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09/06/2017 | FRANCE | N°15NT03599

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 juin 2017, 15NT03599


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires, née le 25 avril 2013, portant rejet de sa réclamation dirigée contre la décision du 7 mars 2013 de déclassement d'emploi, et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 255 euros et 1 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime en résulter.

Par un jugement n° 1304225 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a r

ejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enreg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires, née le 25 avril 2013, portant rejet de sa réclamation dirigée contre la décision du 7 mars 2013 de déclassement d'emploi, et de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 255 euros et 1 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime en résulter.

Par un jugement n° 1304225 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 novembre 2015 et le 12 mai 2017 M. A... B..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2015 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de condamner l'État à lui verser une somme de 1 255 euros en réparation de ses préjudices, somme assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur quant à la qualification juridique des faits qui lui ont été reprochés et quant à la nature de la décision contestée ; le déclassement dont il a fait l'objet était en réalité une sanction disciplinaire ; or la procédure suivie ne correspondait pas à une procédure de type disciplinaire ;

- la décision contestée est entachée d'erreur de droit car elle n'a pas été prise sur le fondement des dispositions relatives aux sanctions disciplinaires ;

- elle est disproportionnée et entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est également entachée de détournement de pouvoir ; elle est en effet motivée par ses absences alors qu'il était tenu de se rendre régulièrement au service médico-psychologique, ce qui lui a valu un constat d'incompétence professionnelle injustifié ;

- son préjudice financier s'élève à 255 euros ;

- son préjudice moral doit être évalué à 1 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 février 2017, le Garde des Sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens développés par M. B...n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.

1. Considérant que M.B..., né le 4 mai 1972, incarcéré au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin depuis le 31 août 2010 en exécution de plusieurs condamnations pénales, a, par un acte d'engagement du 6 février 2013, été affecté au service général de cet établissement en tant qu'agent de restauration à compter du 7 février jusqu'au 30 avril 2013 ; qu'il a fait l'objet d'une mesure de suspension à compter du 11 février 2013 pour des faits qui, après enquête, n'ont pas donné lieu à sanction ; qu'à son retour, il a été réintégré le 20 février 2013 et affecté sur un poste de plongeur alors qu'il était initialement placé sur un poste à la chaîne ; que M. B...s'est alors manifesté pour obtenir des explications sur ce changement d'affectation, et a fait le même jour l'objet de deux signalements de comportement non professionnel établis respectivement à 11h00 et 16h00, aux motifs d'un volume de travail insuffisant ; que, par une lettre en date du 25 février 2013, le directeur de l'établissement informait M. B...qu'une procédure de déclassement d'emploi était engagée à son encontre et qu'il pouvait, en vertu de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, présenter des observations écrites et orales ; qu'après que l'intéressé eut présenté des observations écrites le 1er mars 2013 et bénéficié d'un débat contradictoire le matin du 7 mars 2013, une décision de déclassement d'emploi a été prise à son encontre ce même jour ; que le recours hiérarchique qu'il a formé le 22 mars 2013 contre cette décision, par un courrier reçu le 25 mars suivant par les services de l'administration, a été implicitement rejeté ; qu'après avoir présenté une demande préalable d'indemnisation du fait de l'illégalité invoquée de la décision de déclassement d'emploi prise à son encontre, M. B...a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet survenue le 25 avril 2013 et à la condamnation de l'État à lui verser la somme de

1 255 euros au titre de l'ensemble de ses préjudices ; qu'il relève appel du jugement du 25 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire : " Toute personne condamnée est tenue d'exercer au moins l'une des activités qui lui est proposée par le chef d'établissement et le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation dès lors qu'elle a pour finalité la réinsertion de l'intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités, à son handicap et à sa personnalité./ Lorsque la personne condamnée ne maîtrise pas les enseignements fondamentaux, l'activité consiste par priorité en l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul. Lorsqu'elle ne maîtrise pas la langue française, l'activité consiste par priorité en son apprentissage. L'organisation des apprentissages est aménagée lorsqu'elle exerce une activité de travail " ; qu'aux termes de l'article R. 57-9-1 du code de procédure pénale applicable à la date de la décision contestée : " La personne détenue condamnée remplit l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article 27 de la loi n°2009-1436 du 24 novembre 2009 lorsqu'elle exerce au moins l'une des activités relevant de l'un des domaines suivants : travail, formation professionnelle, enseignement, programmes de prévention de la récidive, activités éducatives, culturelles, socioculturelles, sportives et physiques. " ; qu'aux termes de l'article

D. 432-4 du même code : " Lorsque la personne détenue s'avère incompétente pour l'exécution d'une tâche, cette défaillance peut entraîner le déclassement de cet emploi. (...)" ; qu'enfin selon l'article R. 57-7-34 du même code : " Lorsque la personne détenue est majeure, les sanctions disciplinaires suivantes peuvent également être prononcées : / 2° Le déclassement d'un emploi ou d'une formation lorsque la faute disciplinaire a été commise au cours ou à l'occasion de l'activité considérée. (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que la décision de déclassement d'emploi du 7 mars 2013 a été prise pour des raisons disciplinaires et constitue en réalité une sanction disciplinaire au sens des dispositions précitées de l'article R. 57-7-34 du code de procédure pénale, de sorte qu'elle est entachée de vices de procédure et d'erreur de droit ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction, et en particulier du mémoire en défense produit devant le tribunal administratif de Rennes par le ministre de la justice et qui, s'il n'a pas été communiqué au requérant, fait partie en appel des pièces de la procédure, que le ministre a entendu rectifier l'erreur de visa des textes contenue dans la décision contestée en demandant qu'y soient substituées les dispositions de l'article D. 432-4 du code de procédure pénale telles que rappelées au point 2 ; qu'il est, par ailleurs, non contesté que la procédure qui a été suivie par le directeur de l'établissement pénitentiaire présentait toutes les garanties correspondant à une mesure de déclassement non disciplinaire ; qu'enfin les faits reprochés à M.B..., qui a ralenti le fonctionnement de la cuisine en contestant de manière récurrente son affectation à la plonge et n'a pas effectué la quantité de travail qui était attendue de lui, sont au nombre de ceux pouvant caractériser l'incompétence d'un détenu dans l'exécution de ses tâches au sens des dispositions de l'article D. 432-4 du code de procédure pénale et peuvent, dès lors, justifier une mesure administrative de déclassement d'emploi ; qu'ainsi la décision contestée du 7 mars 2013, qui doit être regardée comme étant intervenue sur la base de ces dernières dispositions, n'est entachée ni de vice de procédure ni d'erreur de droit ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard aux faits reprochés à M. B...et à la description rappelée dans la décision contestée des difficultés dans le fonctionnement général des cuisines et de la mauvaise ambiance générées par la présence et le manque de sérieux de l'intéressé dans ce service, les autres personnes détenues devant notamment assumer les tâches laissées par lui, il ne résulte pas de l'instruction que la décision de déclassement d'emploi du directeur du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin du 7 mars 2013 prise à l'encontre du requérant reposerait sur une erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant, enfin, que le moyen tiré du détournement de pouvoir allégué, qui n'est pas établi, ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, la décision de déclassement du 7 mars 2013, de même que la décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé par l'intéressé à son encontre le 22 mars 2013, n'étant entachée d'aucune illégalité, elle ne constitue pas une décision fautive susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de M. B... ; que les conclusions indemnitaires présentées par ce dernier ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au Garde des Sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Le Bris premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 juin 2016.

Le rapporteur,

O. Coiffet

Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au Garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT03599


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03599
Date de la décision : 09/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

37-05-02-01 Juridictions administratives et judiciaires. Exécution des jugements. Exécution des peines. Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : CABINET COUDRAY CONSEIL et CONTENTIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-09;15nt03599 ?
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