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18/01/2018 | FRANCE | N°17NT02172

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 janvier 2018, 17NT02172


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 14 juin 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office au terme de ce délai.

Par un jugement n° 1606968 du 27 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a, à l'article 1er, annulé l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2

016 du préfet de la Loire-Atlantique en tant seulement qu'il rend possible l'éloignement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 14 juin 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office au terme de ce délai.

Par un jugement n° 1606968 du 27 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a, à l'article 1er, annulé l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2016 du préfet de la Loire-Atlantique en tant seulement qu'il rend possible l'éloignement de Mme B... à destination d'un pays différent du pays de renvoi du père de son enfant et a, à l'article 2, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 juillet 2017, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions du 14 juin 2016 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me A...en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur le moyen invoqué, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision du 11 décembre 2015 rejetant sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article L. 313-14 du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision du 14 juin 2016 portant refus de titre de séjour ; elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision du 11 décembre 2015 rejetant sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est insuffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2017, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejeté de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance et que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour es étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé.

Par une décision du 30 juin 2017, Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Delesalle.

1. Considérant que Mme B..., ressortissante arménienne née en 1975, relève appel de l'article 2 du jugement du 27 janvier 2017 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2016 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant qu'à l'appui de sa demande de titre de séjour, Mme B... a produit plusieurs certificats médicaux émanant de praticiens hospitaliers spécialistes en psychiatrie selon lesquels elle présente un syndrome de stress post-traumatique associé à des éléments dissociatifs et des troubles cognitifs touchant l'attention, la concentration et la mémoire ; que le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé, dans son avis du 2 février 2016, que l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; que, pour rejeter la demande de titre de séjour, le préfet de la Loire-Atlantique a estimé qu'il existait un traitement approprié ;

4. Considérant qu'il ressort des différents documents relatifs aux capacités de soins médicaux en Arménie produits par le préfet, et notamment un rapport rédigé en 2010 par l'organisation non gouvernementale Caritas International ainsi qu'un rapport de 2012 émanant du service de l'immigration et des naturalisations du ministère de l'intérieur des Pays-Bas, dont l'obsolescence n'est pas établie, que des soins appropriés aux troubles psychiatriques sont disponibles en Arménie ; que, toutefois, en l'espèce, compte tenu des certificats médicaux émanant de praticiens du service de psychiatrie IV du centre hospitalier universitaire de Nantes établis les 6 septembre 2016 et 23 mai 2017 mais qui traduisent des circonstances de fait ne différant pas de celles existant à la date de la décision, si de graves troubles psychiatriques de même nature que ceux dont souffre la requérante peuvent faire l'objet d'un traitement approprié dans son pays d'origine, il n'en va pas de même de ceux dont elle souffre tout particulièrement, compte tenu du lien entre sa pathologie et les événements traumatisants vécus en Arménie, qui ne permet pas, dans son cas, d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays ;

5. Considérant que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est fondé et de nature à entraîner l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2016 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

7. Considérant qu'eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, que la préfète de la Loire-Atlantique délivre à Mme B...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à Me A...dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du 27 janvier 2017 du tribunal administratif de Nantes et l'arrêté du 14 juin 2016 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Loire-Atlantique de délivrer à Mme B...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me A...la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée, pour information, à la préfète de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 janvier 2018.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

J.-E. Geffray

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02172


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02172
Date de la décision : 18/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-01-18;17nt02172 ?
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