La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2017 | FRANCE | N°16NT01994

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 octobre 2017, 16NT01994


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse devant le tribunal administratif :

L'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 24 avril 2012 par laquelle le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui accorder son agrément départemental au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et de lui délivrer cet agrément.

Par un jugement n° 1202643 du 27 décembre 2013, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté et lui a accordé l'agrément " dans le cadre des

communes littorales de l'arrondissement de Saint-Malo " pour une durée de 5 ans re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse devant le tribunal administratif :

L'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 24 avril 2012 par laquelle le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui accorder son agrément départemental au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et de lui délivrer cet agrément.

Par un jugement n° 1202643 du 27 décembre 2013, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté et lui a accordé l'agrément " dans le cadre des communes littorales de l'arrondissement de Saint-Malo " pour une durée de 5 ans renouvelable.

Procédure contentieuse devant la cour :

Par un recours enregistré le 10 mars 2014 sous le n° 14NT00629, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a demandé à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 décembre 2013.

Par la voie de l'appel incident l'association a demandé à la cour de lui octroyer un agrément pour l'ensemble de l'arrondissement de Saint-Malo ou à défaut pour le département d'Ille-et-Vilaine.

Par un arrêt du 13 février 2015, la cour a rejeté le recours du ministre et agréée l'association au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement dans le cadre du département d'Ille-et-Vilaine, pour une durée de 5 ans renouvelable.

Procédure contentieuse devant le Conseil d'Etat :

Par un recours enregistré le 17 avril 2015, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a demandé au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Par une décision du 20 juin 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt 14NT00629 du 13 février 2015 et renvoyé l'affaire devant la cour pour y être statué.

Procédure contentieuse devant la cour sous le n° 16NT01994 :

Par un mémoire, enregistré le 3 mars 2017, l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " conclut aux mêmes fins que dans l'instance 14NT00629, sollicite l'octroi de l'agrément au niveau du département d'Ille-et-Vilaine et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'elle exerce ses activités dans une partie significative du département d'Ille-et-Vilaine.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant Me A..., représentant l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement ".

1. Considérant que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour d'annuler le jugement du 27 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 24 avril 2012 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine, a refusé d'accorder à l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " l'agrément qu'elle sollicitait au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et lui a accordé cet agrément " dans le cadre des communes littorales de l'arrondissement de Saint-Malo " pour une durée de 5 ans renouvelable ; que par la voie de l'appel incident, l'association demande à la cour de lui octroyer cet agrément pour le département d'Ille-et-Vilaine ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. Considérant que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie soutient que les conclusions de première instance de l'association Dinard Côtes d'Emeraude Environnement tendant à ce que le tribunal lui délivre un agrément dans le cadre de l'arrondissement de Saint-Malo étaient tardives ;

3. Considérant que dans son mémoire introductif d'instance, l'association Dinard Côte d'Emeraude Environnement demandait au tribunal l'annulation de la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine du 24 avril 2012 ainsi que la délivrance d'un agrément départemental ; que par un mémoire en réplique enregistré le 7 septembre 2013, après l'expiration des délais de recours, elle a demandé la délivrance d'un agrément dans le cadre plus restreint de l'arrondissement de Saint-Malo ; que ces conclusions ne sauraient être regardées comme nouvelles et par suite irrecevables faute d'avoir été présentées avant expiration du délai de recours contentieux ; que dans ces conditions, la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'environnement doit être rejetée ;

Sur la légalité de l'arrêté du 24 avril 2012 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction à la date de la décision contestée : " Lorsqu'elles exercent leurs activités depuis au moins trois ans, les associations régulièrement déclarées et exerçant leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de la gestion de la faune sauvage, de l'amélioration du cadre de vie, de la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, de l'urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances et, d'une manière générale, oeuvrant principalement pour la protection de l'environnement, peuvent faire l'objet d'un agrément motivé de l'autorité administrative. / (...). Ces associations sont dites "associations agréées de protection de l'environnement. / Cet agrément est attribué dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) / Les décisions prises en application du présent article sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. " ; qu'aux termes de l'article R. 141-2 du même code : " Une association peut être agréée si, à la date de la demande d'agrément, elle justifie depuis trois ans au moins à compter de sa déclaration: 1° D'un objet statutaire relevant d'un ou plusieurs domaines mentionnés à l'article L. 141-1 et de l'exercice dans ces domaines d'activités effectives et publiques ou de publications et travaux dont la nature et l'importance attestent qu'elle oeuvre à titre principal pour la protection de l'environnement ; 2° D'un nombre suffisant, eu égard au cadre territorial de son activité, de membres, personnes physiques, cotisant soit individuellement, soit par l'intermédiaire d'associations fédérées ; 3° De l'exercice d'une activité non lucrative et d'une gestion désintéressée ; 4° D'un fonctionnement conforme à ses statuts, présentant des garanties permettant l'information de ses membres et leur participation effective à sa gestion ; 5° De garanties de régularité en matière financière et comptable " ; qu'aux termes de l'article R. 141-3 de ce code : " L'agrément est délivré dans un cadre départemental, régional ou national pour une durée de cinq ans renouvelable. Le cadre territorial dans lequel l'agrément est délivré est fonction du champ géographique où l'association exerce effectivement son activité statutaire, sans que cette activité recouvre nécessairement l'ensemble du cadre territorial pour lequel l'association sollicite l'agrément " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'agrément, de déterminer s'il peut être délivré dans un cadre départemental, régional ou national ; que, si ces dispositions font obstacle à ce qu'elle exige que l'association exerce son activité dans l'ensemble du cadre territorial pour lequel l'agrément est susceptible de lui être délivré, elle peut légalement rejeter la demande lorsque les activités de l'association ne sont pas exercées sur une partie significative de ce cadre territorial et qu'elles ne concernent que des enjeux purement locaux ; que l'agrément ne peut être délivré dans un cadre infra-départemental ;

6. Considérant que le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de délivrer l'agrément sollicité par l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " aux motifs que, d'une part, elle ne pouvait être regardée comme exerçant ses activités depuis trois ans au moins conformément à son objet statutaire, et que, d'autre part, elle intervenait essentiellement sur le territoire de la commune de Dinard et des communes littorales limitrophes ;

7. Considérant que si l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " a décidé d'adopter ce nom le 7 mai 2011, en même temps qu'elle modifiait l'article 1 de ses statuts pour étendre son champ d'activité à tout le département d'Ille-et-Vilaine et son objet à " tout fait de pollution ", il ressort des pièces du dossier que cette association existe depuis 1969, et agit depuis 1993 sous le nom d'association des amis de Dinard et Saint-Enogat ; que, dans ces conditions, le préfet d'Ille-et-Vilaine ne pouvait légalement refuser à l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " l'agrément qu'elle sollicitait au motif qu'elle n'exerçait pas ses activités conformément à son objet statutaire depuis trois ans ainsi que l'exige l'article R. 141-2 précité du code de l'environnement ;

8. Considérant, cependant, que l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " intervenait à la date de l'arrêté litigieux essentiellement sur le territoire de la commune de Dinard et des communes littorales limitrophes ; qu'il ressort des pièces du dossier, que ces activités, qui se concentraient alors sur ces seules communes, ne pouvaient être regardées comme étant exercées sur une partie significative des départements des Côtes d'Armor ou du Finistère ou de la région Bretagne au sens des dispositions précitées de l'article R. 141-3 du code de l'environnement ; qu'en appel, l'association, qui soutient que les pôles urbains ne nécessitent pas la même attention de la part des associations de protection de la nature que le littoral du département, a produit des pièces attestant de son changement de président en août 2015 et de sa coopération renforcée avec les administrations locales et départementales ; que ces documents montrent qu'elle a contribué à lutter contre l'affichage publicitaire illégal sur la commune de Dol-de-Bretagne, a participé à des réunions avec la direction départementale des territoires et de la mer et a échangé de nombreux courriels avec cette administration ; que dans un courrier du 17 juin 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine a d'ailleurs souligné son travail de terrain en matière de publicité extérieure ; que l'association justifie en outre de sa participation à de nombreuses enquêtes publiques portant sur les plans locaux d'urbanisme de La Richardais, de Le Minihic sur Rance, de Dinard, de Bazouges-la-Pérouse, de Saint-Coulomb, de La Gouesnière, de Saint-Malo et de Saint-Jouan-des-Guérets et sur des projets d'éoliennes notamment à Dinge, Tinteniac et Quebriac ainsi qu'à Marcillé-Raoul ; qu'elle a également pris part à l'enquête publique portant sur les risques de submersion marine dans la baie du Mont-Saint-Michel, à celle portant sur le schéma régional de cohérence écologique ainsi qu'à celle portant sur le schéma d'aménagement et de gestion des eaux du Pays de Dol-de-Bretagne et à celle portant sur le projet de culture d'algues à Saint-Malo ; qu'elle s'est opposée à certains projets immobiliers à Saint-Malo et à Cherrueix ; qu'elle a également participé à plusieurs réunions sur l'extension du périmètre de protection de la baie du Mont-Saint-Michel, sur les objectifs de la protection de la zone Natura 2000 à Pontorson et sur le projet de révision du schéma de cohérence territoriale du Pays de Saint-Malo ; que son dernier rapport d'activité présenté le 4 août 2016, atteste du nombre de ses adhérents et de la diversité de ses actions tant sur le canton de Dinard que dans la partie nord de l'Ille-et-Vilaine ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " ne peut être toutefois regardée comme exerçant ses activités sur une partie significative du département d'Ille-et-Vilaine qu'à compter de l'année 2015 ; que par suite, n'exerçant pas de telles activités sur une partie significative de ce département depuis au moins trois ans, elle ne remplit ni à la date de l'arrêté litigieux, ni même à la date du présent arrêt, l'ensemble des conditions requises pour se voir accorder un agrément au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement sur le territoire du département d'Ille-et-Vilaine pour une durée de 5 ans renouvelable ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre chargé de l'environnement est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a, d'une part, jugé que le préfet ne pouvait rejeter l'agrément sollicité par l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " et, d'autre part, l'a agréée " dans le cadre des communes littorales de l'arrondissement de Saint-Malo " ; que pour les mêmes motifs, les conclusions présentées devant la cour par l'association, tendant à ce que cet agrément lui soit accordé, doivent également être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1202643 du tribunal administratif de Rennes du 27 décembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, à l'association " Dinard Côte d'Emeraude Environnement " et au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 octobre 2017.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 16NT01994


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01994
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : BUSSON

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-05;16nt01994 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award