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13/02/2017 | FRANCE | N°16NT00161

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 13 février 2017, 16NT00161


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association intercommunale de sauvegarde et de valorisation du patrimoine (AISVP) et M. A...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les délibérations adoptées le 3 juin 2014 par le conseil municipal de la commune de Langesse décidant de l'aliénation en tout ou partie des treize chemins communaux et la délibération du 17 juin 2014 autorisant le maire à effecteur les démarches correspondantes et à signer les actes afférents.

Par un jugement n°1402927 du 17 novembre 2015, le t

ribunal administratif d'Orléans a partiellement fait droit à cette demande en annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association intercommunale de sauvegarde et de valorisation du patrimoine (AISVP) et M. A...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les délibérations adoptées le 3 juin 2014 par le conseil municipal de la commune de Langesse décidant de l'aliénation en tout ou partie des treize chemins communaux et la délibération du 17 juin 2014 autorisant le maire à effecteur les démarches correspondantes et à signer les actes afférents.

Par un jugement n°1402927 du 17 novembre 2015, le tribunal administratif d'Orléans a partiellement fait droit à cette demande en annulant la délibération n° 2014-32 du 3 juin 2014 autorisant la cession du chemin rural n° 3 et la délibération du 17 juin 2014 en tant qu'elle concerne ce même chemin communal n° 3.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2016, complétée par un mémoire enregistré le 27 octobre 2016, la commune de Langesse, représentée par la SCP Sorel et associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler partiellement ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 17 novembre 2015 en tant qu'il concerne le chemin communal n° 3 ;

2°) de rejeter la requête de l'association AISVP ;

3°) de mettre à la charge de l'association AISVP et de M. A...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de fait, le chemin communal n° 3 ne pouvant plus être regardée comme affecté à l'usage du public ;

- le chemin en question ne fait plus l'objet d'une utilisation régulière ;

- il ne fait plus l'objet d'un entretien par ses soins ;

- son mauvais état d'entretien a été admis au cours de l'enquête publique ;

- il n'est inclus dans aucun itinéraire de randonnée ou de promenade ;

- il n'est pas ouvert à la circulation générale, un arrêté municipal y interdisant les véhicules à moteur ;

- il n'était pas nécessaire de procéder préalablement à la désaffectation de ce chemin pour pouvoir procéder à son aliénation ;

- un chemin communal peut être déclassé même lorsqu'il fait l'objet d'une utilisation par le public compte tenu du pouvoir d'appréciation reconnue à une commune dans ce domaine ;

- l'aliénation du chemin ne s'explique qu'au regard de la finalité d'intérêt général poursuivie par ailleurs par la collectivité territoriale ;

- les écritures contentieuses produites en défense ne sont pas recevables, faute pour le président de l'association de justifier d'un mandat l'autorisant à représenter celle-ci dans la présente affaire ;

- l'association AISVP et M. A...ne sont pas recevables à réclamer l'annulation des douze délibérations que le tribunal administratif n'a pas annulé, faute d'avoir relevé appel du jugement du tribunal administratif dans le délai imparti.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2016, complété par un mémoire enregistré le 12 mai 2016, l'association AISVP et M.A..., représentés par la SCP Guillaumat-Pesme concluent, dans le dernier état de leurs écritures, au rejet de la requête, à l'annulation du jugement attaqué, à l'annulation de l'ensemble des délibérations contestées en première instance et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune au profit de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association AISVP et M. A...font valoir que toutes les délibérations dont la légalité a été contestée en première instance doivent être annulées et que les aliénations que la commune se proposait de mener à bien ne sont pas justifiées les délibérations concernant le chemin n° 3.

Par ordonnance du 27 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 17 novembre 2016 à 12 heures.

Un mémoire présenté par l'association AISVP et M. A...a été enregistré le 2 décembre 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mony,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la commune de Langesse.

1. Considérant que le conseil municipal de Langesse (Loiret) a adopté le 3 juin 2014 treize délibérations autorisant l'aliénation de plusieurs chemins ruraux de la commune, puis, le 17 juin suivant, une délibération autorisant le maire de la commune à procéder aux formalités afférentes et à signer les actes correspondants ; que la légalité de ces différentes délibérations a été contestée par l'association intercommunale pour la sauvegarde et la valorisation du patrimoine (AISVP) et M. C...A... ; que le tribunal administratif d'Orléans, par un jugement en date du 17 novembre 2015, a rejeté ces demandes sauf en ce qui concerne le chemin rural n° 3 dit chemin des Chiffelays ; que la commune de Langesse relève partiellement appel de ce jugement en tant que le tribunal a annulé les délibérations relatives au chemin n°3 ; que l'association AISVP et M. A...doivent de leur côté être regardés comme relevant appel incident du même jugement, en tant que celui-ci n'a pas annulé l'ensemble des délibérations litigieuses ;

Sur la recevabilité des conclusions présentées en première instance et en appel par l'association intercommunale pour la sauvegarde et la valorisation du patrimoine :

2. Considérant qu'il ressort des termes mêmes des statuts de l'association AISVP qu'aucune de ses dispositions ne précise les conditions dans lesquelles son président peut être autorisé à ester en justice ; qu'il appartient alors à la seule assemblée générale de l'association, dans de telles conditions, d'autoriser expressément le président de l'association à la représenter en justice ; que la délibération adoptée par le conseil de l'association le 23 juillet 2014 n'a pu ainsi avoir pour effet d'autoriser le président de l'association AISVP à former un recours contentieux en son nom, tant en première instance qu'en appel ; que, dès lors, les conclusions présentées pour l'association AISVP doivent être regardées comme irrecevables ;

Sur les conclusions en appel incident :

3. Considérant que M. A...doit être regardé comme demandant, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Orléans en tant que celui-ci a rejeté l'ensemble de ses conclusions en annulation dirigées contre les différentes délibérations adoptées le 13 juin 2014, d'une part, et contre la délibération adoptée le 17 juin 2014, d'autre part, sauf en ce qui concerne la vente du chemin n° 3 dit des Chiffelays ; que, toutefois, de telles conclusions soulèvent un litige distinct de celui qui résulte de l'appel principal de la commune de Langesse, limité à l'annulation des délibérations concernant la vente du seul chemin n°3 ; qu'elles ne sont dès lors pas recevables ;

Sur l'appel principal :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 161-1du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune " ; qu'aux termes de l'article L. 161-2 de ce même code : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale. La destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée. " ; qu'aux termes de l'article L. 161-10 de ce même code : " Lorsqu'un chemin rural cesse d'être affecté à l'usage du public, la vente peut être décidée après enquête par le conseil municipal, à moins que les intéressés groupés en association syndicale conformément à l'article L. 161-11 n'aient demandé à se charger de l'entretien dans les deux mois qui suivent l'ouverture de l'enquête. (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'un chemin rural, présumé être affecté à l'usage du public, peut être vendu lorsqu'il cesse de faire l'objet d'une telle affectation ; que, toutefois, un seul des éléments indicatifs figurant à l'article L. 161-2 du code rural et de la pêche maritime permet de retenir la présomption d'affectation à usage du public ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement aux autres délibérations adoptées le 3 juin 2014, celle relative au chemin rural n°3 dit des Chiffelays n'indique ni que ce chemin serait à l'abandon ou devenu totalement impraticable, ni qu'il ne serait plus affecté à l'usage du public ; que le rapport du commissaire-enquêteur n'indique pas davantage que ce chemin ne serait plus du tout emprunté, relevant au contraire qu'il n'est que pour partie " en mauvais état " ; que sa demande relative à la mise en place d'un chemin de substitution permettant la poursuite du passage de randonneurs sur ce tronçon démontre au contraire la persistance de son usage par le public, ainsi que le confirment du reste les copies des courriers d'associations de randonneurs et de randonneurs adressés au commissaire-enquêteur pendant l'enquête publique ; que l'arrêté municipal pris en 2011 pour réglementer la circulation des véhicules à moteur sur ce chemin indique que cette dernière est " de nature à compromettre la tranquillité et la sécurité des promeneurs " et que " l'intérêt de la sécurité et de la tranquillité publique justifie pleinement la limitation ainsi apportée au libre usage de ce chemin " ; que M. A... a également produit en appel plusieurs attestations émanant de promeneurs indiquant que ces derniers empruntaient régulièrement le chemin dit des Chiffelays, une portion de ce dernier constituant par ailleurs une partie de l'itinéraire de promenade dit de la Dame blanche régulièrement utilisé par des randonneurs, lequel, s'il emprunte des chemins forestiers situés pour leur plus grande partie sur le territoire d'une commune voisine, se prolonge néanmoins sur le territoire de la commune de Langesse, ainsi que le montre le balisage du chemin sur la partie située sur son propre territoire qu'elle a autorisé en 2012 ; que la réserve exprimée par le commissaire-enquêteur, lequel était opposé à l'aliénation du chemin n° 3, à l'issue de l'enquête publique, et selon laquelle il conditionnait son éventuel accord à cette aliénation à la mise en place d'un itinéraire de substitution ne pouvait se comprendre que parce que ce chemin, comme déjà indiqué, continuait d'être régulièrement utilisé, principalement par des randonneurs ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que c'est sans commettre d'erreur de fait ou de droit que le tribunal administratif a pu juger que le chemin rural n° 3 dit des Chiffelays devait être regardé comme n'ayant pas cessé d'être affecté à l'usage du public et ne pouvait donc, de ce fait, être aliéné ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le tribunal ait relevé dans son point 13 que la commune de Langesse n'avait pas indiqué dans la délibération concernant le chemin n° 3 dit des Chiffelays que ce dernier n'était plus affecté à l'usage du public est, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation par ailleurs portée par le tribunal sur la désaffectation de ce chemin rural, laquelle ne résultait que de constatations de fait ;

7. Considérant, en dernier lieu, que l'intérêt qu'aurait trouvé la commune de Langesse à aliéner plusieurs de ses chemins ruraux afin de financer des travaux d'aménagement de certains locaux municipaux, qualifiés d'intérêt général par la commune, est également sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, la vente d'un chemin rural supposant uniquement, comme déjà indiqué, que ce dernier ne soit plus affecté à l'usage du public ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Langesse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la délibération n° 2014-032 par laquelle le conseil municipal de la commune a décidé l'aliénation du chemin communal n°3 ainsi que, en ce qu'elle concerne cette aliénation, la délibération du 17 juin 2014 ;

Sur les conclusions en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce M.A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la commune de Langesse la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre au même titre 1 500 euros à la charge de la commune de Langesse au profit de M.A... ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Langesse est rejetée.

Article 2 : Les conclusions en appel incident de l'association intercommunale pour la sauvegarde et la valorisation du patrimoine et de M. A...sont rejetées.

Article 3 : La commune de Langesse versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Langesse, à l'association intercommunale de sauvegarde et valorisation du patrimoine (AISVP) et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2017, où siégeaient :

- M. Lenoir, président,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 février 2017.

Le rapporteur,

A. MONYLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

2

N° 16NT00161


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00161
Date de la décision : 13/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SCP GUILLAUMA et PESME

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-13;16nt00161 ?
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