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29/06/2017 | FRANCE | N°15NT03369

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 29 juin 2017, 15NT03369


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Meunier Industries a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et intérêts de retard, de la somme totale de 33 489 euros mise à sa charge au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 correspondant à une créance au titre du report en arrière de déficits.

Par un jugement n° 1302275 du 28 août 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée

le 4 novembre 2015, la SAS Meunier Industries, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Meunier Industries a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et intérêts de retard, de la somme totale de 33 489 euros mise à sa charge au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 correspondant à une créance au titre du report en arrière de déficits.

Par un jugement n° 1302275 du 28 août 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2015, la SAS Meunier Industries, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 28 août 2015 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, de la somme totale de 33 489 euros mise à sa charge au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 correspondant à une créance au titre du report en arrière de déficits et, au même titre, de la somme de 11 271 euros en 2009 et de 19 186 euros en 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales en la privant d'un débat contradictoire ; elle se prévaut du commentaire administratif n° 30 du BOI-REC-PREA-10-10 du 12 septembre 2012 ;

- l'administration aurait dû lui notifier l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires adressé à sa filiale, la société bretonne de réparation navale (SOBRENA) ;

- l'administration n'a pas déclaré ses créances entre les mains du mandataire judiciaire de la société SOBRENA en méconnaissance de l'article R. 261-1 du livre des procédures fiscales, des articles L. 622-24 et R. 622-24 et suivants du code de commerce ;

- elle justifie du montant des provisions pour dépréciation de stocks de la société SOBRENA par une méthode de calcul statistique suffisamment précise et détaillée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Meunier Industries ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chollet,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

1. Considérant que la société par actions simplifiée (SAS) Sobrena, membre du groupe fiscal intégré dont la SAS Meunier Industries est la société mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service lui a notifié, au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, des redressements en matière d'impôt sur les sociétés ; que, conformément aux dispositions de l'article 223 A du code général des impôts, la SAS Meunier Industries a été informée, par un courrier du 11 décembre 2012, des rehaussements ainsi notifiés à sa filiale ; que, par un avis de mise en recouvrement du 8 février 2013, la somme totale de 33 489 euros correspondant à une créance au titre du report en arrière de déficits a été mise à sa charge au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008, en sa qualité de société tête de groupe ; qu'elle relève appel du jugement du 28 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette somme ; qu'elle demande en outre à la cour de prononcer la décharge de suppléments d'imposition de 11 271 euros au titre de l'exercice clos en 2009 et de 19 186 euros au titre de l'exercice clos en 2010 correspondant à des reports en arrière de déficits ;

Sur l'exercice clos en 2008 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 223 A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe. (...) / (...) / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. La société mère supporte, au regard des droits et des pénalités (...), les conséquences des infractions commises par les sociétés du groupe. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales : " (...) / Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des différentes sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de redressement, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales ; que les redressements ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom ; que pour informer, préalablement à cette mise en recouvrement, la société mère des conséquences des redressements notifiés aux sociétés membres du groupe, aucune disposition n'impose à l'administration fiscale de suivre les règles procédurales prévues à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

4. Considérant qu'il n'est pas contesté que les règles énoncées par les dispositions des articles L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales ont été respectées par l'administration dans le cadre de la procédure suivie à l'encontre de la société SOBRENA et que la SAS Meunier Industries a été suffisamment informée des conséquences pour elle de la rectification des résultats de cette filiale, par courrier du 11 décembre 2012, conformément aux dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ; que la SAS Meunier Industries n'a fait l'objet d'aucune opération de contrôle propre en sa qualité de société tête de groupe ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à se prévaloir, s'agissant de redressements qui lui ont été assignés en sa seule qualité de société mère redevable de l'impôt dû par l'ensemble du groupe, d'une part, de l'absence de débat contradictoire avec l'administration et de communication de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 5 octobre 2012 notifié à sa filiale et, d'autre part, de l'absence de possibilité pour elle d'exercer les recours hiérarchiques mentionnés dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifiée invocable sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant, en outre, que, contrairement à ce qu'elle soutient, la société requérante n'a pas la qualité de débiteur solidaire de la société SOBRENA ; que, dès lors, elle ne se prévaut pas utilement du non-respect des règles de procédure inhérentes à cette qualité ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'en sa qualité de société tête d'un groupe fiscalement intégré, la SAS Meunier Industries est seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû au titre des résultats de l'ensemble de son groupe ; qu'il suit de là qu'elle n'est pas fondée à se prévaloir du comportement de l'administration à l'égard de sa filiale et, notamment, du fait que l'administration n'aurait pas déclaré ses créances entre les mains du mandataire-liquidateur de la société SOBRENA lors de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire dont cette société a fait l'objet ; que, dès lors, et en tout état de cause, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 622-24 et R. 622-24 et suivants du code du commerce doivent être écartés ;

7. Considérant, enfin, que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir des commentaires administratifs publiés au paragraphe 30 du BOI-REC-PREA-10-10 du 12 septembre 2012 portant sur les mesures préalables à l'action en recouvrement en cas de pluralité de débiteurs, ces commentaires étant relatifs à la procédure d'imposition et ne pouvant, en tout état de cause, être regardés comme comportant une interprétation d'un texte fiscal au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

8. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions du 3° de l'article 38 et du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts que lorsqu'une entreprise constate que tout ou partie des matières ou produits qu'elle possède en stock a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation ; que si pareille provision peut être évaluée par des méthodes statistiques, c'est à la condition que son évaluation soit faite de manière précise et suffisamment détaillée selon les catégories de produits en stock ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société SOBRENA a constitué des provisions afin de tenir compte de la dépréciation de son stock de pièces détachées, composé essentiellement de tôles de diverses références, à hauteur de 89 069 euros au titre de l'exercice clos en 2008, 122 882 euros au titre de l'exercice clos en 2009 et 180 440 euros au titre de l'exercice clos en 2010 ; que ces provisions ont été calculées en appliquant, quel que soit le bien en stock, le même taux de dépréciation forfaitaire, s'il s'avère qu'aucun achat de ce bien n'a été effectué depuis plus d'un, deux, trois, quatre, cinq ou six ans ; que le taux ainsi calculé commence à 15 % lorsque le bien n'a pas été acheté depuis plus d'un an et augmente par pallier de 15 % jusqu'à 90 % lorsque le bien n'a plus été acheté depuis plus de six ans ; que l'administration a estimé que cette méthode ne présentait pas un caractère d'approximation suffisante ;

10. Considérant que la SAS Meunier Industries soutient que sa filiale a évalué ainsi la dépréciation de son stock en utilisant une méthode statistique reposant sur son expérience et tenant compte de la présence au sein de ce stock de chutes de tôles et d'éléments se corrodant ; que, toutefois, ce mode de calcul ne tient pas compte des différentes références de tôles composant les stocks ni, eu égard à cette spécificité, de leur degré inégal d'obsolescence pour une durée identique de séjour en stock ;

11. Considérant, en outre, que la SAS Meunier Industries n'est pas fondée à se prévaloir de ce qu'un commissaire-priseur a évalué la valeur de son stock au 31 décembre 2011 lors de la procédure de redressement judiciaire et qu'il a contrôlé et validé cette valeur le 20 janvier 2012, ni de ce que le prix auquel le stock de la société SOBRENA a été cédé, le 26 septembre 2012, confirme le bien-fondé des provisions comptabilisées dès lors que ces évaluations ont été réalisées postérieurement à la date de clôture des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'établit pas que la dépréciation des stocks de la société SOBRENA a été déterminée avec un caractère d'approximation suffisante ;

Sur les exercices clos en 2009 et en 2010 :

13. Considérant que les conclusions de la SAS Meunier Industries tendant à la décharge de suppléments d'imposition de 11 271 euros au titre de l'exercice clos en 2009 et de 19 186 euros au titre de l'exercice clos en 2010 correspondant à des reports en arrière de déficits sont dépourvues d'objet ; que, dès lors et en tout état de cause, elles ne peuvent être accueillies ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Meunier Industries n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Meunier Industries est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiées (SAS) Meunier Industries et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- Mme Chollet, premier conseiller,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juin 2017.

Le rapporteur,

L. Chollet

Le président,

S. Aubert

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT03369


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03369
Date de la décision : 29/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : BRETLIM

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-29;15nt03369 ?
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