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15/02/2017 | FRANCE | N°15NT01061

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 février 2017, 15NT01061


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

­ le code du travail ;

­ le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public

- et les observations de MeC..., substituant MeE..., représentant M.D....

1. Considérant que M. D...a été recruté le 28 octobre 1993 par la SAS G.T.N Bâtiment en qualité de grutier-compagnon-boiseur, puis comme chef

d'équipe et, enfin, à compter du 1er avril 2015 comme chef de chantier ; qu'entre 2002 et 2012, il a été victime de s...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

­ le code du travail ;

­ le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public

- et les observations de MeC..., substituant MeE..., représentant M.D....

1. Considérant que M. D...a été recruté le 28 octobre 1993 par la SAS G.T.N Bâtiment en qualité de grutier-compagnon-boiseur, puis comme chef d'équipe et, enfin, à compter du 1er avril 2015 comme chef de chantier ; qu'entre 2002 et 2012, il a été victime de six accidents du travail ou rechutes d'accident de travail ; qu'à la suite de la dernière rechute survenue en 2012, le médecin du travail, à l'issue de la visite médicale du 2 juillet 2013, l'a déclaré " inapte à l'ensemble des tâches physiques de la fonction de chef de chantier ", mais " apte à des tâches organisationnelles, de suivi et de réunions de chantiers " qui font également partie de cette fonction ; que saisi par M. D...d'une contestation à l'encontre de cet avis, l'inspecteur du travail a déclaré, par une décision du 5 septembre 2013, M. D...inapte à son poste de chef de chantier mais apte à un poste de travail sans port de charges supérieures à 5 kg, sans effort des membres supérieurs au dessus des coudes et sans vibrations transmises aux membres supérieures (tâches d'organisation de chantier, de suivi, de travail administratif, de contrôle de la sécurité sur les chantiers ...) ; que M. D...relève appel du jugement du 29 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail " ; qu'aux termes de l'article R. 4624-31 du même code : " Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé : / 1° Une étude de ce poste / 2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise / 3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires (...) " :

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le médecin du travail concernant l'aptitude d'un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l'inspecteur du travail, saisi par l'une des parties, de se prononcer définitivement sur cette aptitude ; que son appréciation, qu'elle soit confirmative ou infirmative de l'avis du médecin du travail, se substitue à cet avis ; que seule la décision rendue par l'inspecteur du travail est susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; que, par suite, les irrégularités dont étaient le cas échéant entachée, au regard des dispositions de l'article R. 4624-31 du code du travail cité ci-dessus, la procédure au terme de laquelle le médecin du travail avait donné son avis, est sans incidence sur la légalité de la décision rendue par l'inspecteur du travail ; que par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'un vice de procédure à défaut pour le médecin du travail d'avoir procédé à deux examens médicaux espacés de deux semaines est, en tout état de cause, inopérant et doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, que pour prendre sa décision, l'inspecteur du travail a pris en compte les nombreux accidents de travail et rechutes de travail dont a été victime l'intéressé depuis le 28 novembre 2002, date du premier accident, ainsi que les avis médicaux émis à leur suite ; qu'il a constaté que ces avis, qui ont été émis lors de chaque visite de reprise du travail, concordaient pour exclure notamment des tâches susceptibles d'être effectuées par le requérant le port de charges qualifiées dans un premier temps de " lourdes " pour être ensuite limitées à 20 kg ainsi que tout travail les bras levés de façon prolongée ; qu'à la suite de la dernière rechute survenue en 2012, le médecin du travail, dans son avis émis lors de la visite du 17 juin 2013, a encore restreint le port des charges pour le fixer à 5 kg maximum et a prohibé tous travaux effectués bras levés tout un prévoyant une seconde visite à quinzaine ; que lors de cette seconde visite, qui a été effectuée le 2 juillet 2013, il a confirmé son diagnostic et a relevé que les préconisations qu'il avait émises n'étaient pas compatibles avec certaines tâches que M. D... doit assurer en qualité de chef de chantier, en l'occurrence l'implantation, le traçage, la manutention d'appareils de mesure de plus de 5 kg, la mise en place d'échafaudage, l'intéressé étant seulement apte aux tâches organisationnelles, de suivi et de réunion de chantier ; que compte tenu des nombreuses rechutes dont a été victime le requérant malgré les préconisations du médecin du travail, la seule attestation médicale du 13 novembre 2014 produite par M. D..., au demeurant postérieure à la décision contestée, selon laquelle il pourrait porter des charges de 20 kg maximales jusqu'à la ceinture et des charges de 5 à 7 kg " coudes au corps " n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin du travail et reprise ensuite par l'inspecteur du travail dans sa décision ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier, notamment de la fiche de poste de chef de chantier interne à la société, que les fonctions confiées à M. D...nécessitent d'exercer les mouvements qui lui sont désormais interdits mais pourtant nécessaires dans l'exercice de ses fonctions, notamment pour installer et implanter des chantiers et procéder à différents traçages et relevés de mesures ; que, dans ces conditions, et après avoir relevé que le poste de chef de chantier avait été confié en 2004 à M. D... pour tenir compte de ses problèmes physiques au niveau des membres supérieurs, et que, malgré les préconisations émises par le médecin du travail, l'intéressé avait néanmoins dû être mis de nombreuses fois en arrêt de travail prolongé avec une aggravation de son état et une réduction de ses capacités physiques au niveau des épaules, l'inspecteur du travail a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, le déclarer inapte pour ce poste afin de préserver son état de santé ; que M. D... ne saurait se prévaloir de ce qu'il n'a pas été victime entre 2008 et 2012 d'accidents de travail, compte tenu du suivi des préconisations du médecin du travail émises en 2008, dès lors qu'il a été victime en 2012 d'une nouvelle rechute de travail ayant entraîné un arrêt de travail d'un peu plus d'un an et que l'inspecteur du travail doit apprécier l'aptitude au travail de l'intéressé au regard de son état de santé à la date à laquelle il prend sa décision ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 septembre 2013 par laquelle l'inspecteur du travail du Calvados l'a déclaré inapte à son poste de chef de chantier ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. D...ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. D..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. D...la somme demandée par la SAS G.T.N Bâtiment, au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M.D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SAS G.T.N Bâtiment tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...D..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à Me H..., ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS G.T.N Bâtiment.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2017.

Le rapporteur,

M. F...Le président,

J-F. MILLET

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT01061


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01061
Date de la décision : 15/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : CAVELIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-15;15nt01061 ?
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