Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...a demandé au tribunal administratif de Nantes, par trois demandes distinctes, d'annuler les décision et arrêtés du maire de la commune d'Olonne-sur-Mer des 4 octobre 2012 et 25 avril 2013 l'affectant sur un nouveau poste, supprimant les 25 points de nouvelle bonification indiciaire dont elle bénéficiait et modulant à la baisse le coefficient de son indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires, ainsi que la décision du 13 août 2013 rejetant son recours gracieux, et de condamner la commune d'Olonne-sur-Mer à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice résultant pour elle de ces décisions.
Par un jugement n° 1308067, 1308068 et 1403926 du 21 octobre 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et a condamné la commune d'Olonne-sur-Mer à lui verser la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 22 décembre 2015, 2 mars et 5 juillet 2017 Mme E...D..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 octobre 2015 en tant qu'il ne fait que partiellement droit à ses conclusions ;
2°) d'annuler la décision verbale du 4 octobre 2012 l'affectant sur un nouveau poste ;
3°) d'annuler les deux arrêtés du 25 avril 2013 supprimant les 25 points de nouvelle bonification indiciaire dont elle bénéficiait et modulant à la baisse le coefficient de son indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires, ainsi que la décision du 13 août 2013 rejetant son recours gracieux ;
4°) de condamner la commune d'Olonne-sur-Mer à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi du fait de ces décisions ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Olonne-sur-Mer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande d'annulation de la décision verbale d'affectation du 4 octobre 2012 n'était pas tardive car son recours gracieux présenté le 20 juin 2013 ne portait pas sur cette décision mais seulement sur les deux arrêtés du 25 avril 2013 ;
- cette décision d'affectation est illégale car elle n'a pas été précédée de la consultation de la commission administrative paritaire, alors qu'elle entrainait une diminution de ses responsabilités et de sa rémunération, ce qui constitue une méconnaissance de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 ;
- les décisions contestées constituent des sanctions disciplinaires déguisées et sont entachées de détournement de pouvoir car elles sont motivées non par un projet de réorganisation du service, mais par la volonté du maire de la commune, qui lui a été signifiée dès octobre 2011, de la voir quitter ses effectifs ;
- ces décisions, qui ont provoqué la diminution de ses responsabilités et de sa rémunération, l'ont empêchée d'accéder à un poste de directeur territorial et lui ont causé un préjudice moral qui peut être évalué à la somme de 10 000 euros.
Par des mémoires enregistrés les 7 mars 2016 et 8 juin 2017 la commune d'Olonne-sur-Mer, représentée par MeA..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 octobre 2015 en tant qu'il l'a condamnée à verser à Mme D...la somme de 1 000 euros ;
3°) à ce que soit mise à la charge de Mme D...une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condamnation à verser 1 000 euros à la requérante prononcée à son encontre est irrégulière car Mme D...n'avait pas entendu fonder son recours indemnitaire sur l'irrégularité de la consultation du comité technique paritaire ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Bris,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- les observations de MeC..., représentant MmeD..., et de MeB..., substituant MeA..., représentant la commune d'Olonne-sur-Mer.
1. Considérant que MmeD..., attaché principal de la fonction publique territoriale, a été nommée le 1er décembre 2005 sur le poste de responsable du service d'urbanisme de la commune d'Olonne-sur-Mer ; que, lors d'un entretien avec le maire le 4 octobre 2012, elle a été informée de ce qu'une nouvelle organisation des services serait mise en oeuvre à compter du 1er novembre 2012 après consultation du comité technique paritaire, laquelle a eu lieu le 23 octobre 2012, et de son affectation sur un poste de chargé de mission au sein du service urbanisme ; que deux arrêtés en date du 25 avril 2013 ont ensuite été notifiés à MmeD..., portant retrait des 25 points dont elle bénéficiait au titre de la nouvelle bonification indiciaire et abaissant son coefficient d'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaire à 1,21 ; que Mme D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces deux arrêtés du 25 avril 2013 ainsi que la décision de mutation interne lui ayant été signifiée verbalement le 4 octobre 2012 et la décision du 13 août 2013 rejetant son recours gracieux, et de condamner la commune d'Olonne-sur-Mer à l'indemniser des préjudices résultant pour elle de ces décisions ; qu'elle relève appel du jugement du 21 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions à fin d'annulation et n'a fait droit qu'à hauteur de 1 000 euros à ses conclusions indemnitaires ; que, par la voie de l'appel incident, la commune d'Olonne-sur-Mer demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser la somme de 1 000 euros à MmeD... ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'il ressort des écritures de première instance que Mme D...a demandé au tribunal de condamner son employeur à l'indemniser du préjudice résultant pour elle de l'illégalité de la décision de mutation prise à son égard ; que, par suite, en condamnant la commune d'Olonne-sur-Mer à verser à l'intéressée 1 000 euros en raison d'irrégularités entachant la procédure de consultation du comité technique paritaire, irrégularités dont la requérante faisait état dans ses écritures pour contester la légalité de la décision de mutation qui constitue le fait générateur du dommage qu'elle invoquait, les juges de premier instance n'ont pas, contrairement à ce que soutient la commune, excédé leur office ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de mutation ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 20 juin 2013, Mme D... a formé auprès du maire de la commune d'Olonne-sur-Mer un recours gracieux par lequel elle contestait à la fois la décision de mutation prise à son égard et les décisions en découlant qui réduisaient son régime indemnitaire ; qu'elle mentionnait dans ce courrier que le représentant du personnel ayant assisté à son entretien avec le maire le 5 avril 2013 avait estimé que la décision qui la mutait était constitutive d'une sanction et qu'elle pouvait être contestée devant le tribunal administratif ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que la notification, le 19 août 2013, de la décision du maire du 13 août 2013 rejetant ce recours gracieux, qui portait mention des voies et délais de recours, a fait courir le délai de recours contentieux à l'encontre la décision verbale de mutation du 4 octobre 2012 et a, pour ce motif, rejeté comme tardives les conclusions tendant à l'annulation présentées devant lui le 2 mai 2014 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés du 25 avril 2013 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;
5. Considérant que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ; que s'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituent les éléments d'une même opération complexe ;
6. Considérant que les arrêtés du 25 avril 2013, qui emportent les conséquences financières du changement d'attribution de MmeD..., doivent être regardés comme ayant été pris pour l'application de la décision du 4 octobre 2012 affectant l'agent sur son nouveau poste ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'à la date du 17 octobre 2013 à laquelle Mme D... a introduit ses demandes en annulation de ces arrêtés, la décision de mutation du 4 octobre 2012 n'était pas devenue définitive ; que, par suite, les moyens présentés par la requérante par la voie de l'exception d'illégalité étaient à cette date recevables ;
7. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires. " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., qui était auparavant responsable du service d'urbanisme placée sous l'autorité du directeur général adjoint et encadrait trois agents, est devenue à la suite de son changement d'affectation chargé de mission au sein de ce service, placée sous l'autorité du directeur des services techniques au même titre que ses anciens subordonnés ; qu'il est du reste indiqué dans les arrêtés contestés du 25 avril 2013 que c'est le retrait de ses fonctions d'encadrement, impliquant une diminution significative des sujétions qui lui incombaient précédemment, qui justifie la suppression des 25 points dont elle bénéficiait au titre de la nouvelle bonification indiciaire et la réduction de son coefficient d'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires de 3,11 à 1,21 ; qu'ainsi, la décision portant réaffectation de Mme D...doit être regardée en l'espèce comme emportant une réelle modification de sa situation professionnelle, laquelle ne pouvait, en vertu des dispositions rappelées au point 7, être régulièrement prononcée sans que la commune ait préalablement consulté pour avis la commission administrative paritaire ; qu'il est constant que cette formalité n'a pas été respectée ; qu'ainsi, la décision de changement d'affectation signifiée à Mme D...le 4 octobre 2012 a été prise au terme d'une procédure irrégulière ; qu'il s'ensuit qu'elle est entachée d'illégalité, de même par voie de conséquence que les deux arrêtés contestés du 25 avril 2013 et la décision du 13 août 2013 rejetant à cet égard son recours gracieux, qui doivent être annulés ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes à fin d'annulation des arrêtés du maire de la commune d'Olonne-sur-Mer en date du 25 avril 2013 et de la décision du 13 août 2013 rejetant le recours gracieux formé par elle à l'encontre de ces arrêtés ;
Sur les conclusions indemnitaires :
10. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la décision de mutation de Mme D..., prise dans le cadre d'un projet de réorganisation qui a fait l'objet d'un avis favorable du comité technique paritaire le 23 octobre 2012, n'aurait pas été prise dans l'intérêt du service et serait entachée de détournement de pouvoir ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que cette mesure constituerait une sanction disciplinaire déguisée, alors qu'aucun élément du dossier ne révèle une situation de conflit ou d'animosité entre Mme D...et ses collègues, sa hiérarchie ou les usagers du service ; que le souhait affiché de la commune de voir l'intéressée trouver un emploi dans une autre collectivité, qui l'a du reste conduit à recourir aux prestations d'un cabinet de conseil pour l'aider dans ses démarches, ne révèle pas non plus d'intention de la sanctionner ; que les irrégularités invoquées par la requérante concernant les conditions dans lesquelles le comité technique paritaire a rendu son avis, qui sont de pure forme, ne sauraient, en tout état de cause, être à l'origine pour elle d'un quelconque préjudice ; que, dans ces conditions, la faute commise par la commune en s'abstenant de saisir la commission administrative paritaire préalablement à la décision de mutation a seulement causé à la requérante un préjudice moral ; qu'il sera, dans les circonstance de l'espèce, fait une plus juste appréciation de ce préjudice en portant son évaluation à 2 500 euros ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de porter la somme de 1 000 euros que la commune de d'Olonne-sur-Mer a été condamnée à verser à Mme D...en réparation de son préjudice à la somme de 2 500 euros ; que, par ailleurs, les conclusions d'appel incident présentées par la commune d'Olonne-sur-Mer doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeD..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune d'Olonne-sur-Mer au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Olonne-sur-Mer la somme de 1 500 euros à verser à Mme D...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les deux arrêtés du maire de la commune d'Olonne-sur-Mer en date du 25 avril 2013 ainsi que la décision du 13 août 2013 rejetant le recours gracieux formé à l'encontre de ces arrêtés sont annulés.
Article 2 : La somme de 1 000 euros que la commune d'Olonne-sur-Mer a été condamnée par le tribunal administratif de Nantes à verser à Mme D...est portée à 2 500 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes n°1308067, 1308068 et 1403926 en date du 21 octobre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D...et les conclusions présentées devant la cour par la commune d'Olonne-sur-Mer sont rejetés.
Article 5 : La commune d'Olonne-sur-Mer versera 1 500 euros à Mme D...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...et à la commune d'Olonne-sur-Mer.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 novembre 2017.
Le rapporteur,
I. Le BrisLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. F...
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publiques en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT03875