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02/10/2017 | FRANCE | N°16NT01347

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 02 octobre 2017, 16NT01347


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Entreprise agricole à responsabilité limitée (Earl) " Ferme du domaine ", la Société Civile (SCI) " Fermes des Aubriais " et M. et Mme E...ont demandé au Tribunal Administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2013 par lequel le maire de Taden (Cotes d'Armor) a délivré à M. F...un permis de construire pour la restauration et l'extension d'un ancien moulin situé sur la parcelle cadastrée D 331 au lieu-dit " La Billardais " ;

Par un jugement n° 1304984 du 26 février 2016, le tribuna

l administratif de Rennes a annulé cet arrêté ;

Procédure devant la cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Entreprise agricole à responsabilité limitée (Earl) " Ferme du domaine ", la Société Civile (SCI) " Fermes des Aubriais " et M. et Mme E...ont demandé au Tribunal Administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2013 par lequel le maire de Taden (Cotes d'Armor) a délivré à M. F...un permis de construire pour la restauration et l'extension d'un ancien moulin situé sur la parcelle cadastrée D 331 au lieu-dit " La Billardais " ;

Par un jugement n° 1304984 du 26 février 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté ;

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 avril 2016, M. F...représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de L'Earl Ferme du domaine, de la SCI Fermes des Aubriais et de M. et Mme E...;

3°) de mettre à la charge des demandeurs de première instance le versement, pour chacun, d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les demandeurs ne justifient pas d'une atteinte aux conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance d'un bien au sens de l'article L.600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les articles A1 et A2 du plan local d'urbanisme avaient été méconnus, dès lors qu'il a justifié de l'exploitation d'un cheptel de 47 ovins et de la nécessité d'une surveillance permanente compte tenu des risques d'attaque et de vols ;

- les travaux projetés respectent l'article A10 du plan local d'urbanisme dès lors que le moulin est une construction existante ;

- il en va de même s'agissant de l'application de l'article A11 de ce même règlement ;

- l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable au projet ;

- l'article UA2 ne trouve pas à s'appliquer au cas d'espèce.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 30 septembre 2016, 22 mai 2017 et 29 juin 2017, l'Earl " Ferme du domaine ", la SCI " Fermes des Aubriais " et M. et MmeE..., représentés par MeD..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. F... le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- leur demande est recevable compte tenu de leur qualité de voisin immédiat de la construction autorisée ;

- aucun des moyens soulevés par M. F... n'est fondé.

Par deux mémoires enregistrés le 28 avril 2017 et le 9 juin 2017, M. F...maintient ses conclusions initiales par les mêmes moyens et fait valoir que M.et Mme E...ne sont pas recevables à agir devant la cour.

Par un mémoire en observation, enregistré le 23 juin 2016, la commune de Taden, représentée par le cabinet Coudray, a déclaré s'associer aux conclusions de M. F...par les mêmes moyens que ceux invoqués par ce dernier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Pons,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour M.F..., de MeB..., substituant Me D..., pour l'Earl " Ferme du domaine ", la SCI " Fermes des Aubriais " et M. et Mme E...et de Me A...pour la commune de Taden, présente à l'audience en tant qu'observateur ;

Une note en délibéré présentée pour M. G... F...a été enregistrée le 22 septembre 2017.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. F...a sollicité, le 5 août 2013, la délivrance d'un permis de construire afin d'édifier, sur une parcelle cadastrée D.331 d'une superficie de 32 765 m² située sur le territoire de la commune de Taden (Côtes d'Armor) et régie par les dispositions du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de la commune, un bâtiment à usage d'habitation ; qu'il était ainsi envisagé la réhabilitation d'un ancien moulin dénommé " Moulin du Motay " et la réalisation, autour de ce moulin, d'une extension en rez-de-chaussée de forme circulaire, le tout entrainant la création d'une surface de plancher de 153,10 m² ainsi que cela ressort du tableau 5.5 de la demande de permis de construire ; que, par un arrêté en date du 4 décembre 2013, le maire de Taden a accordé l'autorisation sollicitée après avoir accepté une adaptation mineure rendue nécessaire par les caractéristiques et l'architecture du moulin ; que M. F...relève appel du jugement en date du 26 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a, à la demande de l'Earl " Ferme du Domaine " et de la SCI " Les Aubriais ", et après avoir écarté, pour défaut d'intérêt pour agir, les conclusions présentées au nom de M. et MmeE..., annulé ce permis ; que les défendeurs, qui n'ont pas relevé appel incident, se limitent à demander le rejet des conclusions de M.F... ;

Sur l'intervention de la commune de Taden :

2. Considérant que la commune de Taden a intérêt à l'annulation du jugement attaqué ; que, par suite, son intervention est recevable ;

Sur les fins de non recevoir opposées par M. F... :

3. Considérant, ainsi que l'a relevé le tribunal, que l'Earl " Ferme du Domaine " justifie, en sa qualité de locataire de la parcelle cadastrée section D n° 334, qui est limitrophe de la parcelle d'assiette de la construction projetée et sur laquelle elle bénéficie d'une autorisation d'épandage, d'un intérêt à agir contre le permis de construire litigieux dès lors que la construction projetée aura, en raison de la faible distance la séparant de cette parcelle agricole, une incidence directe sur ses conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance, compte tenu des règles de distance minimale imposées aux activités d'épandage par l'arrêté du 27 décembre 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ainsi que par le règlement sanitaire départemental ; que, la SCI " Ferme des Aubriais ", qui est propriétaire de cette parcelle, justifie, elle-aussi d'un intérêt à agir contre le permis de construire litigieux ;

Sur la demande d'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2013 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article A.1 du règlement du plan local d'urbanisme de Taden, sont interdites : " (...) - Toute nouvelle construction ou installation non liée et non nécessaire à l'exploitation agricole. / (...) Toute rénovation, reconstruction ou extension de bâtiments existants pour un usage non conforme aux objectifs relevant de la vocation de la zone (...) " ; qu'aux termes de l'article A.10 du même règlement : " La hauteur maximale du logement de fonction, mesurée à partir du sol naturel ne peut excéder 8 m au faîtage, 6 m à l'égout du toit. (...) " ; qu'aux termes de l'article A. 11 du même règlement: " Aspect extérieur des constructions et aménagement de leurs abords / (...) / 1 / Les constructions à usage de logement de fonction / a - Les rénovations, transformations et extensions des bâtiments des constructions traditionnelles / - Tous travaux portant sur des bâtiments anciens existants doivent respecter les dispositions d'origine et ne pas porter atteinte à la qualité architecturale du bâti. / (...) - Les extensions devront par leur volume, leur proportion, leur ordonnancement, les matériaux utilisés et leur accrochage au bâti existant être en parfaite harmonie avec lui (...) / Toitures : / Les bâtiments seront couverts en ardoises naturelles ou avec un matériau d'aspect similaire. / Les formes et les pentes de toitures seront respectées ; on évitera les toitures dissymétriques à pentes inférieures à 35° (...) " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le cheptel du requérant était composé de quarante-sept moutons à la date de délivrance du permis de construire litigieux ou que son exploitation agricole serait particulièrement exposée aux risques d'attaques de prédateurs ainsi qu'à des risques de vols ou de dégradations allégués ; que, dans ces conditions, la construction projetée ne peut être regardée comme étant nécessaire au fonctionnement de l'exploitation agricole de M. F...; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le permis de construire litigieux méconnaissait les articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme de Taden ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les hauteurs au faîtage et à l'égout du toit de la construction sont de 12,50 m et 9 m, alors que la hauteur maximale d'un logement de fonction est limitée à 8 m et 6 m par l'article A 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Taden cité ; que le dépassement des hauteurs prescrites est avéré ; qu'à cet égard, est sans incidence la circonstance que l'ancienne structure du moulin préexistant excèderait elle-même 8 m au faîtage ou 6 m à l'égout, dès lors le projet autorisé implique une aggravation de la méconnaissance de la règle de hauteur par la construction existante ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'il convient de rejeter le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux ne méconnaît pas l'article A.11 du règlement du plan local d'urbanisme de Taden, par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

8. Considérant, en dernier lieu, que les allégations du requérant selon lesquelles l'architecte des bâtiments de France aurait émis un avis favorable au projet de construction litigieux ne sont pas établies ; qu'en outre, la circonstance que cette autorité aurait indiqué avoir émis " mécaniquement " un avis défavorable est sans aucune incidence sur la validité d'un avis émis officiellement par cette autorité ;

9. Considérant, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun autre moyen n'est susceptible, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation du permis de construire litigieux ;

Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation " ; qu'aux termes de l'article L.600-5-1 du même code : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. " ;

11. Considérant que l'illégalité mentionnée au point 4 affecte l'ensemble du projet contesté et n'est pas susceptible de donner lieu à régularisation par la délivrance d'un permis modificatif ; que, par suite, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions précitées des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de justice administrative ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de M. F...présentées sur le fondement de cet article dès lors que les intimés ne peuvent être considérés comme étant les parties perdantes dans la présente instance ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F...la somme de 3 000 euros à verser à l'Earl " Ferme du Domaine " et à la SCI " Ferme des Aubriais " sur le fondement des dispositions visées ; que les conclusions de M. et Mme E...à ce titre ne peuvent qu'être rejetées, dès lors que ces derniers ne contestent pas devant la cour l'irrecevabilité opposée à leur demande initiale ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la commune de Taden est admise.

Article 2 : La requête de M. F...est rejetée.

Article 3 : M. F...versera à l'Earl " Ferme du Domaine " et à la SCI " Ferme des Aubriais " la somme globale de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'Earl " Ferme du Domaine ", de la SCI " Ferme des Aubriais " et de M. et Mme E...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F..., à la Earl "Ferme du Domaine", à la SCI "Ferme des Aubriais", à M. et Mme E... et à la commune de Taden.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 octobre 2017.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la Cohésion des Territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01347
Date de la décision : 02/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : CABINET GERVAISE DUBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-02;16nt01347 ?
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