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18/01/2018 | FRANCE | N°17NT02464

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 janvier 2018, 17NT02464


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 6 juin 2017 par lequel le préfet de la Mayenne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1705392 du 27 juillet 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

ête enregistrée le 4 août 2017, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 6 juin 2017 par lequel le préfet de la Mayenne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1705392 du 27 juillet 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2017, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 juin 2017 du préfet de la Mayenne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, à titre subsidiaire, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour et ce, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de la Mayenne de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat au bénéfice de son conseil la somme de 1 300 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu tel qu'il résulte de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle a été prise sans qu'il soit procédé à un examen de sa situation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2017, le préfet de la Mayenne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une décision du 14 septembre 2017, Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Delesalle.

1. Considérant que Mme B... relève appel du jugement du 27 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juin 2017 du préfet de la Mayenne portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi d'office passé ce délai ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) " ; que par une décision du 30 mai 2016 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 21 novembre 2016 par la Cour nationale du droit d'asile, MmeB..., ressortissante kosovare, s'est vu définitivement refuser la reconnaissance de la qualité de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'elle n'était pas titulaire d'un tire de séjour en cours de validité ; qu'elle entrait ainsi dans le cas prévu par le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français ;

3. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande d'asile, l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que la requérante, qui au demeurant ne pouvait ignorer, depuis le rejet, devenu définitif, de sa demande d'asile, qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement, n'établit pas ni même n'allègue qu'elle aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'elle aurait été empêchée de s'exprimer avant que ne soit prise la décision attaquée ; que la seule circonstance qu'elle ait présenté sa demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique alors que la mesure d'éloignement a été édictée par le préfet de la Mayenne ne faisait pas obstacle à ce qu'elle s'adresse aux services préfectoraux ; qu'en tout état de cause, elle ne fait pas état, dans le cadre de la présente instance, d'éléments qui, s'ils avaient été connus du préfet, auraient pu le conduire à prendre une décision différente ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que Mme B...aurait été privée du droit d'être entendue qu'elle tient du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté ;

4. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que Mme B... n'avait pas, à la date de la décision, présenté de demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Mayenne aurait dû examiner sa situation au regard des dispositions de cet article doit être écarté ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née en 1997, est entrée irrégulièrement en France le 3 novembre 2014, accompagnée de ses parents, de sa soeur et de son frère ; que ses parents et sa soeur se sont maintenus sur le territoire français en dépit des mesures d'éloignement prononcées à leur encontre et confirmées par le tribunal administratif de Nantes et la cour ; que si elle soutient que sa mère ne peut être éloignée du territoire français en raison de son état de santé en application du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle ne justifie pas de la nécessité de sa présence aux côtés de celle-ci alors, au surplus, que le préfet de la Mayenne a pris le 29 mai 2017 un arrêté portant " refus de protection pour raisons médicales contre une mesure d'éloignement " assorti d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois ; qu'une autre de ses soeurs vit au Kosovo ; que dans ces conditions, et en dépit des efforts d'insertion de sa famille dans la société française et de sa scolarisation, la décision n'a pas porté au respect de la vie privée et familiale de Mme B...une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

6. Considérant que la requérante, dont la demande d'asile a, d'ailleurs, été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'elle risque de subir des violences en cas de retour au Kosovo de la part d'inconnus qui ont reproché à sa soeur de critiquer le djihad et ont voulu l'envoyer de force en Syrie ; que, toutefois, ses seules allégations et celles de sa famille ainsi que les seuls documents relatifs à une infraction du domicile familial survenue au Kosovo au mois de juillet 2015 sans indication quant à leurs auteurs ne sont pas de nature à établir que son renvoi dans son pays d'origine l'exposerait effectivement à un risque de traitements inhumains ou dégradants, en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ou menacerait sa vie ou sa liberté en méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeB..., laquelle, notamment, n'allègue pas avoir demandé à être éloignée vers un autre Etat que le Kosovo ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée, pour information, au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 janvier 2018.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

J.-E. Geffray

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02464
Date de la décision : 18/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SCP BARBARY MORICE L'HELIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-01-18;17nt02464 ?
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