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15/02/2017 | FRANCE | N°16NT01585

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Formation plénière, 15 février 2017, 16NT01585


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1509630 du 25 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoir

es en production de pièces, enregistrés le 17 mai 2016, le 20 juillet 2016 et le 4 novembre 2016, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1509630 du 25 février 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires en production de pièces, enregistrés le 17 mai 2016, le 20 juillet 2016 et le 4 novembre 2016, M. A...D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 février 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 27 juillet 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa demande de certificat de résidence dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé valant autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, MeB..., de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de son conseil à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ; le préfet n'a pas procédé à un examen personnel et précis de sa situation ; elle est entachée d'erreur de droit au regard des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dès lors que la pratique préfectorale consistant à s'écarter de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé tend à porter atteinte au droit au secret médical ; le préfet s'est à tort abstenu de s'interroger sur sa capacité à voyager sans risque vers l'Algérie ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'elle est fondée sur une décision portant refus de titre de séjour elle-même illégale ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité de ses conséquences sur sa situation ; le préfet n'a pas procédé à un examen personnel et précis de sa situation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale dès lors qu'elle est fondée sur des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français elles-mêmes illégales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 juin 2016, le 22 juillet 2016 et le 20 décembre 2016, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.

Il fait, en outre, valoir que :

- l'Algérie dispose d'une offre de soins dans les secteurs public et privé ainsi que d'un système de sécurité sociale qui couvre neuf dixièmes de la population ;

- l'intéressé, informé de son intention d'opposer un refus à sa demande, n'a formulé aucune observation ;

- les maladies psychiatriques sont prises en charge en Algérie.

M. A...D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

- les observations de Me B...pour M. A...D....

1. Considérant que M. A...D..., ressortissant algérien né le 14 décembre 1959, est entré en France le 13 juin 2012 et s'y est maintenu depuis lors ; que, le 9 juillet 2014, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par un arrêté du 27 juillet 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office ; que M. A...D...relève appel du jugement du 25 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : /... / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificat de résidence formées par les ressortissants algériens sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'arrêté du 9 novembre 2011 que le médecin de l'agence régionale de santé ne doit indiquer, dans son avis, si l'état de santé de l'étranger ne lui permet pas de voyager sans risque vers son pays d'origine que dans le cas où il estime que celui-ci peut bénéficier d'un traitement approprié dans ce pays ; que dans le cas où ce médecin estime que l'étranger ne peut bénéficier d'un tel traitement et où le préfet entend s'écarter de cet avis, ce qu'il lui est loisible de faire sans pour autant commettre d'erreur de droit ni porter atteinte au secret médical, et prendre un arrêté par lequel il refuse à l'étranger un titre de séjour en qualité d'étranger malade, sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, s'agissant des ressortissants algériens, sur celui des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, et assortit ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont l'étranger est originaire, il appartient au préfet, dès lors qu'il lui incombe de vérifier si l'étranger est en capacité de voyager sans risque et en l'absence de tout élément soumis à son appréciation lui permettant d'ores et déjà de se prononcer à cet égard, d'avertir à cette fin l'intéressé de son intention de lui refuser le titre de séjour sollicité et de l'inviter à présenter ses observations ; que le préfet n'est toutefois pas tenu, à peine d'irrégularité de sa décision, d'inviter expressément l'étranger à mentionner s'il estime se trouver dans l'incapacité à voyager sans risque ; qu'il appartient à l'étranger, s'il s'y croit fondé, de faire état d'une telle incapacité et de produire tout élément, même lorsqu'il entend ne pas lever le secret médical concernant la pathologie dont il souffre, de nature à démontrer cette incapacité ; que, dans le cas où l'étranger fait de telles observations, il appartient alors au préfet, s'il entend maintenir son projet de renvoi de l'étranger dans son pays d'origine, de mentionner dans son arrêté les raisons pour lesquelles il estime ne pas devoir prendre en compte ces observations ; qu'à l'inverse, dans le cas où l'étranger n'a fait aucune observation en ce sens, le préfet est réputé avoir examiné ce point au vu des éléments en sa possession sans avoir à motiver expressément son arrêté sur cette question ;

4. Considérant qu'en l'espèce, le médecin de l'agence régionale des Pays de la Loire a, par un avis du 13 janvier 2015, estimé que l'état de santé de M. A...D...nécessitait une prise en charge médicale, d'une durée d'un an, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas en Algérie de traitement approprié pour cette prise en charge médicale ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois, après avoir averti l'intéressé de son intention de lui refuser le titre de séjour sollicité et l'avoir invité à présenter des observations, refusé de délivrer à M. A... D...le certificat de résidence sollicité en qualité d'étranger malade au motif qu'il n'était pas établi que l'intéressé ne pût bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. A...D..., qui n'a pas présenté d'observations sur son incapacité éventuelle à voyager sans risque et ne prétend d'ailleurs pas se trouver dans une telle situation, se borne à soutenir qu'alors que la possibilité de voyager pour une personne souffrant de problèmes urologiques " ne va pas de soi ", le préfet, qui avait connaissance de ces problèmes, n'a pas recherché s'il était en capacité de voyager sans risque vers l'Algérie ; que, toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point précédent du présent arrêt, que le préfet de la Loire-Atlantique est réputé avoir examiné ce point au vu des éléments en sa possession et n'avait pas à motiver expressément son arrêté sur cette question ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation globale de M. A...D... ;

6. Considérant, en dernier lieu, que pour le surplus, M. A...D...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, le moyen invoqué en première instance et tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

7. Considérant qu'à l'appui du moyen tiré de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour, M. A...D...soutient que cette décision porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; que, toutefois, le requérant, qui séjournait en France depuis moins de deux ans à la date de la décision contestée, ne justifie d'aucune attache privée ou familiale en France ; qu'il ne justifie pas davantage de l'intégration professionnelle dont il se prévaut ; qu'il n'établit ni même n'allègue être dépourvu de toute attache familiale en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-quatre ans ; qu'ainsi, en lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, le préfet n'a ni porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels sa décision a été prise ni entaché celle-ci d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressé ; que, par ailleurs, compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 6 du présent arrêt, l'illégalité de cette décision n'est pas davantage établie ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;

8. Considérant, que pour le surplus, M. A...D...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance et tirés, d'une part, s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français, du défaut d'examen précis de sa situation personnelle, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et, d'autre part, s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...D...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 1er février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la Cour,

- M. Perez, président de chambre,

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2017.

Le rapporteur,

K. BougrineLe président de la Cour,

G. Bachelier

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01585


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 16NT01585
Date de la décision : 15/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : REGENT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-15;16nt01585 ?
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