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24/02/2017 | FRANCE | N°15NT02075

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 février 2017, 15NT02075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sci de la Voie au Roy a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 23 septembre 2013 portant refus d'autorisation d'exploiter des parcelles d'une surface de 19 ha 36 a situées sur la commune de Longues-sur-Mer.

Par un jugement n° 1302128 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 9 juillet 2015 et 3 février 2017 la Sci de la Voie au Roy, r

eprésentée par Me Rousselot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sci de la Voie au Roy a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 23 septembre 2013 portant refus d'autorisation d'exploiter des parcelles d'une surface de 19 ha 36 a situées sur la commune de Longues-sur-Mer.

Par un jugement n° 1302128 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 9 juillet 2015 et 3 février 2017 la Sci de la Voie au Roy, représentée par Me Rousselot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 7 mai 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2013 du préfet du Calvados portant refus d'autorisation d'exploiter ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande relève du régime de la déclaration préalable en application de l'article L. 331-2 II du code rural et de la pêche maritime ; elle remplit les trois critères fixés par cet article ; c'est à tort que le tribunal a estimé que les biens n'étaient pas libres de location à la date de sa demande et à la date de la décision contestée alors que le code rural exige seulement que le bien soit libre de location à la date de la déclaration ; en effet elle avait délivré congé au preneur en place ;

- sa demande ne relevait pas du régime de l'autorisation dès lors que la surface exploitée est inférieure au seuil fixé par l'article L. 312-5 du code rural et de la pêche maritime ; la surface de 51 ha 91a exploitée par la Scea Ferme du Pavillon et dont elle est propriétaire ne peut être prise en compte, dès lors qu'elle n'a pas la qualité d'associée au sein de cette Scea ; aucun texte ne justifie de soumettre au régime de l'agrandissement l'exploitation par elle de 19 ha de terre dont elle est propriétaire ;

- le préfet a commis une erreur de droit en examinant la demande au regard des critères et de l'ordre de priorité déterminés par le schéma directeur départemental des structures agricoles dans la mesure où il n'était pas saisi de demandes concurrentes de la Sci de la Voie au Roy et du Gaec d'Aunay.

Par un mémoire enregistré le 19 avril 2016 M. E...D...et le Gaec d'Aunay concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la Sci de la Voie au Roy la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2016, le ministre de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par la Sci la Voie au Roy ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Rousselot, avocat de la Sci de la Voie au Roy.

1. Considérant que la Sci de la Voie au Roy, qui est composée de cinq associés, les époux A...et ClaudineF..., MM.C..., H...et B...F..., seul ce dernier ayant la qualité d'exploitant agricole, est propriétaire de 51ha 91a de terres mises en valeur au sein de la société civile d'exploitation agricole (Scea) Ferme du Pavillon, entité qui est composée des mêmes associés à l'exception de Mme G...F... ; que la Sci la Voie au Roy a demandé le 9 juillet 2013 au préfet du Calvados l'autorisation d'exploiter 19ha 36a de parcelles portant les références cadastrales AE 24, ZB 150, ZD 34, ZM 28, ZM 29, ZM 30, ZM 204 et ZM 206, situées sur le territoire de la commune de Longues-sur-Mer et dont elle est par ailleurs propriétaire ; que ces différentes parcelles étaient prises à bail par M.D..., membre du groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec) d'Aunay, auquel elle a le 11 avril 2013 donné congé, à l'exception d'une parcelle cadastrée AE 24 ; qu'après avoir consulté la commission départementale d'orientation de l'agriculture, qui s'est réunie le 10 octobre 2013, le préfet du Calvados a, par un arrêté du 23 septembre 2013, refusé d'accorder à la Sci de la Voie au Roy l'autorisation d'exploiter sollicitée ; que cette dernière relève appel du jugement du 7 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime : " I.-Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures. Ce seuil est compris entre une et deux fois l'unité de référence définie à l'article L. 312-5. (...) Pour déterminer la superficie totale mise en valeur, il est tenu compte des superficies exploitées par le demandeur sous quelque forme que ce soit (...) II.-Par dérogation au I, est soumise à déclaration préalable la mise en valeur d'un bien agricole reçu par donation, location, vente ou succession d'un parent ou allié jusqu'au troisième degré inclus lorsque les conditions suivantes sont remplies : 1° Le déclarant satisfait aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnée au 3° du I ; 2° Les biens sont libres de location au jour de la déclaration ; 3° Les biens sont détenus par ce parent ou allié depuis neuf ans au moins. (...). " ; qu'aux termes de l'article L.331-1 du même code, dans sa rédaction applicable : " (...) Est qualifiée d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L.311-1 (...) " ; que l'article 4 du schéma directeur départemental des structures agricoles du Calvados dispose quant à lui : " En application de l'article L. 331-2 du code rural, sont soumis à autorisation préalable : 1°) Les installations, agrandissements, ou réunions d'exploitations ayant une surface exploitée avant l'opération supérieure aux seuils fixés ci-après ou ayant pour conséquence, en tant compte des surfaces objet du projet de reprise de porter la surface exploitée au-delà de ces seuils : BESSIN : 70 ha (...). " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la mise en valeur des parcelles litigieuses ne résulte ni d'une donation, ni d'une location, ni d'une vente ou succession d'un parent ou allié jusqu'au troisième degré inclus mais du congé donné le 11 avril 2013 au Gaec d'Aunay, exploitant en place des terres litigieuses, par la Sci de la Voie au Roy propriétaire de ces terres ; que, par ailleurs, ce congé ne prenait effet qu'au 24 décembre 2013, de telle sorte que les parcelles objet de la demande n'étaient pas libres de location ni au jour de la demande d'autorisation présentée le 9 juillet 2013 ni à la date du 23 septembre 2013 à laquelle est intervenu l'arrêté contesté ; qu'il suit de là que la Sci de la Voie au Roy n'est pas fondée à soutenir que l'opération projetée n'était pas soumise à autorisation préalable mais relevait du régime de la déclaration défini au II précité de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si la Sci de la Voie au Roy soutient que le préfet ne pouvait, pour instruire sa demande, prendre en compte de manière cumulée les terres exploitées par la Scea Ferme du Pavillon et les terres dont la mise en valeur était envisagée par elle et que c'est à tort que lui a été appliqué le seuil de déclenchement du contrôle des structures, il ressort toutefois des pièces du dossier que la Scea Ferme du Pavillon est composée de quatre des cinq associés de la Sci requérante, qu'elle est dirigée par le même exploitant agricole, MichelF..., et qu'elle exploite des terres d'une superficie de 51 ha 91 a, dont la Sci requérante est elle-même propriétaire, et qui sont pour la plupart d'entre elles situées sur le territoire de la même commune de Longues sur mer que les parcelles en litige, dont elles sont adjacentes ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que, pour déterminer " la superficie totale mise en valeur " au sens de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, le préfet du Calvados a pris en considération les parcelles déjà mises en valeur par MichelF..., seul associé exploitant de la Sci requérante, dans le cadre de la Scea Ferme du Pavillon, et celles qu'il projetait de mettre en valeur dans le cadre de la Sci La Voie au Roy, pour estimer que ces dernières parcelles permettaient l'agrandissement d'une exploitation agricole existante ; que, la superficie de 51ha 91a, cumulée à celle des terres faisant l'objet du refus d'autorisation contesté soit 19 ha 36 a, représentant une superficie totale de 71 ha 27 a, supérieure au seuil fixé par les dispositions précitées de l'article 4 du schéma directeur départemental des structures agricoles du Calvados, le préfet du Calvados, qui devait tenir compte de l'ensemble des terres exploitées par la Sci demanderesse sous quelque forme que ce soit, a pu ainsi, sans commettre d'erreur de droit, estimer que la demande de la Sci requérante relevait du régime de l'autorisation ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment :1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande (...)3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objet de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; / 4°Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...)6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; (...)." ; qu'aux termes de l'article 2 du schéma directeur départemental des structures agricoles : " Les orientations de la politique des structures dans le département du Calvados sont ainsi définies : 1- Eviter le démembrement : éviter le démembrement ou le changement de production d'exploitations mises aux normes avec des aides publiques. (...) 5- Conforter l'agrandissement (...) 5-2 : conforter l'agrandissement des exploitations d'agriculteurs à titre principal en tenant compte de l'ensemble des activités agricoles et non agricoles du demandeur, appréciées au moyen du système d'équivalence défini dans le projet agricole départemental (PAD) (...)" ;

6. Considérant que pour refuser l'autorisation d'exploiter sollicitée, le préfet du Calvados s'est, notamment, fondé sur les orientations définies au 5-2 de l'article 2 du schéma directeur départemental, cité au point précédent, et sur les dispositions des 3° et 4° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, appréciant la demande de la Sci de la Voie au Roy au regard d'un système d'équivalence défini dans le projet agricole départemental et sur la base des équivalences et de la situation respectives de la Sci et du Gaec d'Aunay et prenant en compte l'activité principale exercée par chacun des exploitants concernés ; qu'il en a conclu que la dimension économique de chacune des exploitations correspondait à une équivalence de 2,83 pour la Sci requérante et de 1,26 pour le Gaec, et que cet écart justifiait un refus d'autorisation d'exploiter au profit de la Sci ; qu'ainsi, et alors même qu'il avait également retenu le motif, erroné en droit en l'absence de demande concurrente, tiré de ce que l'ordre des priorités fixé par le schéma directeur des structures agricoles devait être respecté, le préfet du Calvados a pu légalement, pour ce seul premier motif, refuser l'autorisation sollicitée ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Sci de la Voie au Roy n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la Sci de la Voie au Roy de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière la somme demandée par M. D...et le Gaec d'Aunay au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Sci de la Voie au Roy est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. D...et le Gaec d'Aunay au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Sci de la Voie eu Roy, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement et à M. E...D...et au Gaec d'Aunay.

Copie en sera adressée au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 9 février 2017, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 février 2017.

Le rapporteur,

O. CoiffetLe président,

I. Perrot

Le greffier,

M. I...

La République mande et ordonne au l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT02075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02075
Date de la décision : 24/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL MEZERAC CHEVRET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-24;15nt02075 ?
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