Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. I...G...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'établissement de santé Fondation Bon Sauveur à Picauville à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis à raison des soins inadaptés reçus dans cet établissement à compter de l'année 2006.
Par un jugement n° 1402385 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 février 2016 et 20 janvier 2017 M. G..., représenté par Me J...puis par MeD..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 10 décembre 2015 ;
2°) de condamner l'établissement de santé Fondation Bon Sauveur, au besoin après avoir ordonné une mesure d'expertise, à lui verser la somme totale de 636 000 euros ou, subsidiairement, de juger que la faute commise par cet établissement lui a fait perdre 50 % de chance d'échapper au dommage subi et de l'indemniser en conséquence ;
3°) de mettre à la charge de la Fondation Bon Sauveur les entiers dépens de l'instance ainsi que la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- dans le cadre de son suivi à la Fondation Bon Sauveur, un diagnostic erroné de schizophrénie a été posé, entraînant la mise en place d'un traitement inadapté ;
- le rapport établi par un médecin expert à la demande de l'établissement de santé n'est pas contradictoire ni probant ;
- cette faute lui a causé des préjudices qu'il évalue à 10 000 euros pour le préjudice esthétique, 50 000 euros pour le préjudice moral et à 576 000 euros au titre de sa perte d'activité professionnelle.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 3 juin 2016 et 4 février 2017 la Fondation Bon Sauveur, représentée par MeB..., conclut, au besoin après organisation d'une mesure d'expertise, au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. G...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que la réalité d'une faute commise dans la prise en charge de M. G... n'est pas établie et que, si une expertise médicale devait être ordonnée, elle devrait être confiée à un médecin psychiatre avec une mission précisément définie.
M. G...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mai 2016 rectifiée le 12 janvier 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massiou,
- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que M.G..., né en 1991, a été pris en charge à compter de 2005, au sein de l'établissement hospitalier spécialisé public géré par la Fondation Bon Sauveur à Picauville (Manche), pour des troubles du comportement ; qu'estimant qu'un diagnostic erroné de schizophrénie posé au cours de cette prise en charge lui avait causé des préjudices, M. G... a, le 15 octobre 2014, sollicité de la Fondation Bon Sauveur qu'elle l'indemnise à ce titre, ce que cet établissement a refusé par un courrier du 19 novembre suivant ; que M. G...relève appel du jugement du 10 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que la Fondation Bon Sauveur soit condamnée à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis de son fait ;
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) " ;
3. Considérant que M. G...fonde, pour l'essentiel, son argumentation relative à l'erreur de diagnostic fautive commise par l'établissement de santé sur deux courriers rédigés les 18 janvier et 5 avril 2007 par le DrF..., alors psychiatre à la Fondation Bon Sauveur, aux termes desquels était évoquée la mise en place d'un processus schizophrénique ; qu'il résulte toutefois des éléments de fait extraits de son dossier médical tels qu'ils sont repris dans le rapport du DrA..., expert missionné par la compagnie d'assurance AXA assureur de l'établissement, qui a été communiqué aux autres parties, que les deux médecins qui ont assuré, à partir du mois de septembre 2007 et jusqu'en 2010, le suivi médical du requérant n'ont pas confirmé ce diagnostic et que les traitements médicamenteux qu'ils ont mis en place étaient destinés, non à traiter une schizophrénie, mais à pallier les importants troubles du comportement dont souffrait le patient ; que, selon cette même expertise, un bilan médico-psychologique établi au cours de cette période a totalement écarté l'hypothèse d'une structure psychotique chez M. G... ; que, de même, une expertise réalisée le 10 juin 2008 par le Dr E...indique qu'on ne retrouve pas chez l'intéressé de signes manifestes de schizophrénie ; qu'enfin le rapport médical établi par le Dr C...à la demande du juge de l'application des peines en 2011, dont se prévaut M.G..., ne fait que confirmer ces éléments factuels de diagnostic et de traitement, et ne mentionne aucune erreur de diagnostic ; que, dans ces conditions, M. G...n'est pas fondé à soutenir que la Fondation Bon Sauveur aurait, en lui administrant un traitement réservé à la schizophrénie, commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise sollicitée, que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Fondation Bon Sauveur qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme dont M. G...sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la Fondation Bon Sauveur ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Fondation Bon Sauveur tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... G...et à la Fondation Bon Sauveur.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2017, où siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Le Bris, premier conseiller,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2017.
Le rapporteur,
B. MassiouLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. H...
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 16NT00392