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09/02/2018 | FRANCE | N°17NT02477

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 février 2018, 17NT02477


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet du Calvados a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700419 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

P

ar une requête et un mémoire enregistrés les 4 août et 28 novembre 2017, Mme A..., représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet du Calvados a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700419 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 août et 28 novembre 2017, Mme A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 1er juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 21 décembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, elle justifie du sérieux de ses études, dès lors que ses réorientations sont cohérentes et qu'elle démontre une progression régulière, même si celle-ci a été ralentie par les problèmes de santé qu'elle a connus entre 2014 et 2016 ;

- l'obligation de quitter le territoire français a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis ;

- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement prise à son encontre ;

Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2017, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Berthon a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante ghanéenne, née le 31 octobre 1987, est entrée en France le 5 septembre 2009 sous couvert d'un visa de long séjour étudiant ; qu'elle a obtenu en 2010 un premier titre de séjour en qualité d'étudiante qui a été renouvelé jusqu'en 2016 ; que par un arrêté du 21 décembre 2016, le préfet du Calvados, estimant que Mme A...ne justifiait pas du caractère sérieux de ses études, a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée en cas d'exécution forcée de cette mesure d'éloignement ; que Mme A... relève appel du jugement du 1er juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2016 du préfet du Calvados ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". " ; que le renouvellement de cette carte est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeA..., après être entrée en France sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ", a obtenu un " diplôme d'études françaises " à l'issue de l'année universitaire 2009-2010 ; que, titulaire d'une première carte de séjour temporaire en qualité d'étudiante, elle s'est inscrite en 2010-2011 en licence de sociologie à l'université de Caen ; qu'après avoir obtenu ce diplôme, elle aurait due être admise en Master 1 de sociologie à la rentrée universitaire suivante mais qu'une erreur administrative a retardé son admission, l'empêchant de poursuivre normalement son cursus de sociologie et expliquant son ajournement dans cette discipline ; que Mme A...a décidé de se réorienter en 2012-2013 en Master " management du social et de la santé " ; que, contrairement à ce qu'indique le préfet du Calvados dans l'arrêté contesté, elle a obtenu le diplôme de Master " management du social et de la santé " en 2014 sans avoir été ajournée ; qu'en 2014-2015, elle s'est à nouveau inscrite en Master de sociologie mais a été ajournée après avoir été absente aux épreuves ; que, souhaitant compléter sa formation par une compétence en rapport avec son choix d'orientation professionnelle, elle s'est inscrite en 2015-2016 en Master " aménagement et recomposition territoriale " ; qu'elle a toutefois été ajournée à la fin de cette année universitaire en raison, une nouvelle fois, de nombreuses absences aux examens ; qu'elle a redoublé son année de Master " aménagement et recomposition territoriale " en 2016-2017 et a finalement obtenu ce diplôme le 11 octobre 2017 ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'a indiqué le préfet du Calvados dans l'arrêté contesté, Mme A...n'a pas été ajournée quatre fois en sept années d'études, dont trois fois consécutivement, mais deux fois en huit années universitaires, dès lors que son premier ajournement en Master 1 de sociologie, comme il a été dit précédemment, est le résultat de l'erreur administrative dont elle a été victime et qu'elle poursuivait avec succès ses études de Master " aménagement et recomposition territoriale " au titre de l'année universitaire 2016-2017 à la date de l'arrêté contesté ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté par le préfet du Calvados que les réorientations successives de Mme A...étaient en cohérence avec son parcours de formation et avec ses choix professionnels ; qu'en outre, Mme A...justifie, contrairement à ce qu'a estimé le préfet, que ses ajournements en 2015 et 2016 sont liés à la pathologie invalidante dont elle souffrait et pour laquelle elle produit des certificats médicaux dont la valeur probante ne saurait être sérieusement contestée ; qu'enfin, le seul fait que Mme A...aurait poursuivi tout ou partie de ses activités professionnelles, limitées à une cinquantaine d'heures par mois, pendant ses périodes d'absence aux examens, circonstance au demeurant non formellement établie par les pièces du dossier, ne suffit pas à attester de son manque de sérieux dans ses études ; que, dans ces circonstances, le préfet du Calvados a commis une erreur d'appréciation en estimant que Mme A...ne justifiait pas de la réalité et du sérieux de ses études ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du préfet du Calvados du 21 décembre 2016 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le conseil de Mme A...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700419 du tribunal administratif de Caen en date du 1er juin 2017 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 21 décembre 2016 du préfet du Calvados est annulé.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à MeB..., conseil de Mme A...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- M. Berthon, premier conseiller,

- Mme Massiou, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 février 2018.

Le rapporteur,

E. BerthonLe président,

O. Coiffet

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02477


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02477
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : BOURREL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-02-09;17nt02477 ?
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