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08/02/2017 | FRANCE | N°15NT01487

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 08 février 2017, 15NT01487


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le comité de liaison du camping-car a demandé au tribunal administratif de Nantes :

- d'annuler l'arrêté du 10 février 2012, ainsi que les arrêtés antérieurs des 6 janvier 2010, 26 janvier et 5 septembre 2011, par lesquels le maire de la commune des Sables-d'Olonne a successivement réglementé le stationnement des camping-cars sur le territoire communal ;

- d'enjoindre au maire des Sables-d'Olonne d'abroger dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement à intervenir ses arr

tés des 6 janvier 2010, 26 janvier et 5 septembre 2011 et 10 février 2012 ;

- d'enjoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le comité de liaison du camping-car a demandé au tribunal administratif de Nantes :

- d'annuler l'arrêté du 10 février 2012, ainsi que les arrêtés antérieurs des 6 janvier 2010, 26 janvier et 5 septembre 2011, par lesquels le maire de la commune des Sables-d'Olonne a successivement réglementé le stationnement des camping-cars sur le territoire communal ;

- d'enjoindre au maire des Sables-d'Olonne d'abroger dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement à intervenir ses arrêtés des 6 janvier 2010, 26 janvier et 5 septembre 2011 et 10 février 2012 ;

- d'enjoindre au maire des Sables-d'Olonne de procéder à l'enlèvement des portiques installés à chaque entrée des parkings, voies et places de la commune, précisés à l'article 4 de l'arrêté litigieux ;

- de condamner la commune aux dépens ;

- de mettre à la charge de la commune des Sables-d'Olonne une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1203658 du 13 mars 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 mai et 26 novembre 2015, le comité de liaison du camping-car, représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune des Sables-d'Olonne du 10 février 2012, sauf en ce qu'il a procédé à l'abrogation expresse de l'arrêté du 5 septembre 2011 ;

3°) d'enjoindre au maire des Sables-d'Olonne de procéder à l'enlèvement des portiques installés à chaque entrée des parkings, voies et places, tel que figurant dans le constat en date du 17 février 2015 ;

4°) de condamner la commune des Sables-d'Olonne aux entiers dépens de l'instance et aux frais de justice ;

6°) de condamner la commune des Sables-d'Olonne à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement :

• est insuffisamment motivé en ce qu'il reprend les écritures de la commune sans que ces dernières ne soient corroborées par le moindre élément objectif ; il en est ainsi de la proportion de 7 % du territoire de l'agglomération qui ferait l'objet de l'interdiction ;

• se méprend quand il parle de stationnement pérenne des camping-cars puisque ceux-ci sont mouvants par nature et que le code de la route interdit en tout état de cause de stationner au-delà d'une période de sept jours ; il se méprend aussi lorsqu'il parle de gros gabarits, les constructeurs modernes produisant des petits modèles guères plus grands qu'une voiture particulière ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé :

• tout arrêté d'interdiction de stationner doit mentionner les éléments de droit et de fait justifiant la décision ; l'arrêté contesté ne justifie pas des prétendus " encombrements imputables au stationnement des camping-cars " ; il n'énonce pas dans ses motifs le moindre fait concret de nature à caractériser les dangers que les camping-cars feraient courir à la préservation du bon ordre, de la sûreté et de la salubrité publiques dans la commune ; il prescrit ainsi des mesures disproportionnées par rapport à la situation qu'il est censé combattre ; aucune preuve n'est versée au débat s'agissant des prétendus dangers que feraient courir les camping-cars et des réclamations des administrés ;

• la création d'une station de ravitaillement pour les camping-cars, citée dans les motifs de l'arrêté, n'est qu'un projet et ne permet pas à la commune de justifier d'une interdiction ou d'une réglementation d'autant qu'il semble relever de la communauté d'agglomération ; quant à l'aire déjà réalisée, elle est gérée par une société privée ; la location d'un tel emplacement ne peut dès lors être regardée comme permettant un exercice de la liberté de stationnement sur le domaine public de la commune ;

- l'arrêté est entaché d'illégalité dès lors que l'interdiction est à caractère général sur l'ensemble de la zone de la commune la plus attractive ; même si l'interdiction représente une partie seulement du territoire communal, elle interdit tout stationnement au bord de mer et au centre ville ; il est impossible au vu des attestations versées par la commune d'identifier les camping-cars comme responsables ;

- les panneaux d'interdiction de stationner se rapportant uniquement aux camping-cars relèvent d'une utilisation détournée et non conforme de la réglementation en vigueur relative à la signalétique routière ;

- l'arrêté établit une discrimination contraire au principe d'égalité vis-à-vis des autres véhicules de catégorie M1, mais aussi dès lors que les propriétaires de camping-cars qui résident sur la commune ne peuvent garer leur véhicule comme ils l'entendent, même sans l'utiliser sur un mode d'hébergement ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 juillet et 10 décembre 2015, la commune des Sables-d'Olonne, représentée par la Selarl d'avocats Cornet-Vincent-Ségurel, demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de juger irrecevable la demande tendant à ce qu'il lui soit enjoint d'avoir à procéder à l'enlèvement des panneaux de signalisation ;

- de confirmer en tous points le jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 mars 2015 et en conséquence de juger exempt de toute illégalité l'arrêté du 10 février 2012 ;

- de condamner le comité de liaison du camping-car à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Une ordonnance du 3 octobre 2016 a porté clôture de l'instruction au 21 octobre 2016 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouchardon ;

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public ;

- et les observations de Me Celerier, avocat de l'association requérante, et de Me Léon, avocat de la commune des Sables-d'Olonne.

1. Considérant que, par un arrêté du 10 février 2012, le maire des Sables-d'Olonne (Vendée) a réglementé le stationnement des camping-cars sur le territoire communal ; que l'association " comité de liaison du camping-car " relève appel du jugement du 13 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, qu'en jugeant, au vu des pièces du dossier, en particulier le plan de situation fourni par la commune, que l'interdiction de stationnement des camping-cars concernait dix-huit voies ou lieux correspondant principalement au front de mer de la ville des Sables-d'Olonne, qui elle-même ne correspond qu'à 7 % de la superficie du territoire communal, le tribunal administratif de Nantes a suffisamment motivé son jugement, lequel n'est en outre pas entaché d'une erreur de fait sur ce point ;

3. Considérant, d'autre part, que le requérant soutient que le tribunal a à tort relevé que les camping-cars stationnaient de manière pérenne dès lors que le code de la route interdit de stationner sur une même place au-delà d'une période de sept jours ; qu'il ressort toutefois du point 6 du jugement que le terme " pérenne ", en ce qu'il est suivi de la définition du camping-car comme aménagé " pour le sommeil et la restauration ", doit seulement être interprété comme décrivant un véhicule stationnant au-delà du temps habituellement utilisé par une voiture particulière ;

4. Considérant, enfin, que si le jugement n'a, selon le requérant, pas pris en compte certains modèles modernes de camping-cars, dont les dimensions seraient désormais proches de celles des voitures particulières, une telle erreur, à la supposer avérée, n'est pas susceptible à elle seule d'entraîner l'irrégularité de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 10 février 2012 vise les dispositions utiles du code général des collectivités territoriales et mentionne les exigences de la protection environnementale du littoral, la gêne que constitue le stationnement de camping-cars à fort gabarit dans des rues étroites et les risques corrélatifs pour les piétons, ainsi que l'existence d'une large aire de stationnement à cinq minutes à pied du centre-ville ; qu'il comporte ainsi les éléments de droit et de fait qui le fondent et se trouve dès lors suffisamment motivé ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, la commune défenderesse apporte des éléments probants, notamment des courriers d'administrés, faisant état de nuisances engendrées par le stationnement de camping-cars, en terme d'encombrement ou de " pollution visuelle " ; que la circonstance que l'arrêté vise à titre superfétatoire le projet d'une station de ravitaillement pour camping-cars est sans incidence sur sa légalité dès lors qu'il se fonde par ailleurs sur la présence d'une aire de stationnement déjà en fonction ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa version alors applicable : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2213-2 du même code également dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le maire peut par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : (...) 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules ; 2° Réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains (...) " et qu'aux termes de l'article L. 2213-4 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, économiques agricoles, forestières ou touristiques (...) " ;

7. Considérant en l'espèce qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de situation fourni en défense, que, comme il a été dit plus haut, les zones interdites au stationnement des camping-cars représentent une partie limitée du territoire communal, correspondant principalement au front de mer du centre-ville, qui lui-même correspond à 7 % de la superficie totale du territoire communal, selon un calcul qui n'est pas utilement contredit ; que la commune dispose en outre d'une aire de stationnement et de repos aménagée à proximité immédiate des sites les plus attractifs ; que, dans ces conditions, dans cette commune littorale qui connaît une fréquentation touristique importante, la limitation ainsi apportée au stationnement des camping-cars ne revêt pas le caractère d'une interdiction d'une généralité excessive au regard de l'objectif recherché de préservation de la sécurité et de la salubrité publiques, de la protection de l'environnement et des activités touristiques au sens des dispositions susmentionnées des articles L. 2212-2, L. 2213-2 et L. 2213-4 du code général des collectivités territoriales, compte tenu de la particularité des camping-cars et de la possibilité qui leur est reconnue de stationner en dehors des zones sensibles désignées par l'arrêté litigieux, nonobstant la circonstance que l'aire de stationnement spécifique appartienne à une personne privée et que son utilisation soit payante ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ;

9. Considérant qu'eu égard au caractère habitable des camping-cars permettant à leurs occupants d'y passer la nuit, cette réglementation, en ce qu'elle vise la protection des intérêts sus-rappelés, ne porte pas atteinte au principe d'égalité entre les usagers du domaine public routier, qu'ils soient ou non résidents de la commune, au détriment de ceux qui utilisent ce type de véhicule, notamment, par rapport à ceux qui utilisent d'autres véhicules de la catégorie M1 au sens de l'article R. 311-1 du code de la route ;

10. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que si l'association requérante soutient que les panneaux utilisés pour matérialiser les interdictions édictées ne sont pas conformes à la réglementation applicable, cette circonstance, à la supposer même établie, est sans influence sur la légalité de l'arrêté contesté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le comité de liaison du camping-car n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 février 2012 ;

Sur la demande d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par le comité de liaison du camping-car ne peuvent par suite qu'être rejetées ;

Sur les conclusions relatives aux dépens :

13. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat (...) " ; que la présente instance n'ayant pas donné lieu à dépens au sens de l'article susvisé, les conclusions du comité de liaison du camping-car tendant à ce que la commune des Sables-d'Olonne soit condamnée à lui verser les dépens et les " frais de justice " ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune des Sables-d'Olonne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que le comité de liaison du camping-car demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du comité de liaison du camping-car la somme de 1 500 euros à verser à la commune des Sables-d'Olonne au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association comité de liaison du camping-car est rejetée.

Article 2 : L'association comité de liaison du camping-car versera à la commune des Sables-d'Olonne une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association comité de liaison du camping-car et à la commune des Sables-d'Olonne.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2017.

Le rapporteur,

L. BOUCHARDONLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

V. DESBOUILLONS La République mande et ordonne au préfet de la Vendée, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT01487


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01487
Date de la décision : 08/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Laurent BOUCHARDON
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-08;15nt01487 ?
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