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18/05/2017 | FRANCE | N°17NT00069

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 mai 2017, 17NT00069


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions du 25 mai 2016 par lesquelles le préfet du Maine-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.

Par un jugement n° 1605868 du 7 décembre 2016, le tribunal administra

tif de Nantes a fait droit à la demande de MmeA..., a enjoint au préfet du Maine-et-Loi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions du 25 mai 2016 par lesquelles le préfet du Maine-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.

Par un jugement n° 1605868 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à la demande de MmeA..., a enjoint au préfet du Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2017, le préfet du Maine-et-Loire demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il était tenu de refuser le titre de séjour en qualité de parent d'enfant français sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la reconnaissance de paternité dont la requérante s'est prévalue était frauduleuse ;

- il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2017, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

- de confirmer le jugement attaqué ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision lui refusant le renouvellement d'un titre de séjour viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est fondée sur une décision illégale de refus de titre de séjour ; elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est fondée sur une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois est fondée sur des décisions illégales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chollet.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante chinoise née le 8 février 1985 à Zhenjiang (Chine), déclare être entrée en France en 2003 munie d'un visa touristique ; qu'elle a obtenu en 2009 un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, régulièrement renouvelé jusqu'au 5 octobre 2015 ; que sa demande d'une carte de résident sur le fondement du 2° de l'article L. 314-9, présentée le 14 octobre 2015, a été rejetée par décisions du 25 mai 2016 du préfet du Maine-et-Loire l'obligeant également à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois ; que Mme A...en a demandé l'annulation au tribunal administratif de Nantes qui, par un jugement du 7 décembre 2016, dont le préfet relève appel, a fait droit à sa demande ;

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Considérant que lorsque l'autorité compétente envisage de prendre une mesure de retrait d'un titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, qui prive un étranger du droit au séjour en France, il lui incombe notamment de s'assurer, en prenant en compte l'ensemble des circonstances relatives à la vie privée et familiale de l'intéressé, que cette mesure n'est pas de nature à porter à celle-ci une atteinte disproportionnée ; que s'il appartient à l'autorité administrative de tenir compte de manoeuvres frauduleuses avérées qui, en raison notamment de leur nature, de leur durée et des circonstances dans lesquelles la fraude a été commise, sont susceptibles d'influer sur son appréciation, elle ne saurait se dispenser de prendre en compte les circonstances propres à la vie privée et familiale de l'intéressé postérieures à ces manoeuvres au motif qu'elles se rapporteraient à une période entachée par la fraude ;

3. Considérant que MmeA..., qui ne justifie pas de manière probante sa présence en France depuis avril 2003 ainsi qu'elle le soutient, n'a pu se maintenir sur le territoire français entre 2009 et 2015 que sous couvert d'un titre de séjour en qualité de mère d'un enfant français obtenu au bénéfice d'une fraude ; qu'il ressort des pièces du dossier que le père des deux enfants de Mme A...nés en France en 2007 et 2010 est un ressortissant chinois qui réside selon sa déclaration en septembre 2014 à Barcelone (Espagne) ; que la mère de Mme A...fait l'objet d'un refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français du 25 mai 2016 ; que l'intéressée ne se prévaut d'aucune circonstance faisant obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Chine où résident son père et sa soeur ; qu'en outre, si Mme A...produit des bulletins de paye pour un emploi de serveuse au sein d'un établissement de restauration japonaise pour les mois de juillet 2010 à décembre 2014, dont elle est gérante salariée depuis 2013 et qui est actuellement en liquidation judiciaire, il ressort des pièces du dossier qu'elle a été condamnée à deux mois de prison avec sursis pour exécution d'un travail dissimulé et emploi d'un étranger non muni d'une autorisation provisoire de séjour pour la même période du 18 janvier au 19 juillet 2012 ; qu'enfin, elle n'établit pas l'intensité des liens personnels qu'elle aurait développés depuis son arrivée en France ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas porté au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a retenu le moyen tiré d'une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de Mme A...pour annuler la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A...tant devant le tribunal administratif de Nantes que devant la cour ;

Sur le moyen commun aux différentes décisions :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les décisions du 25 janvier 2016 ont été signées par M. Pascal Gauci, secrétaire général de la préfecture de Maine-et-Loire, en vertu d'un arrêté du 26 octobre 2015 du préfet de ce département, régulièrement publié le même jour au recueil spécial n° 79 des actes administratifs de l'Etat dans le département, lui donnant délégation pour signer tous arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de Maine-et-Loire sous réserve d'exceptions dans le champ d'application desquelles les décisions contestées n'entrent pas ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour, obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de destination et interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois, manque en fait et doit être écarté ;

Sur la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

6. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas établie, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de son illégalité doit être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne viole pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant que l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de son illégalité doit être écarté ;

Sur la décision interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois :

10. Considérant, en premier lieu, que l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de son illégalité doit être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

12. Considérant que compte-tenu de la situation personnelle de la requérante telle que décrite au point 3 du présent arrêt et au regard des éléments relevés par le préfet dans la décision contestée, le préfet n'a pas inexactement apprécié la situation de l'intéressée au regard des critères prévus par les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions du 25 mai 2016 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et interdisant de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " à Mme A...dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 décembre 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme C...A....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Chollet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 mai 2017.

Le rapporteur,

L. CholletLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17NT00069 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00069
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET SARAH SCALBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-05-18;17nt00069 ?
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