Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du préfet de la Sarthe du 12 novembre 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1600792 du 10 mai 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, enjoint au préfet de la Sarthe de réexaminer la situation administrative de M.B..., mis à la charge de l'Etat le versement à Me Cloarec, avocat du demandeur, de la somme de 600 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, et rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 mai et 12 octobre 2016, le préfet de la Sarthe demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 mai 2016 en tant qu'il a annulé ses décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
Il soutient que :
- à la date à laquelle la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise, il n'avait pas encore été saisi d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade et n'avait pas connaissance des pathologies que présente M.B... ; l'intéressé n'est donc pas fondé à se prévaloir de ses problèmes de santé sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas dépourvue de base légale ;
- l'offre de soins dans le domaine de la psychiatrie est suffisante en République démocratique du Congo ; l'hépatite B que présente M. B...nécessite seulement une surveillance médicale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2016, M.B..., représenté par M. Cloarec, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête du préfet de la Sarthe ;
2°) par la voie de l'appel incident, d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens invoqués par le préfet de la Sarthe ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 août 2016.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bougrine a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que le préfet de la Sarthe relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 mai 2016 en tant qu'il a annulé, à la demande de M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, ses décisions du 12 novembre 2015 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi au motif que la décision portant obligation de quitter le territoire français était entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant qu'il est constant qu'à la date du 12 novembre 2015 à laquelle le préfet de la Sarthe a assorti la décision de refus de titre de séjour opposée à M. B...de décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, l'intéressé n'avait pas encore présenté une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade, cette demande, datée du 20 novembre 2015, ayant été reçue par les services de la préfecture le 1er décembre suivant ; qu'il suit de là que les premiers juges ne pouvaient pas se fonder sur l'obligation faite à l'administration d'instruire la demande de titre de séjour du 20 novembre 2015, contemporaine selon eux, des décisions contestées, pour regarder la décision portant obligation de quitter le territoire français comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.B... ; que, dès lors, le préfet de la Sarthe est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, pour ce motif, annulé cette décision ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de renvoi ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'examiner, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les autres moyens invoqués par M.B..., tant en première instance qu'en appel, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ;
5. Considérant que M. B...fait valoir qu'il ne pourra bénéficier en République démocratique du Congo ni du traitement médicamenteux à base de Zolpidem et de Rispéridone qui lui est prescrit depuis octobre 2013 pour les troubles anxio-dépressifs qu'il présente ni d'une prise en charge satisfaisante de l'hépatite B chronique qui a été diagnostiquée en mars 2015 et qui nécessite des examens trimestriels, en raison des insuffisances du système de soins congolais et du coût des soins ; qu'il ressort de la fiche sanitaire relative à l'offre de soins en République démocratique du Congo dont il se prévaut que l'offre de soins relative aux troubles mentaux et du comportement est suffisante sauf en ce qui concerne les antidépresseurs pour lesquels elle est qualifiée de très insuffisante et qu'il n'existe aucune offre de soins pour la surveillance clinique et biologique de l'hépatite B chronique ; que, toutefois, les deux médicaments qui sont prescrits à M. B...n'appartiennent pas à la catégorie des antidépresseurs ; qu'en outre, les autres documents qu'il produit, notamment les certificats médicaux établis respectivement par un psychiatre et un médecin spécialiste en hépatologie et en gastro-entérologie, n'établissent pas que l'absence de prise en charge médicale des troubles anxio-dépressifs qu'il présente et de surveillance de l'hépatite B dont il souffre étaient susceptibles d'avoir, à la date de la décision portant obligation de quitter le territoire français, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'enfin les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impliquent aucune appréciation quant au caractère effectif de l'accès au traitement en raison de la situation particulière du demandeur ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, dès lors, être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M.B... ;
7. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Sarthe est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M.B..., ses décisions du 12 novembre 2015 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Considérant que M. B..., qui a présenté dans son mémoire en défense des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, peut être regardé comme demandant l'annulation du jugement en tant qu'il a seulement enjoint au préfet de réexaminer sa situation ; que l'exécution du présent arrêt, qui annule le jugement en tant qu'il a partiellement fait droit aux conclusions aux fins d'annulation de M.B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, ses conclusions d'appel incident tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme dont M. B...demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 mai 2016 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Sarthe du 12 novembre 2015 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi et ses conclusions d'appel incident sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 6 avril 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Aubert, président de chambre,
- Mme Chollet, premier conseiller,
- Mme Bougrine , premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 mai 2017.
Le rapporteur,
K. BougrineLe président,
S. Aubert
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
N° 16NT01675 2
1