consulté préalablement à la nouvelle demande sur l'accord collectif ou le document unilatéral après que les modifications nécessaires ont été apportées. / Le projet modifié et l'avis du comité d'entreprise sont transmis à l'administration par tout moyen permettant de conférer une date certaine. " ;
13. Considérant que pour refuser de valider l'accord majoritaire signé le 19 avril 2017, l'administration, dans sa décision du 12 mai 2017, n'a retenu que le seul motif tiré de ce que la personne ayant signé au nom de l'organisation syndicale représentant plus de 50 % des votes n'était pas dûment habilitée ; que l'accord signé le 17 mai 2017 avait pour seul objet de régulariser ce défaut d'habilitation sans apporter la moindre modification à celui signé le 19 avril précédent ; que, dans ces conditions, l'employeur n'était pas tenu de procéder préalablement à une nouvelle consultation du comité d'entreprise ; que la seule circonstance que le préambule de l'accord majoritaire du 17 mai 2017 précise le motif pour lequel les parties ont été amenées à signer un nouvel accord suite à la décision de l'administration du 12 mai 2017 n'est pas constitutive d'une modification du document au sens des dispositions précitées du code du travail, devant donner lieu à une nouvelle consultation du comité d'entreprise ;
14. Considérant qu'il ressort de la " note d'information en vue de la consultation du CCE et du CE d'Argentan sur le projet de fermeture de l'établissement d'Argentan " que l'employeur a présenté aux membres de ces comités le groupe Amcor ainsi que le secteur d'activité de l'emballage pour produits frais, notamment au sein du groupe, puis l'établissement d'Argentan au sein de la société Amcor Flexibles France ; qu'elle expose ensuite, les profondes mutations rencontrées par le marché des emballages pour produits frais selon chaque type d'emballage et les raisons pour lesquelles le secteur d'activité " produits frais " rencontre des difficultés économiques depuis plusieurs années ; qu'elle précise alors le positionnement de l'établissement d'Argentan sur le marché des produits frais au regard de la demande et de la technologie " Reclose " qu'il utilise et de l'évolution de cette demande sur les sites que cet établissement dessert ; que la note rappelle les efforts d'investissement et d'adaptation alors mis en oeuvre à Argentan, tant par la recherche de nouveaux clients ou de nouveaux produits que par une recherche de la diversification de nouveaux segments ou marchés ou par des investissements substantiels dans l'outil de production ; qu'elle fait état des résultats industriels et financiers de la société et de l'établissement d'Argentan avec, pour ce dernier, une perte des performances industrielles ; qu'elle indique, en particulier, une perte de chiffres d'affaires tant en volume qu'en valeur et des résultats financiers en baisse depuis plus de cinq ans, la perte opérationnelle enregistrée en 2011-12 s'élevant à 509 000 euros alors qu'elle atteint 2,3 millions d'euros sur l'exercice 2015-16 et que les prévisions pour l'exercice 2016-17 confirment une nouvelle dégradation ; qu'elle souligne, enfin, que la situation de la société Amcor Flexibles France, dont les pertes sur les quatre prochaines années sont estimées à 15 millions d'euros, ne permet pas de contenir les pertes générées par l'établissement d'Argentan sans mettre en danger la situation financière de la société ;
15. Considérant que pour le devenir du site d'Argentan, cette note informait également les membres de ces comités que, s'agissant du sort du " portefeuille client ", le projet de cessation d'activité sera annoncé aux clients et que des solutions alternatives leur seront le cas échéant proposées, notamment pour la technologie Reclose dès lors qu'aucun autre site du groupe Amcor n'est en mesure de produire cette technologie telle qu'elle a été développée par le site d'Argentan et qu'elle ne correspond plus aux aspirations du marché ; qu'ils ont été également informés, en ce qui concerne les autres produits, qu'il pourrait être proposé aux clients qui le souhaiteraient de les servir depuis d'autres sites du secteur d'activité, qui ont la compétence technologique et la capacité d'absorber des volumes supplémentaires sans ressources ni investissements complémentaires ; que si cette note mentionnait également que le secteur d'activité " Produits Frais " était en surcapacité de production et que la technologie Reclose détenue par l'établissement d'Argentan était devenue obsolète, de sorte que les équipements industriels du site n'avaient pas vocation à être transférés vers d'autres sites du groupe, elle ajoutait immédiatement : " Si toutefois certains sites industriels du groupe souhaitaient acquérir des équipements industriels de l'établissement d'Argentan, ils devraient en faire la demande avec une justification économique et financière (CEAV) qui devra être approuvée par leur Business Unit de rattachement. Dans ce cas, les équipements concernés seraient cédés à prix de marché. " ; que la note précisait également que la liste des principaux équipements avait été fournie aux membres de ces comités ; que si les requérants allèguent que des commandes fictives ont été prises à compter de février 2017 pour les transférer vers des établissements situés en Espagne et au Portugal, que la société Amcor se réservait, dans les contrats, la faculté de les transférer sur d'autres sites ainsi qu'il ressort d'un contrat de fourniture du 27 janvier 2017 et qu'un transfert effectif des productions a été constaté entre mars et mai 2017, ces faits récents, concomitants ou postérieurs à l'information donnée aux représentants du personnel, ne sont pas de nature à remettre en cause la sincérité de cette information quant aux causes et à la réalité des difficultés économiques rencontrées par l'établissement d'Argentan ; qu'il ne ressort pas, en outre, des pièces du dossier, que ces transferts n'auraient pas été réalisés dans le cadre du sort du " portefeuille client " tel qu'exposé aux représentants du personnel ; que de même, les requérants n'établissent pas que le transfert d'équipements industriels, à supposer même que ce transfert ait eu lieu, a été décidé dans des conditions non prévues par la note, ni que la volonté de l'employeur était, non pas de procéder à une cessation complète et définitive de l'établissement d'Argentan, mais de procéder à une délocalisation du site d'exploitation vers l'étranger ; qu'ils ne sont dès lors pas fondés à soutenir que l'information donnée au cours de la procédure d'information et consultation a été déloyale ;
En ce qui concerne le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi :
16. Considérant que s'il résulte notamment des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré unilatéralement par l'employeur en application de l'article L. 1233-24-4 du même code, il appartient à l'administration de s'assurer du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code et d'apprécier, à ce titre, si les mesures prévues par ces articles et contenues dans le plan sont de nature à satisfaire les objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés compte tenu, notamment, des moyens dont dispose l'entreprise ou le groupe, il résulte en revanche des dispositions du 3° de l'article L. 1233-57-2 du code du travail citées au point 4 que, lorsque le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi a été déterminé par un accord collectif majoritaire signé dans les conditions prévues à l'article L. 1233-24-1 du même code, l'administration doit seulement s'assurer de la présence, dans ce plan, des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 ; que, par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir, pour contester la décision de validation litigieuse, que le plan de sauvegarde de l'emploi prévu par l'accord collectif est insuffisant pour ne pas avoir arrêté les mesures au regard des moyens dont dispose le groupe ;
En ce qui concerne la mise en oeuvre effective des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 du code du travail :
17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-57-9 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'elle envisage la fermeture d'un établissement qui aurait pour conséquence un projet de licenciement collectif, l'entreprise mentionnée à l'article L. 1233-71 réunit et informe le comité d'entreprise (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-14 dudit code : " L'employeur ayant informé le comité d'entreprise du projet de fermeture d'un établissement recherche un repreneur. Il est tenu : 1° D'informer, par tout moyen approprié, des repreneurs potentiels de son intention de céder l'établissement ; 2° De réaliser sans délai un document de présentation de l'établissement destiné aux repreneurs potentiels ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-20 de ce même code : " Avant la fin de la procédure d'information et de consultation prévue à l'article L. 1233-30, si aucune offre de reprise n'a été reçue ou si l'employeur n'a souhaité donner suite à aucune des offres, celui-ci réunit le comité d'entreprise et lui présente un rapport, qui est communiqué à l'autorité administrative. Ce rapport indique : 1° Les actions engagées pour rechercher un repreneur ; 2° Les offres de reprise qui ont été reçues ainsi que leurs caractéristiques ; 3° Les motifs qui l'ont conduit, le cas échéant, à refuser la cession de l'établissement " ;
18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport final sur le résultat des recherches d'un repreneur présenté le 19 avril 2017 au comité central d'entreprise et le 20 avril 2017 au comité d'établissement que, dans le cadre de cette recherche, la société avait mandaté le cabinet Sémaphores et que les comités d'établissement et le comité central d'entreprise ont été tenus informés de l'avancement des travaux de ce prestataire ; que les représentants du personnel ont également pu prendre connaissance d'un document présentant le ciblage sectoriel et géographique effectué par le cabinet ; que, selon ce rapport, 254 entreprises ont été contactées dont 204 sur le territoire français, que 55 entreprises ont exprimé un refus ferme, 185 entreprises ayant été relancées, que 14 entreprises ont manifesté un intérêt pour la reprise et demandé des informations et que 5 visites de site ont été organisées ; que, toutefois, aucune offre de reprise n'a été reçue par l'entreprise qui avait informé les repreneurs potentiels et les partenaires institutionnels, en particulier la mairie d'Argentan par une lettre du 13 février 2017 ; que, dans ces conditions, la seule délibération lue au cours des réunions des 19 et 20 avril 2017, dont les faits, insuffisamment circonstanciés et non établis ont été vigoureusement démentis par le directeur de l'établissement d'Argentan, n'est pas de nature à établir que l'employeur n'aurait pas procédé à une recherche complète et sérieuse ; que la décision contestée prise par la directrice départementale de l'unité départementale de l'Orne, qui s'est assurée du respect par l'employeur de la procédure d'information et de recherche d'un repreneur mise à sa charge, n'est pas entachée sur ce point d'illégalité ;
19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. CA...O...et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;
Sur les frais liés au litige :
20. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la SAS Amcor Flexibles France ou de l'Etat, qui n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, les sommes que M. CA...O...et autres demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. CA...O...et autres est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. CA...O..., représentant unique désigné par MeJ..., au ministre du travail et à la société Amcor Flexibles France.
Délibéré après l'audience du 13 février 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Degommier, président-assesseur,
- M.L'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 février 2018.
Le rapporteur,
M. L'HIRONDELLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT03605