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01/02/2017 | FRANCE | N°15NT01224

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 01 février 2017, 15NT01224


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Ecole Française Motonautique a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, lui a ordonné d'une part, le remboursement à plusieurs de ses cocontractants, financeurs de la formation professionnelle continue, d'une somme de 21 066,95 euros au titre de l'inexécution de formations professionnelles concernant les exercices 2008 et 2009, et, d'autre part, le versement d'une somme

de 59 528,79 euros au Trésor public représentant les dépenses de format...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Ecole Française Motonautique a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, lui a ordonné d'une part, le remboursement à plusieurs de ses cocontractants, financeurs de la formation professionnelle continue, d'une somme de 21 066,95 euros au titre de l'inexécution de formations professionnelles concernant les exercices 2008 et 2009, et, d'autre part, le versement d'une somme de 59 528,79 euros au Trésor public représentant les dépenses de formation rejetées pour non-conformité aux dispositions légales et réglementaires et de la décharger de toutes les sommes auxquelles elle a été assujettie pour la période vérifiée.

Par un jugement n°1201741 du 24 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2015, la SARL Ecole Française Motonautique, représentée par l'association Boulanger et Joubert-Boulanger, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 février 2015 ;

2°) de prononcer la décharge de la somme de 59 528, 79 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure a été viciée dès lors que l'agent du service a emporté irrégulièrement un certain nombre de documents hors de l'entreprise en méconnaissance de l'article L. 6362-10 du code du travail ;

- le motif tiré de ce que les modalités de paiement devaient être précisés dans le seul contrat de formation est entachée d'une erreur de droit et manque, au surplus, en fait ;

- elle établit la réalité de la réalisation des actions de formation conformément aux dispositions de l'article L. 6362-6 du code du travail ;

- c'est à tort que l'administration a retenu, sur le fondement de l'article L.8222-1 du code du travail, un délit de travail dissimulé pour rejeter les dépenses de formation ;

Par des mémoires en défense, enregistré le 9 juin 2015 et le 15 décembre 2016, le ministre du travail, de 1'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL Ecole Française Motonautique une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de fait concernant les modalités de paiement sont inopérants dès lors que la décision contestée n'est pas fondée sur ce motif ;

- les autres moyens soulevés par la SARL Ecole Française Motonautique ne sont pas fondés ;

- si la cour devait retenir le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.8222-1 du code du travail, il est sollicité une substitution de motif tiré de l'absence de rattachement des dépenses à l'activité de formation professionnelle continue.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-273 QPC du 21 septembre 2012

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- et les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Ecole Française Motonautique relève appel du jugement du 24 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 16 décembre 2011 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, lui a ordonné d'une part, le remboursement à plusieurs de ses cocontractants, financeurs de la formation professionnelle continue, d'une somme de 21 066,95 euros au titre de l'inexécution de formations professionnelles concernant les exercices 2008 et 2009, et, d'autre part, au titre des mêmes exercices, le versement d'une somme de 59 528,79 euros au Trésor public représentant le montant des dépenses de formation rejetées pour non-conformité aux dispositions légales et réglementaires et de la décharger de toutes les sommes auxquelles elle a été assujettie pour la période vérifiée ;

Sur la régularité de la procédure :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 6361-2 du code du travail : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur : / 1° Les activités en matière de formation professionnelle continue conduites par : (...) / c) Les organismes de formation et leurs sous-traitants ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-8 du même code : " Les contrôles en matière de formation professionnelle continue peuvent être opérés soit sur place, soit sur pièces. " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-9 du même code : " Les résultats du contrôle sont notifiés à l'intéressé. / Cette notification interrompt la prescription courant à l'encontre du Trésor public, au regard des versements dus et des pénalités fiscales correspondantes. " ; qu'aux termes de son article L. 6362-10 : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée. " ; qu'aux termes de son article R. 6362-1 : " Les personnes et organismes mentionnés aux articles L. 6361-1 et L. 6361-2, 1°, qui ont fait l'objet d'un contrôle sur place, sont informés de la fin de la période d'instruction par lettre recommandée avec avis de réception. (...) ; " qu'aux termes de son article R. 6362-2 : " La notification des résultats du contrôle prévue à l'article L. 6362-9 intervient dans un délai ne pouvant dépasser trois mois à compter de la fin de la période d'instruction avec l'indication des procédures dont l'organisme contrôlé dispose pour faire valoir ses observations. Les résultats du contrôle peuvent comporter des observations adressées à l'organisme contrôlé.(...) " ; qu'aux termes de son article R. 6362-3 : " Les résultats des contrôles prévus aux articles L. 6361-1 à L. 6361-3 sont notifiés à l'intéressé avec l'indication du délai dont il dispose pour présenter des observations écrites et demander, le cas échéant, à être entendu. / Ce délai ne peut être inférieur à trente jours à compter de la date de la notification. " ; que selon l'article R. 6362-4 du code : " La décision du ministre chargé de la formation professionnelle ou du préfet de région ne peut être prise qu'au vu des observations écrites et après audition, le cas échéant, de l'intéressé, à moins qu'aucun document ni aucune demande d'audition n'aient été présentés avant l'expiration du délai prévu à l'article R. 6362-3. " ;

3. Considérant que la SARL Ecole Française Motonautique soutient que la procédure de vérification engagée à son encontre serait irrégulière dès lors que le vérificateur a consulté sur place des dossiers en sus de ceux dont il avait exigé la communication et qu'il a emporté " un certain nombre de documents " hors de l'entreprise ;

4. Considérant que si l'administration admet qu'elle a effectivement emporté des documents, elle précise toutefois qu'il ne s'agissait que de copies de documents consultés sur place pour lesquelles elle avait obtenu l'autorisation du gérant de la société ; que, selon l'attestation de MmeB..., employée en qualité de secrétaire au sein de la société requérante, elle a bien procédé à des copies de certains documents, à savoir les fiches de présence 2008 et 2009 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'emport de ces copies a eu pour effet de priver la société de la possibilité de discuter utilement et contradictoirement des conséquences que le vérificateur a entendu tirer des documents qui lui ont été remis ; que si la société requérante soutient également que des documents originaux auraient été emportés et que le vérificateur aurait librement consulté, sur place, d'autres dossiers que ceux dont il avait exigé la communication, elle n'assortit son allégation d'aucune précision suffisante pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en particulier, elle ne saurait s'en remettre à la seule attestation de Mme B...qui, rédigée en des termes peu circonstanciés, ne permet pas d'établir de façon suffisamment probante l'emport par le vérificateur de documents originaux ou la consultation sur place d'autres pièces que celles qu'il avait exigées sans l'accord préalable de l'organisme de formation, ni, en tout état de cause, que ces documents ont effectivement servi à l'établissement de la décision contestée ;

Sur les conclusions à fin de décharge de la somme de 21 066,95 euros due au titre du remboursement de divers cocontractants pour absence de justificatifs des dépenses de formation :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6362-6 du code du travail : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 présentent tous documents et pièces établissant la réalité de ces actions. / A défaut, celles-ci sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement au cocontractant des sommes perçues conformément à l'article L. 6354-1. " ; qu'aux termes de l'article L. 6354-1 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle d'une prestation de formation, l'organisme prestataire rembourse au cocontractant les sommes indûment perçues de ce fait. " ; qu'aux termes de l'article R. 6332-26 dudit code : " Les employeurs ou les prestataires de formation adressent aux organismes collecteurs qui en font la demande une copie des feuilles d'émargement à partir desquelles sont établies les attestations de présence. Ces feuilles d'émargement font partie des documents que les organismes collecteurs sont tenus de produire aux agents chargés du contrôle prévu aux articles L. 6362-5 à L. 6362-7. " ; qu'aux termes de son article D. 6325-12 : " Les actions d'accompagnement ainsi que les enseignements généraux, professionnels et technologiques mentionnés à l'article L. 6325-13, mis en place dans le cadre d'un contrat de professionnalisation par un organisme de formation ou un établissement d'enseignement, donnent lieu à la signature, entre l'entreprise et l'organisme de formation ou l'établissement d'enseignement, d'une convention précisant les objectifs, le programme et les modalités d'organisation, d'évaluation et de sanction de la formation. " ;

6. Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L.6353-2 du code du travail : " Pour la réalisation des actions de formation professionnelle mentionnées au présent chapitre, les conventions et, en l'absence de conventions, les bons de commande ou factures contiennent des mentions obligatoires déterminées par décret en Conseil d'Etat. Ce décret fixe en outre les caractéristiques des actions de formation pour lesquelles les conventions sont conclues entre l'acheteur de formation, le dispensateur de formation et la personne physique qui entreprend la formation. " ; qu'aux termes de l'article R. 6353-1 de ce code : " Les conventions, les bons de commande ou factures mentionnés à l'article L. 6353-2 précisent : / 1° L'intitulé, la nature, la durée, les effectifs, les modalités du déroulement et de sanction de la formation ; / 2° Le prix et les contributions financières éventuelles de personnes publiques. " qu'aux termes de l'article L. 1221-10 du même code : " L'embauche d'un salarié ne peut intervenir qu'après déclaration nominative accomplie par l'employeur auprès des organismes de protection sociale désignés à cet effet. / L'employeur accomplit cette déclaration dans tous les lieux de travail où sont employés des salariés. "

7. Considérant que pour justifier de la réalisation des prestations et conventions de formation au titre des exercices 2008 et 2009, la SARL Ecole Française Motonautique soutient que les pièces qu'elle a transmises aux agents du contrôle permettaient d'établir la réalité des actions entreprises auprès des stagiaires et produit des attestations mensuelles ou globales de présence établies plus de deux ans après les faits ainsi que des livrets pédagogiques de stagiaires ; que, toutefois, ces documents sont à eux-seuls insuffisants pour justifier de la présence quotidienne des stagiaires alors que la société requérante doit disposer des feuilles d'émargement prévues à l'article R. 6332-26 du code du travail dont elle est tenue de remettre une copie aux organismes collecteurs qui en font la demande ; que si la société requérante entend se prévaloir des dispositions de l'article L. 6353-7 du code du travail en soutenant que des formations n'ont pu être assurées auprès de certains stagiaires du fait de leur absentéisme, elle n'apporte au soutien de son allégation aucun élément permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé alors qu'en tout état de cause, l'administration indique, sans être utilement contredite, qu'elle a déduit les heures non réalisées, même en cas d'absence du stagiaire ne relevant pas d'un cas de force majeure ;

8. Considérant, en outre, s'agissant des stagiaires Evan et Fiona Mazaud, qui ont bénéficié d'un contrat de professionnalisation, que le contrôleur a également retenu que les heures de formation en entreprise, à savoir 420 heures pour chacun d'eux, n'étaient pas justifiées en l'absence de la convention prévue à l'article D. 6325-12 du code du travail et en l'absence de déclaration préalable à l'embauche ; que ni la convention conclue entre la société EFM et la société Incentive Jet du 5 avril 2008, qui prévoit les conditions de mise en situation professionnelle des stagiaires, ni les contrats des 12 et 20 juin 2008 conclus entre la société requérante, les stagiaires et la société Incentive Jet ne sauraient constituer la convention prévue par ces dispositions faute de contenir l'ensemble des énonciations prévues par la réglementation, en particulier les effectifs, les modalités du déroulement et de sanction de la formation ; que pour le même motif, la société requérante ne peut utilement se prévaloir des factures qu'elle a adressées en juillet et novembre 2008 à Agefos PME Corse Sud dès lors qu'elles présentent les mêmes insuffisances ;

9. Considérant, enfin, que la SARL Ecole Française Motonautique ne saurait utilement soutenir que le contrôleur aurait commis une erreur de droit et une erreur de fait en retenant que les modalités de paiement doivent être exclusivement précisées dans le contrat de formation professionnelle dès lors qu'il ne s'agit pas d'un motif retenu par l'administration pour lui imposer le remboursement des sommes dont il s'agit à certains de ses cocontractants ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Ecole Française Motonautique n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la réalisation des prestations et conventions de formation pour les 12 dossiers retenus au titre des exercices 2008 et 2009, justifiant le remboursement de la somme totale de 21 066,95 euros à l'ensemble des cocontractants concernés par ces formations ;

Sur les conclusions à fin de décharge de la somme de 59 528,79 euros due au Trésor public au titre des dépenses de formation rejetées :

11. Considérant qu'aux termes de l'article L.6362-5 du code du travail : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : / 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; / 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. / A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10. " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-10 de ce code : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée. " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-7 du même code : " " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 versent au Trésor public, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet d'une décision de rejet en application de l'article L. 6362-10. " ;

12. Considérant que pour l'application du 2° de l'article L. 6362-5 du code du travail, le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision n° 2012-273 QPC du 21 septembre 2012, d'une part, que l'obligation de justifier le " bien-fondé " des dépenses faites au titre de la formation professionnelle continue a pour objet d'imposer que ces dépenses soient utiles à la réalisation des actions de formation professionnelle et, d'autre part, qu'en réprimant le défaut de justification de la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités, le législateur a entendu sanctionner une utilisation de ces fonds contraire, non à l'ensemble des dispositions législatives applicables, mais seulement à celles réglementant spécialement les activités de formation professionnelle continue ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a rejeté, au titre des exercices 2008 et 2009, des dépenses de la SARL Ecole Française Motonautique concernant, d'une part, des honoraires versés à 19 formateurs dont cinq étaient des fonctionnaires en activité sans justifier avoir obtenu une autorisation de cumul d'activités rémunérées en méconnaissance du décret n°2007-658 du 2 mai 2007 et quatorze pour ne pas être salariés, ni avoir d'existence juridique ou de numéro Siret en infraction avec les dispositions de l'article L. 8221-1 du code du travail, d'autre part, la location d'un jet ski à bras sans justifier que le loueur exerçait son activité de manière légale, en infraction avec le même article L. 8221-1, et enfin, pour ne pas avoir justifié de la réalité des dépenses de formation facturées à la société Aquasports Loisirs ;

14. Considérant que, faute de justifier de la réalité des dépenses de formation facturées à la société Aquasports Loisirs et, par voie de conséquence, d'établir que ces dépenses étaient utiles à la réalisation des actions de formation professionnelle, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions des articles précitées du code du travail en ordonnant qu'une somme égale au montant de ces dépenses soit versée au Trésor public ;

15. Considérant, en revanche, que les dépenses concernant les honoraires versés aux formateurs, dont il ne ressort pas de la décision contestée que ces derniers n'auraient pas assuré les heures de formation pour lesquelles ils ont été rémunérés et la location du jet ski, compte tenu de la nature des formations assurées, doivent être regardées comme ayant été utiles à la réalisation des actions de formation professionnelle assurées par la société requérante ; que, par ailleurs, les infractions relevées à l'encontre de la société requérante, à savoir la méconnaissance des dispositions de l'article L. 8221-1 du code du travail réprimant le travail dissimulé ou du décret n°2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d'activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l'Etat, sont sans lien avec une législation réglementant spécialement les activités de formation professionnelle continue et que la société aurait méconnue ; que dans ces conditions, la SARL Ecole Française Motonautique est fondée à soutenir que la décision contestée du préfet de la région Pays de la Loire est illégale en tant qu'elle lui ordonne de verser au Trésor public une somme égale au montant de ces dépenses et à demander, par voie de conséquence, à être déchargée des sommes correspondantes, soit 55 288,79 euros ;

16. Considérant, cependant, qu'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours de pleine juridiction contre la décision infligeant une amende sur le fondement des dispositions précitées du code du travail, de statuer sur le bien-fondé de la décision contestée et de réduire, le cas échéant, le montant de l'amende infligée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; que si l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge que la sanction pécuniaire est justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais relatif au même manquement, le juge administratif peut substituer au motif sur lequel s'est fondé l'autorité administrative un autre motif de droit ou de fait relatif au même manquement, sous réserve que la personne sanctionnée bénéficie des mêmes garanties de procédure et que la décision du juge ne conduise pas à aggraver la sanction infligée ;

17. Considérant que le ministre soutient que les dépenses correspondant aux honoraires versés à des formateurs qui n'ont pas d'existence juridique, ni obtenu d'autorisation d'exercice de leur activité ne peuvent être rattachées à l'activité de formation professionnelle continue de la société, compte tenu de la nature manifestement illégale de cette rémunération et de l'absence de justification, par la société requérante, du lien entre ces dépenses et la réalisation des actions de formation correspondantes ; que ce motif a été communiqué à la SARL Ecole Française Motonautique et n'a en l'espèce pas privé cette dernière de garanties de procédure dès lors qu'elle a été à même de présenter ses observations ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 12 du présent arrêt, le ministre ne peut utilement invoquer, pour l'application des dispositions du code du travail dont il s'agit, l'illégalité commise par la société dès lors que l'infraction est sans lien avec une législation réglementant spécialement les activités de formation professionnelle continue que la SARL Ecole Française Motonautique n'aurait pas respectée ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des énonciations de la décision contestée qui ne remet en cause que quelques heures de stages attribuées à certains stagiaires et vise, par ailleurs, des feuilles d'émargement dont la sincérité n'a pas été remise en cause, que les formateurs n'auraient pas assuré les actions de formation pour lesquelles ils ont été rémunérés ; que par suite, la demande de substitution de motifs présentée par le ministre doit être écartée ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Ecole Française Motonautique est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a, d'une part, rejeté sa demande en tant qu'il n'a pas annulé la décision contestée du préfet de la région Pays de la Loire rejetant les dépenses relatives à la rémunération des formateurs et de la formatrice occasionnelle ainsi que celle portant sur la location d'un jet ski et a ordonné le versement de la somme de 55 288,79 euros au Trésor public, et, d'autre part, ne l'a pas déchargée de cette même somme ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Ecole Française Motonautique, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande le ministre du travail, de 1'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la SARL Ecole Française Motonautique, au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 16 décembre 2011 du préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, est annulée en tant qu'elle rejette les dépenses relatives à la rémunération des formateurs et de la formatrice occasionnelle ainsi que celle portant sur la location d'un jet ski et ordonne le versement de la somme correspondante au Trésor public.

Article 2 : La SARL Ecole Française Motonautique est déchargée de la somme de 55 288,79 euros ;

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il est contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la SARL Ecole Française Motonautique une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Ecole Française Motonautique est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par le ministre du travail, de 1'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ecole Française Motonautique et au ministre du travail, de 1'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er février 2017.

Le rapporteur,

M. C...Le président,

J-F. MILLET

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre du travail, de 1'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°15NT01224


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01224
Date de la décision : 01/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : CABINET BOULANGER JOUBERT-BOULANGER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-01;15nt01224 ?
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