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16/10/2017 | FRANCE | N°16NT03558

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 16 octobre 2017, 16NT03558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 mars 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation.

Par jugement n° 1306176 du 19 avril 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2016, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes

du 19 avril 2016 ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 28 mars 2013 ;

3°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 28 mars 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de naturalisation.

Par jugement n° 1306176 du 19 avril 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2016, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 avril 2016 ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 28 mars 2013 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, le ministre ne pouvant se fonder uniquement sur l'absence de ressources et d'insertion professionnelle ;

- la décision est constitutive d'une discrimination fondée sur la fortune, en méconnaissance du principe d'égalité garanti par la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de l'article 225-1 du code pénal, de l'article 21-24 du code civil, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du protocole n° 12 à cette convention, de la convention européenne sur la nationalité, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, du pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens tirés de la méconnaissance du principe de non-discrimination résultant des textes cités par Mme D...sont inopérants ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 août 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons ;

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public ;

- et les observations de MeE..., substituant MeC..., pour MmeD....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 1er octobre 2012, le préfet de la Haute-Savoie a ajourné à deux ans la demande de naturalisation présentée par MmeD..., ressortissante kosovare ; que, par une décision du 28 mars 2013, le ministre de l'intérieur a rejeté le recours hiérarchique dirigé contre cette décision et a substitué à la décision préfectorale d'ajournement une décision de rejet de sa demande de naturalisation ; que Mme D...relève appel du jugement du 19 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 28 mars 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " Hors le cas prévu à l'article 21-14-1, l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) " ;

3. Considérant que l'autorité administrative dispose, en matière de naturalisation d'un large pouvoir d'appréciation ; qu'elle peut, dans l'exercice de ce pouvoir, prendre en considération notamment, pour apprécier l'intérêt que présenterait l'octroi de la nationalité française, l'intégration du postulant dans la société française, son insertion sociale et professionnelle et le fait qu'il dispose de ressources lui permettant de subvenir durablement à ses besoins en France ; que l'autorité administrative ne peut, en revanche, se fonder exclusivement ni sur l'existence d'une maladie ou d'un handicap ni sur le fait que les ressources dont dispose l'intéressé ont le caractère d'allocations accordées en compensation d'un handicap, pour rejeter une demande de naturalisation ;

4. Considérant, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier et en particulier du procès-verbal d'assimilation établi le 27 septembre 2011 par les services de la préfecture de la Haute-Savoie, que le niveau de communication en langue française de MmeD..., entrée en France en 1999, a été jugé " difficile " ; que la présence d'un tiers lors de l'entretien a été indispensable pour communiquer et que la requérante ne sait ni lire ni écrire le français ; que dans ces conditions, et alors même que la requérante soutient sans l'établir que ses difficultés s'expliquent par son état de santé, le ministre de l'intérieur, dans l'exercice du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, était en droit, pour ce seul motif, et sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, de rejeter sa demande de naturalisation ; qu'il résulte de l'instruction que le ministre aurait pris la même décision s'il avait entendu se fonder initialement sur ce seul motif ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeD..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction qu'elle présente ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont MmeD..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse D...et au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 octobre 2017.

Le rapporteur,

F. PONS

Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT03558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03558
Date de la décision : 16/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SELARL BOEZEC CARON BOUCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-16;16nt03558 ?
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