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14/12/2017 | FRANCE | N°16NT02089

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 14 décembre 2017, 16NT02089


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) L'Agapa a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007.

Par un jugement n° 1303795 du 27 avril 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juin 2016, la SA L'Agapa, représentée par Mes Naudin etA..., d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) L'Agapa a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007.

Par un jugement n° 1303795 du 27 avril 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juin 2016, la SA L'Agapa, représentée par Mes Naudin etA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les loyers versés à la société civile immobilière (SCI) Béniguet au titre des années 2006 et 2007 pour la location nue des pavillons de l'île de Béniguet ont été acquittés dans l'intérêt de son exploitation commerciale d'activité hôtelière et la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ces dépenses pouvait donc être déduite en application du 1° du 1 de l'article 271 du code général des impôts,; l'ampleur et le coût des travaux nécessaires à la rénovation de l'ensemble immobilier de l'île de Béniguet ont rendu nécessaire la conclusion d'un contrat de bail commercial prévoyant le paiement de loyers au cours de la période de rénovation et l'exploitation du site dès l'achèvement des travaux, duquel ressort clairement l'intention d'exploitation en résidence hôtelière et la destination commerciale de ces bâtiments ; les retards pris dans les travaux ne sont pas de nature à établir l'existence d'une gestion anormale ;

- l'administration fiscale ne peut s'immiscer, en l'absence d'irrégularité de gestion, dans la gestion de la société afin d'apprécier l'opportunité commerciale du projet hôtelier ;

- le tribunal a omis de statuer sur les moyens relatifs à sa demande de décharge des pénalités ;

- l'application des pénalités n'est pas justifiée dès lors que les rappels ne sont pas fondés et que l'administration fiscale n'a pas rapporté la preuve d'un manquement délibéré ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2016, le ministre chargé des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la SA l'Agapa ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SA L'Agapa.

1. Considérant que la société anonyme (SA) L'Agapa, qui exploite un hôtel restaurant à Perros-Guirec, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2006 et 2007, à l'issue de laquelle deux propositions de rectification en date des 17 décembre 2009 et 24 mars 2010 lui ont été notifiées ; qu'après procédure contradictoire, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée consécutifs à ce contrôle ont été mis en recouvrement le 14 décembre 2012 ; que la réclamation préalable présentée par la société a été rejetée par décision du 9 août 2013 ; qu'elle relève appel du jugement du 27 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces rappels ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, comme le soutient la société requérante, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen relatif au caractère intentionnel d'éluder l'impôt justifiant l'infliction de la majoration de 40 % pour manquement délibéré ; que le jugement attaqué doit donc être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions relatives aux pénalités ;

3. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la cour de se prononcer par voie d'évocation sur les conclusions relatives aux pénalités et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions présentées tant devant le tribunal administratif que devant la cour ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant que la SA L'Agapa a conclu le 27 juin 2001 avec la société civile immobilière (SCI) Béniguet un bail commercial pour la location pendant 12 ans de onze pavillons et terrains attenants sur l'île de Béniguet moyennant le versement d'un loyer annuel de 18 000 euros les trois premières années puis de 36 587,76 euros révisable ; qu'elle a déduit la taxe sur la valeur ajoutée correspondant aux loyers versés à cette société pour un montant de 7 172 euros au titre de l'année 2006 et de 5 379 euros au titre de l'année 2007 ; que le vérificateur a remis en cause ces déductions au motif que ces dépenses de location de biens immobiliers ne constituaient pas des charges engagées pour les besoins de l'entreprise ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction applicable : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) " ; que, lorsque l'administration, sur le fondement de ces dispositions, met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en oeuvre la procédure de redressement contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté le redressement qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que le bien ou le service acquis n'était pas nécessaire à l'exploitation ;

6. Considérant que le ministre fait valoir, sans être sérieusement contredit, que les biens loués n'ont pas été exploités durant la période en cause et ne l'étaient toujours pas le 27 juin 2016, date d'introduction de la requête ; qu'il souligne également que la société n'avait aucun intérêt à signer ce bail commercial dès lors que, les associés des deux sociétés étant les mêmes, le risque que le bien soit loué à un autre exploitant était inexistant et que le versement des loyers n'était pas indispensable à la SCI Béniguet qui pouvait recourir aisément à l'emprunt compte tenu de sa situation financière ; que les deux sociétés ne pouvaient ignorer l'impossibilité, compte tenu de l'ampleur des travaux à réaliser et de la situation particulière de l'île de Béniguet, qui est un site classé et protégé, d'exploiter en l'état les lieux loués dès l'origine du bail ; qu'il met également en évidence qu'il n'est justifié de l'existence d'aucune démarche administrative du projet d'exploitation hôtelière avant la lettre d'information du 16 avril 2008 adressée au maire de la commune de Bréhat et que l'ensemble des documents produits, largement postérieurs aux années en litige, n'apporte pas la preuve de la volonté de lancer un projet commercial au moment de la signature du bail ou, à tout le moins, au cours des exercices vérifiés ;

7. Considérant que, s'il est constant que le bail conclu le 27 juin 2001 mentionnait un usage de résidence hôtelière, aucune des pièces produites ne permet de confirmer la réalité du projet d'exploitation hôtelière avant l'année 2008, postérieure aux années vérifiées ; que les allégations à caractère général sur l'ampleur des travaux, les contraintes géologiques et l'insularité du site ne permettent pas d'établir que le prétendu retard dans les travaux aurait été imprévisible ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 7 du présent arrêt que l'administration fiscale, qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, ne s'est pas immiscée dans sa gestion, apporte la preuve qui lui incombe que les dépenses de location versées à la SCI Beniguet ne constituaient pas des charges engagées dans l'intérêt de la SA L'Agapa et, par suite, justifie du bien-fondé des rappels en litige ;

Sur les pénalités :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

10. Considérant qu'en faisant valoir que la SA L'Agapa ne pouvait ignorer que les biens qu'elle louait n'étaient pas utilisés pour les besoins de son activité dès lors qu'elle n'en tirait aucun revenu depuis 2001 et qu'elle a continué à déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant ces loyers en dépit d'une rectification similaire effectuée au titre de l'année 2004 lors d'une précédente vérification de comptabilité, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'un manquement délibéré, justifiant la pénalité au taux de 40 % qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1303795 du tribunal administratif de Rennes du 27 avril 2016 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions aux fins de décharge des pénalités.

Article 2 : La demande tendant à la décharge des pénalités présentée par la SA L'Agapa devant le tribunal administratif de Rennes et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme L'Agapa et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2017.

Le rapporteur,

F. MalingueLe président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°16NT02089

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02089
Date de la décision : 14/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : TIRARD NAUDIN SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-12-14;16nt02089 ?
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