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09/02/2018 | FRANCE | N°17NT03501

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 février 2018, 17NT03501


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans de condamner, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, le centre hospitalier régional universitaire de Tours à lui verser la somme de 299 508 euros à titre de provision à valoir sur la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'infection nosocomiale contractée lors de sa prise en charge dans cet établissement hospitalier en octobre 2014 ; la caisse primaire d'assurance m

aladie de la Vienne, appelée à la cause, a sollicité le remboursement des d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans de condamner, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, le centre hospitalier régional universitaire de Tours à lui verser la somme de 299 508 euros à titre de provision à valoir sur la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'infection nosocomiale contractée lors de sa prise en charge dans cet établissement hospitalier en octobre 2014 ; la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne, appelée à la cause, a sollicité le remboursement des débours exposés pour son assurée MmeD..., au même titre, à hauteur de 50 247,60 euros.

Par une ordonnance n°1700383 du 14 novembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées par MmeD..., a mis hors de cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et n'a que partiellement fait droit à la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne en condamnant le centre hospitalier régional universitaire de Tours à lui verser la somme provisionnelle de 32 855,32 euros, et en mettant à sa charge le versement de l'indemnité forfaitaire de gestion s'élevant à 1 055 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 novembre 2017 et 2 janvier 2018 la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) de réformer cette ordonnance du 14 novembre 2017 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Tours à lui verser la somme provisionnelle de 50 247,60 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2017, en remboursement des débours exposés pour son assurée, MmeD..., et la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de mettre la charge de cet établissement la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'infection contractée par Mme D...est en lien direct avec l'intervention du 8 octobre 2014 ;

- la circonstance que la période d'hospitalisation litigieuse soit postérieure à la date de consolidation fixée par les experts ne fait nullement obstacle à ce que la caisse requérante sollicite le remboursement des frais s'y rapportant dès lors qu'elle apporte la preuve de leur imputabilité à l'infection nosocomiale en cause ;

- Mme D...a été victime d'une ostéite, à l'origine de son hospitalisation le 21 novembre 2016, du fait de l'infection nosocomiale en litige.

La requête a été communiquée le 30 novembre 2017 à Mme A...D...qui n'a pas produit de mémoire.

Par un mémoire enregistré le 8 décembre 2017 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par Me C..., conclut à la confirmation de l'ordonnance en tant qu'elle l'a mis hors de cause et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Tours au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 décembre 2017 le centre hospitalier régional universitaire de Tours, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens développés par la caisse primaire d'assurance-maladie de la Vienne n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lemoine,

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

1. Considérant que Mme D...a été victime d'une luxation de la cheville gauche à la suite d'une chute sur son lieu de travail le 16 novembre 2010, dont le traitement a nécessité quatre interventions chirurgicales, les 31 mars 2011 et 26 mars 2012 au centre hospitalier universitaire de Poitiers, puis les 24 septembre et 8 octobre 2014 au centre hospitalier régional universitaire de Tours ; qu'au cours de cette dernière intervention, Mme D...a contracté une ostéoarthrite septique qui a conduit à une amputation antérieure de sa jambe gauche le 3 juin 2015 ; que, saisi par MmeD..., le président du tribunal administratif d'Orléans a ordonné, le 26 avril 2016, une expertise confiée à deux experts qui ont déposé leur rapport le 9 novembre 2016, en concluant à une infection d'origine nosocomiale ; que Mme D...a saisi, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier régional universitaire de Tours à lui verser une allocation provisionnelle de 299 508 euros en réparation de ses préjudices ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne a, quant à elle, sollicité le remboursement de ses débours à hauteur de 50 247,60 euros ; que la caisse relève appel de l'ordonnance du 14 novembre 2017 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'elle a limité le remboursement de ses débours à la somme de 32 855,32 euros ; qu'elle demande que l'indemnité forfaitaire de gestion qui lui a été allouée soit portée à 1 066 euros ;

Sur l'obligation du centre hospitalier régional universitaire de Tours :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude ; que, dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle qui résulte du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état ; que, dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant ;

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-2 du code de la santé publique :

" (...) Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ; que l'établissement hospitalier qui est responsable des conséquences d'une infection nosocomiale en application de ces dispositions est tenu d'indemniser intégralement la victime et, le cas échéant, les tiers payeurs subrogés dans ses droits des préjudices qui ont résulté directement de cette infection ;

5. Considérant que si les experts désignés dans les conditions rappelées au point 1 ont fixé la date de consolidation de l'état de santé de Mme D...au 1er septembre 2016, il résulte de l'instruction, et notamment du compte-rendu de la scintigraphie subie par Mme D...le 9 novembre 2016 et du compte-rendu de son hospitalisation du 15 au 26 novembre 2016, tous éléments postérieurs à la date du 8 novembre 2016 de dépôt du rapport d'expertise, que ces examen et hospitalisation ont été rendus nécessaires par une suspicion, confirmée après examen, d'ostéite, soit une affection osseuse secondaire à une infection d'origine bactérienne, sur le moignon tibial gauche de la patiente, qui a nécessité une nouvelle hospitalisation au centre hospitalier régional universitaire de Tours du 15 au 26 novembre 2016 et une intervention chirurgicale de reprise d'amputation le 21 novembre 2016 ; que les analyses bactériologiques réalisées à cette occasion ont mis en évidence la présence d'un staphylocoque epidermis, d'un staphylocoque coagulase et d'un staphylocoque lugdunansis dont le centre hospitalier régional universitaire de Tours ne conteste pas l'origine nosocomiale ; que, par suite, la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne est fondée à soutenir, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge dont l'ordonnance doit être réformée sur ce point, que les frais consécutifs à l'hospitalisation de Mme D...au centre hospitalier régional universitaire de Tours du 15 au 26 novembre 2016, qui s'élèvent à 17 392,28 euros, se rapportent, pour l'établissement hospitalier, à une obligation qui n'est pas sérieusement contestable ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant de la provision que le centre hospitalier régional universitaire de Tours a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne doit être porté à la somme totale de 50 247,60 euros, compte tenu des dépenses supplémentaires de 17 392,28 euros correspondant aux frais d'hospitalisation de Mme D...du 15 au 26 novembre 2016, somme qui sera assortie des intérêts légaux à compter du 16 mars 2017 ; qu'à cette somme s'ajoute le montant de 1 066 euros de l'indemnité forfaitaire de gestion actualisée ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne est fondée à obtenir, dans cette mesure, la réformation de l'ordonnance attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Tours une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 32 855,32 euros que le centre hospitalier régional universitaire de Tours a été condamné à verser à titre provisionnel à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne par le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans est portée à 50 247,60 euros, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2017.

Article 2 : L'indemnité forfaitaire de gestion de 1 055 euros attribuée à la CPAM de la Vienne est portée à 1 066 euros.

Article 3 : L'ordonnance n°1700383 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans du 14 novembre 2017 est réformée en ce qu'elle a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier régional universitaire de Tours versera une somme de 1 500 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne, au centre hospitalier régional universitaire de Tours, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à Mme A...D....

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Lemoine, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 février 2018.

Le rapporteur,

F. Lemoine

Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. F...

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT03501


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT03501
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000 - Référé-provision.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Modalités de la réparation - Allocation d'une provision.


Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-02-09;17nt03501 ?
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